Pourquoi les électeurs ne se mobilisent pas massivement pour les prochaines élections législatives et pour la Présidentielle ? La question est plus au moins légitime étant donné que le chiffre des Tunisiens non-inscrits, pour les élections 2019 dépasse les trois millions d’électeurs. Et ce, d’après les chiffres provisoires de l’Instance supérieure indépendante pour les élections (ISIE).
La répartition de ces électeurs potentiels en dit long sur leur vulnérabilité et leur désintérêt pour la sphère politique, en dépit de son importance cruciale. Et comment ? il s’agit de :
- 350 mille Tunisiens résidant à l’étranger;
- 304 mille élèves;
- 28 mille ouvriers dans les usines;
- 80 mille travailleurs agricoles;
- 1 million 230 mille femmes au foyer;
- 28 mille retraités;
- 793 mille électeurs toute catégorie confondue.
A analyser ces chiffres, il en ressort que toutes ces catégorie sont vulnérables pour ne pas dire précaires. En effet, les gouvernements successifs n’ont pas réussi à résoudre les problèmes de quelques catégories sociales précitées. Inutile de rappeler la souffrance des retraités qui ont peiné depuis des années pour plusieurs cause : non alignement de leur pension de retraite au pouvoir d’achat et à la flambée des prix d’une part. D’autre part, ils peinent à cause du retard du versement de leur pension de retraite.
304 mille élèves ont souffert pendant les dernières années : grèves successives, réforme éducative qui tarde à se mettre en place à cause des tractations entre le ministère de l’Education et la Fédération générale de l’Enseignement secondaire. A cela s’ajoute l’infrastructure délabrée dont la situation menace les élèves dans plusieurs zones du développement régional.
Les Tunisiens résidents à l’étranger, dont une bonne partie a quitté la Tunisie à la recherche d’un avenir meilleur, semblent ne pas vouloir jeter un regard sur ce qui se passe en Tunisie. Cela ne doit pas se traduire par un manque de patriotisme, mais les compétences tunisiennes résidentes à l’étranger ont l’air d’oublier les problèmes qui les ont conduits à quitter le pays.
Elles présentent un potentiel électoral qu’aucun parti politique n’a pu exploiter ou orienter vers son programme. 1 million 230 mille femmes au foyer se préoccupent plus de l’avenir de leur famille et d’un avenir meilleur pour leurs enfants loin des tractations politiques.
Quelles perspectives pour les élections 2019
Commentant ce chiffre, l’enseignant chercheur en sociologie Foued Ghorbali ne cache pas son inquiétude quant à ces chiffres, dans sa déclaration à leconomistemaghrebin.com. Pour lui, le boycott des élections est une forme de protestation politique et sociale à la fois. Il affirme que ceux et celles qui ont choisi de boycotter les élections considèrent que les partis politiques n’ont pas répondu comme il se doit à leurs revendications. Par ailleurs, c’est un acte qui traduit les difficultés d’une démocratie naissante et de la transition démocratique qui demeure précaire en Tunisie.
Il considère également que le boycott reflète un problème au niveau de la démocratie représentative. « Le problème se pose quand un électeur vote pour un certain député en croyant qu’il défendra ses intérêts et qu’il se rend compte plus tard qu’il est au service des lobbys », précise-t-il. D’autre part le boycott des élections révèle que la notion de l’électeur capable de changer le régime en place par le vote n’est pas ancré dans l’esprit collectif des Tunisiens. Ainsi le Tunisien n’a pas encore compris qu’il a la possibilité de sanctionner les gouvernements pendant les élections. En guise de conclusion, Foued Ghorbali affirme que le silence de ces Tunisiens sera décisif au niveau des rapports de forces politiques lors des prochaines élections.
Une chose est sûre : les partis politiques qu’ils soient de l’opposition ou au pouvoir n’ont pas su répondre aux aspirations de ces catégories sociales. Le silence de ces Tunisiens qui préfèrent rester dans l’ombre sera retentissant.