Que faut-il penser du discours du chef du gouvernement ? Leith Ben Becher, membre fondateur du mouvement Qadiroun dresse un état des lieux. Il souligne : « Il est à mon sens un non événement politique. »
Et de poursuivre : « Malgré une posture affichée d’homme d’Etat, le chef du gouvernement
s’est ingénié à éviter les vraies questions qui taraudent les Tunisiens. Pas un mot sur la crise de l’enseignement supérieur, ni sur les contestations ou les revendications de la plupart des professions touchées par la hausse du prix des carburants, au demeurant très mal expliquée. »
Il ajoute : « Tout comme il n’a rien évoqué des événements politiques graves qui se succèdent depuis quelques semaines dans notre voisinage et qui ne sont pourtant pas sans risques sur les équilibres géopolitiques de notre région, ni sans conséquences sur notre pays. »
Leith Ben Becher : « Un discours aux forts relents autoritaires »
Selon lui, en fait, en guise de feuille de route, M. Chahed a servi un discours où le populisme le disputait à l’électoralisme. Il précise : « Par ailleurs, à entendre le Chef du gouvernement parler d’un ton ferme, on ne pouvait pas s’empêcher de relever un fort relent autoritaire que d’aucun juge pour le moins inquiétant, voire déplacé. »
Et de poursuivre : « En effet, pourquoi ces mises en garde à peine voilées au sujet des syndicats (sans préciser lesquels) jugés excessifs, alors que le même gouvernement avait semblé s’être plutôt accommodé des actions violentes et sans réelle légitimité des « révoltés » du Kamour ou celles non moins douteuses qui ont longtemps plombé l’activité
économique dans le bassin minier ?
Par ailleurs, M. Ben Becher s’interroge les raisons qui ont poussé le chef du gouvernement a soudainement s’offusquer de l’usage des fausses nouvelles. Tout comme il pointe du doigt les graves accusations prononcées à l’encontre d’un ministre de l’Intérieur débarqué sans beaucoup de ménagement il y a quelques mois. D’ailleurs, M. Ben Becher fait savoir que ces accusations n’ont donné lieu à aucune poursuite judiciaire connue, ni véritable explication politique. Et de citer à titre d’exemple l’opprobre jeté sur tel ministre brutalement congédié et « voué aux gémonies sur la base d’allégations peu convaincantes ».
Leith Ben Becher : « Nous avons eu plutôt droit à un discours de pré-campagne électorale »
Évoquant les priorités annoncées pour les six prochains mois, M. Ben Becher a indiqué : « Elles s’apparentent à mon sens soit à des mesures de gestion courante, comme celles ayant trait aux contrôles des prix et des circuits de distribution, puisqu’il faut rassurer les bonnes gens à l’approche de Ramadan; soit à des annonces « réchauffées » de projets d’infrastructures déjà engagés mais accusant un retard certain, comme le RFR; ou ne pouvant même pas être entamés avant la prochaine législature, comme le port en eau profonde d’Enfidha. »
Et de poursuivre : « Ce dernier projet qui remonte à l’ère Ben Ali, étant au demeurant très contesté quant à sa pertinence économique et à son impact environnemental! En somme, nous avons eu plutôt droit à un discours engagé mais de pré-campagne électorale. Alors que dans le même temps le chef du gouvernement semblait s’offusquer que d’autres s’y soient prématurément engagés. »
Leith Ben Becher : « Le gouvernement s’est déjà mis en mode campagne électorale »
M. Ben Becher souligne que les prochains six mois promettent d’être bien difficiles pour le pays qui a besoin d’envisager les échéances électorale dans un climat d’apaisement et de confiance.
Cela dit, la grande question qui taraude l’opinion publique et la classe politique est de savoir comment rétablir cette confiance avec les jeunes. Confiance qui est presque inexistante. Il répond à cette interrogation : « Elle est pourtant nécessaire pour que chacun et surtout les plus jeunes d’entre nous puissent encore espérer dans des lendemains meilleurs et plus apaisés. Et que leur vote puisse changer la donne. »
Il conclut : « Aujourd’hui, le gouvernement s’est déjà mis en mode campagne électorale voulant se succéder à lui même. Il risque de fausser la donne en privilégiant les promesses électorales à la solution des crises profondes. Et ce, sans actions concrètes « conduites par un gouvernement entièrement dévoué à la tâche avec beaucoup d’impartialité et de sens de l’intérêt général ».