En Tunisie, la mise en place d’une politique de décentralisation a constitué une réponse aux revendications sociales post janvier 2011. Elles réclamaient plus d’équité socio-spatiale, de dignité et une démocratisation de la gouvernance locale. Elles dénonçaient aussi l’injustice sociale et économique, ainsi que le déséquilibre entre les régions. Ainsi, la Constitution du 27 janvier 2014 a fait de la décentralisation l’un des principes cardinaux sur lequel se fonde la nouvelle organisation territoriale du pays.
Aujourd’hui les travaux préparatifs sont achevés et CILG-VNG CILG, International Development Center for Innovative Local Governance- une organisation en conseil et développement auprès des institutions publiques internationales ou nationales, qui se concentre sur la région MENA- annonce avec ses partenaires le démarrage officiel du Programme IDEMA le 11 avril à Tunis.
En effet, l’événement se déroulait en présence des hauts responsables du gouvernement tunisien, de l’ambassadeur des Pays-Bas, des partenaires nationaux et internationaux du CILG-VNG. Étaient également présents des bénéficiaires du programme et les différentes parties prenantes du processus de décentralisation, ainsi que des experts dans divers domaines liés à la gouvernance et au développement local.
La décentralisation n’est pas un simple décret
Participant à ce colloque, Mokhtar Hammami, ministre des Affaires locales, a rappelé que la mise en oeuvre de la décentralisation prendra du temps avant qu’elle aboutisse.
Car, précise-t-il : « La décentralisation n’est pas un simple décret, mais elle s’exerce. D’ailleurs, les trois prochaines années 2019, 2020 et 2021 seront difficiles en termes d’appropriation ». Et d’ajouter que le processus de la décentralisation ne se limite pas à ces trois années, mais aux 20 prochaines.
Selon lui, 1029 cadres investiront les nouvelles communes. Il souligne dans ce contexte qu’un programme de formation ambitieux est d’ores et déjà en place de juin 2019 à juin 2020, avec la formation de 10 mille autres cadres.
Le processus de la décentralisation en Tunisie passe par une nouvelle phase
Et d’ajouter qu’ « après les élections municipales et l’adoption d’un nouveau code des collectivités locales, le processus de la décentralisation en Tunisie passe par une nouvelle phase. Tous les efforts doivent converger, notamment ceux du ministère, des municipalités, de la société civile et des institutions internationales expertes. Pour cette raison, nous sommes contents de la collaboration fructueuse avec le CILG VNG International qui soutient, depuis longtemps, ce processus de décentralisation et nous souhaitons que cette collaboration continue dans le futur ».
Par ailleurs, notons que la tenue des premières élections municipales, le 6 mai 2018, a permis l’élection de 350 conseils municipaux. Sur l’ensemble des 7200 élus, 37% sont des jeunes; 47% sont des femmes dont 69 sont présidentes de communes; 281 sont vice-présidentes; et plus de 2000 sont présidentes de commissions municipales.
Dans ce sens, IDEMA vient d’appuyer les efforts du gouvernement tunisien dans le processus de décentralisation, ainsi que l’accompagnement de 12 municipalités sur les aspects liés à la gouvernance locale. De plus, il met l’accent sur l’approche participative et la prise en compte des spécificités et des rôles des femmes, des jeunes et des groupes défavorisés.
L’expertise néerlandaise de la décentralisation
Financé par le ministère des Affaires étrangères des Pays-Bas et appuyé par l’Agence de coopération internationale de l’Association des Communes Néerlandaises, VNG International, IDEMA s’inscrit dans le cadre de l’assistance technique que le CILG-VNG International apporte depuis des années au processus de décentralisation et de gouvernance locale en Tunisie.
En outre, Pieter Jeroense, directeur adjoint du VNG International, exprime, dans ce cadre, qu’il est très content de cette nouvelle collaboration. Et de poursuivre : « La VNG continue à mettre à la disposition du gouvernement tunisien et des municipalités tunisiennes l’ensemble de l’expérience néerlandaises ainsi que son expertise dans d’autres pays afin de réussir le processus de la décentralisation et de la gouvernance locale en Tunisie ».
De plus, Sami Yassine Turki, Technical Director de CILG-VNG international rappelle que la Tunisie n’est pas un pays isolé. Il estime qu’elle doit s’ouvrir sur ce qui se passe ailleurs par une circulation de l’expérience.
Interrogé sur le fait de savoir si l’approche de la démocratie participative est respectée, il répond : « Il est important que les citoyens participent à la gestion des affaires de leur commune. Ce qui engendre une initiative pour une décentralisation efficiente et des municipalités attractives. »
IDEMA cherche à accompagner une vision municipale claire du développement
Puis, il conclut : « Les 350 conseils municipaux élus sont au cœur du nouveau processus du développement local et, afin qu’ils jouent pleinement leur rôle, nous devons les soutenir et les accompagner. Que ce soit au niveau de la planification, de la gestion de leurs services qu’au niveau de leurs rôles de fédérateurs des différentes forces locales, il faut les accompagner pour une vision municipale claire sur le développement. »
Notons que le financement du programme s’élève à un million 400. 000 euros. Environ 5 millions de dinars sont destinés exclusivement aux petits projets avec la condition sine qua non de la participation des jeunes et des femmes.
Enfin, pour rappel, IDEMA intervient dans douze municipalités, à savoir : Douar Hicher, Raoued, Ain Drahem, Béja, El Krib, Thibar, Bir Hfay, Hessi Ferid, Benguerdane, Dehiba, Boughrara et Jemna. Elle fournit une assistance technique qui vise à promouvoir le développement économique des municipalités. Elle vise l’amélioration de la qualité de leurs services et l’appui dans la compréhension et la mise en œuvre de leurs nouvelles compétences. Ce programme se chargera aussi de faire la promotion de la participation citoyenne dans l’élaboration des documents de planification et de gestion de l’espace. Et ce, pour une meilleure intégration des jeunes, des femmes et des populations précaires ou exclues dans la prise de décision locale. Il favorisera la transparence et la redevabilité des acteurs locaux vis-à-vis des citoyens.