A l’heure actuelle, les 137 députés présents à l’ARP débattent sur les POUR et les CONTRE de l’amendement de la loi électorale à quatre mois des élections.
Or, « réviser la loi électorale à l’approche des élections, n’est pas vu d’un bon œil », soulignent les universitaires et les experts du droit constitutionnel.
Loi électorale et règles juridiques
Cela ne fera qu’entraver le processus démocratique, rappellent un grand nombre d’universitaires du droit constitutionnel. Jinan Limam, enseignante universitaire, estime que les acteurs politiques clés ont provoqué et ont profité de ces défaillances pour renforcer leur domination, créant un climat malsain d’impunité et de clientélisme.
En d’autres termes, les règles juridiques doivent être stables, claires, accessibles et prévisibles. Par conséquent, les révisions envisagées même si elles sont adoptées doivent absolument s’appliquer aux prochaines élections et non à celles de 2019.
Slim Loghmani: « Ces élections ne seraient pas honnêtes »
Même constat pour Slim Loghmani, professeur de droit. Il estime que tenter d’écarter des concurrents encombrants par une loi taillée sur mesure priverait les élections de toute crédibilité. La norme des élections est qu’elles soient périodiques et honnêtes, ces élections ne seraient pas honnêtes.”
Notons que la Tunisie est membre de la Commission européenne pour la démocratie par le droit (Commission de Venise) dans son Code de bonne conduite en matière électorale (2002). Ainsi, les éléments fondamentaux du droit électoral, en particulier le système électoral proprement dit et le découpage des circonscriptions, ne devraient pas pouvoir être modifiés à moins d’un an avant une élection.
Ennahdha : « Il faut séparer l’action politique de l’action associative et caritative »
Mais qu’en pensent les partis politiques au pouvoir ? Pour Ennahdha, le constat est clair: la loi électorale doit être modifiée, affirme Rached Ghannouchi, dans une déclaration aux médias. Il souligne que le mouvement a l’intention d’approuver un certain nombre de points dans le projet de loi visant à réviser la loi électorale. A titre d’exemple, le consensus sur le seuil spécifique de 3% pour être élu et siéger au Parlement.
Tout comme il a mis l’accent sur la nécessaire séparation entre l’action politique, l’action caritative et l’action associative.
Par ailleurs, seule l’Union générale tunisienne du travail (UGTT) s’est opposée à cet amendement en soulignant dans un communiqué que la révision de cette loi durant la période préélectorale pourrait avoir de lourdes conséquences. Ce qui entrave une fois de plus le processus électoral.
Selon le secrétaire général de l’UGTT, Noureddine Taboubi, porter des modifications à la loi électorale à quelques mois des élections, n’est autre que le fruit de calculs partisans et d’intérêts personnels.
Rappelons que le projet de loi soumis à l’ARP par le gouvernement – soutenu par le parti Tahya Tounes représenté à l’ARP par le bloc parlementaire de la Coalition nationale – se propose d’amender la loi organique n° 16 du 26 mai 2014, relative aux élections et au référendum comme suit : le seuil de représentativité devrait passer de 3 à 5 %. En outre, interdiction serait faite aux figures des médias et des réseaux associatifs de se présenter aux prochaines élections.