Ressources financières limitées, décrets gouvernementaux non publiés, absence de coordination avec le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif et campagnes de dénigrement. Tels sont, entre autres, les problèmes de plusieurs instances indépendantes en Tunisie. Malgré les réalisations considérables, ces défaillances commencent à peser lourdement sur leurs activités.
Notre propos dans cet article est de revenir sur les réalisations et les défaillances de quelques instances indépendantes. Ces instances, qui ont vu le jour grâce à la Constitution de 2014, apportent un nouveau souffle à la vie politique tunisienne.
Ramy Saleh, qui dirige le bureau Maghreb du réseau Euromed, reconnaît que les difficultés auxquelles les instances font face sont multiples. Principalement, il s’agit de difficultés au niveau de la législation, difficultés financières et de difficultés en matière de mise à disposition des ressources humaines nécessaires.
« Pratiquement toutes les instances ont ces problèmes », avance-t-il. Pis encore le problème de synchronisation avec le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif est de taille. Car « la plupart de ces instances n’ont pas été suffisamment consulté concernant les projets de loi qui relèvent de leurs compétences », affirme-t-il avant de recommander une réelle collaboration entre les instances, le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif, lors de sa présence à la première conférence annuelle de la Ligue des instances publiques indépendantes », tenue aujourd’hui, 5 avril à Tunis.
Instances indépendantes : mêmes soucis
Le fil conducteur entre toutes ces instances, ce ne sont autres que ces problèmes qui entravent leur travail. Qu’on en juge. Le cas de l’Instance nationale de la protection des données personnelles (INPDP) illustre bel et bien ce dont on parle. Son président Chawki Gaddes confirme ce constat peu reluisant. C’est une instance indépendante sur le plan fonctionnel et dépendante sur le plan organique puisque ses membres sont nommés par le chef du gouvernement pour un mandat déterminé. L’absence de facilités pour le recrutement, la négociation du budget avec le ministère des Finances handicapent le travail de l’instance. « Actuellement nous sommes uniquement trois personnes au sein de l’instance et on ne peut pas y remédier étant donné qu’on n’a pas de facilités de gestion pour pouvoir recruter », dit-il.
D’ailleurs, l’instance dispose d’un budget de 230 mille dinars, mais elle n’arrive pas à les consommer vu le manque de personnel. Malgré tout cela, l’Instance a pu accomplir un certain nombre de réalisations. Le président de l’Instance cite « l’introduction de la Tunisie dans la famille assez restreinte de la convention 108 du Conseil de l’Europe. Ainsi la Tunisie en est le 51e membre ». « Aujourd’hui la Tunisie a un siège au sein du Conseil de l’Europe », lance-t-il avant de continuer : »Les présidents des associations francophones de la protection des données personnelles ont élu la Tunisie comme président de l’Association francophone des autorités de protection des données personnelles(AFAPDP) ». Cette association sera présente au sommet de la francophonie de 2020. Notre interlocuteur a fait savoir entre autres que grâce à l’implication de l’instance la Présidence du gouvernement a publié une circulaire sur l’utilisation de la CIN.
Nabil Baffoun, actuel président de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE), affirme que même dans le cas de l’existence de menaces contre l’indépendance de l’ISIE, les hommes et femmes de l’ISIE sont capables de se mobiliser pour défendre cette indépendance . « Si nous sommes là c’est pour garder l’indépendance, la neutralité et tenir les élections comme il se doit », lance-t-il. A l’instar des autres instances, les difficultés matérielles et logistiques ne manquent pas mais « nous sommes capable de vaincre ce problème surtout que le gouvernement est coopératif », affirme-t-il. Par ailleurs, il a expliqué que le manque des ressources financières et logistiques est une carence commune à toutes les instances.
De son côté le président de la Haute Autorité Indépendante de la Communication Audiovisuelle (HAICA), Nouri Lajmi, nous affirme que la HAICA a pu réaliser des progrès importants au niveau de l’organisation du paysage médiatique, la publication du cahier des charges, l’octroi des licences mais « pour que nos décisions puissent être appliquer, nous sommes dépendants du soutien des différentes institutions de l’Etat. Nous avons également besoin de la Banque centrale pour faire appliquer un certain nombre de décisions et pour collecter les amendes », lance-t-il.
Et pourtant le Chef du gouvernement Youssef Chahed n’a de cesse de déclarer qu’il oeuvrera pour garantir encore l’indépendance des instances indépendantes.
Vous n’avez pas cité le cas de l’IVD, plus connue comme étant « L’instance de Ben Sedrine ».
Cette instance est devenue un état dans l’état, puisqu’elle ne reconnaît ni l’autorité de l’exécutif ni celle de l’ARP, se disant toujours « maître d’elle-même ».
N’a-t-elle pas prolongé son activité malgré la décision de l’ARP d’y mettre fin?
N’a-t-elle pas défié la justice en refusant de réintégrer dans leur fonction des membres démis par la « présidente »?
N’a-t-elle pas recruté des employés de sa famille grassement payés pour ne rien faire?