Le crédit syndiqué en devises que l’Etat vient de signer auprès des banques locales commence déjà à faire couler de l’encre. Quelques précisions s’imposent pour que l’opération soit bien analysée.
Cette démarche n’est pas une surprise. En 2017, l’Etat a levé 250 millions d’euros, sur trois ans également, et avec les mêmes modes de remboursement. La différence concerne la rémunération de l’emprunt qui était inférieure de 25 points de base par rapport à celui obtenu hier. De plus, ce crédit était programmé dès la fin de l’année 2018. D’ailleurs, la BCT a bien préparé le terrain pour de telles opérations, à travers une circulaire aux banques promulguée le 26 décembre 2018.
Plusieurs se posent maintenant la question suivante : si l’Etat parvient à lever une telle somme, avec des taux aussi faibles sur le marché local, pourquoi aller chercher les devises ailleurs à des prix beaucoup plus élevés ?
Primo, il faut tenir compte du fait que par rapport aux réserves en monnaies étrangères, il s’agit d’une opération blanche, car ce montant est déjà intégré dans le stock actuel qui s’élève à 14,5 milliards de dinars.
Secundo, il faut comprendre que seule une partie de la devise détenue par une banque peut être utilisée dans les opérations d’exploitation, à l’instar des opérations de change dans ses guichets. L’autre partie, appartenant essentiellement aux entreprises offshore et déposée dans des comptes à terme, ne peut être utilisée librement. C’est ce que la réglementation appelle des devises non cessibles.
La circulaire du 26 décembre a concerné, effectivement, cette partie des devises. Les conditions d’utilisation de ces ressources sont très strictes. A titre d’exemple, elles ne peuvent être placées à l’étranger qu’auprès des banques correspondantes et à condition que celles-ci soient notées au moins A-2 (ou son équivalent) par l’une des trois principales agences de notation (S&P, Moody’s et Fitch Ratings).
Parmi les possibles utilisations locales, cette devise peut être affectée au financement des investissements par des entreprises résidentes, mais exportatrices, ou à certains crédits d’exploitation pour des sociétés non-résidentes. Il y a également la possibilité de la placer auprès de la BCT ou dans le cadre de crédits pour l’Etat, comme le cas d’espèce.
Mais si cette opération s’avère profitable pour l’Etat, ce n’est clairement pas le cas pour les banques. De plus, nous risquons de voir des tensions sur le marché des changes surtout que cela intervient juste avant le coup d’envoi de la saison du transfert des dividendes.