Actuellement, il y a une confusion dans les esprits des Tunisiens, un désarroi au sujet de l’avenir en général et des prochaines élections en particulier. Tout est brouillé ou tout a été sciemment embrouillé.
Quelques âmes damnées du marécage politique participent à rendre les perspectives plus opaques encore en agitant l’éventualité d’ajourner les élections de 2019, faute de pouvoir les truquer à leur avantage.
L’ISIE est dans leur point de mire. Il semble que l’Instance déplairait pour avoir notamment oser ce million et quatre cent mille nouveaux inscrits qui risqueraient de saper une confortable mainmise sur ce que ces agglomérats politiques considèrent comme « leur électorat », déjà réduit à peau de chagrin.
Pour y parvenir, c’est la politique du cheval de Troie qui est employée grâce à quelques « agents troubles » dormants, préalablement placés pour exécuter un programme malveillant le jour voulu et gripper ainsi la machine électorale. Les postures adoptées par une Assemblée des Représentants du Peuple voudraient nous rejouer le coup tordu des prolongations, commis par l’inénarrable Assemblée Nationale Constituante tunisienne de 2011. On pourrait multiplier les déclarations de dirigeants
Cela dit, il est aléatoire à ce stade du processus électoral de définir et d’analyser les comportements des différentes catégories du corps électoral, même avec cet apport bénéfique des nouveaux inscrits. Les sondages d’opinion frelatés qui sont servis avec une effronterie incurable ne peuvent qu’ajouter du tohu-bohu au capharnaüm ambiant. Mais, c’est aussi un scrutin imprévisible avec les probables abstentionnistes, dont le nombre déterminerait de fait le résultat des élections.
Il s’agit, pour tout citoyen avisé, de déjouer les combines ourdies par ces états-majors de l’ombre. La première recommandation est d’exiger que le scrutin se tienne aux dates fixées (les élections législatives en Tunisie : dimanche 6 octobre 2019 et les élections législatives à l’étranger : vendredi, samedi et dimanche 4, 5 et 6 octobre 2019. Le premier tour de l’élection présidentielle en Tunisie : dimanche 10 novembre 2019, à l’étranger : vendredi, samedi et dimanche 8, 9 et 10 novembre 2019. Le deuxième tour de l’élection présidentielle, dans tous les cas, ne doit pas dépasser le 29 décembre 2019).
Il n’est pas question de prolonger la présence au pouvoir de cette caste malfaisante avec un tel bilan catastrophique, ne serait-ce qu’un seul jour, et sous aucun prétexte.
Ensuite, il est essentiel d’aller voter massivement pour sanctionner tous les postulants (aux présidentielles et aux législatives) issus des formations et leurs dérivés qui ont participé à piller et à saccager le pays.
George Bernard Shaw disait si bien : « Les hommes politiques et les couches des bébés doivent être changés souvent… et pour les mêmes raisons » ! Par la même occasion, les candidatures fantaisistes seraient tout simplement ignorées. Plusieurs de ces spécimens farfelus, voire ubuesques pointent déjà leur nez.
Mais alors pour qui voter ? Avec la kyrielle de postulants qui s’échauffent, on risque d’avoir le tournis ! Ce balisage préélectoral se propose d’être un outil d’aide à la décision avant le scrutin, plutôt dans le registre de la dérision.
Lorsque l’on prend suffisamment de recul vis-à-vis de la réalité, on peut tourner en persiflage ce qui nous donne tant de soucis. Ce descriptif n’indiquera pas pour qui voter nominativement, mais il permettra éventuellement d’y voir un peu plus clair, de stimuler la réflexion. Il a été constaté que les plus intègres et les plus brillants ne vont plus en politique : ils craignent de recevoir le coup fatal de la part des prédateurs bien incrustés dans le paysage politico-mercantile, puisque le fait de se mettre au service de l’intérêt général n’est plus ce don de soi, cette abnégation et ce dévouement, il est devenu un sport non seulement de rixe, mais de survie. Le goût du pouvoir séduit plus les escrocs que les honnêtes gens.
Commençons par tenter de brosser un portrait-robot du Président de la République recherché (ou fantasmé) par les Tunisiens. Il devrait avant tout être incorruptible, sans être pour autant un inquisiteur et implacable purificateur sélectif. Il faut bien fouiller pour trouver cette perle rare de nos jours ! Mais soyons relativement optimistes. Quelques qualités humaines ne seraient pas boudées : l’ouverture d’esprit, la maîtrise de soi, à la fois de l’autorité et de l’humilité, intelligent, courageux, proche des gens, cultivé et parlant un français et un anglais impeccables en plus de l’arabe, ajoutons un zeste d’éthique de la responsabilité. Cette féérique personne devrait veiller à consolider l’unité nationale, à assurer l’intégrité du territoire et à restaurer l’autorité de l’Etat.
Allons donc, et puis quoi encore diront les « nabbara » de service ! Ils ont peut-être raison cette fois-ci.
Attendez, ce n’est pas tout. Cette illustre personne devrait être capable de s’affranchir des clivages partisans et des influences familiales (filiales) ou claniques.
Désormais, le renouvellement générationnel est primordial. Les symboles de la gérontocratie sont priés d’aller se reposer. Ils ont déjà causé tant de dégâts. Evitons particulièrement les cracks de la tromperie, les sournois « magouilleurs », porte-drapeau de l’époque beylicale révolue.
L’âge de l’élu(e) serait entre 45-50 ans, ce qui ne signifie nullement que nous soyons obligés d’endurer pendant cinq années la présence à Carthage d’une jeune personne dégingandée, atteinte du syndrome de l’enfant gâté, immature et arrogant. N’oublions pas l’aspect physique qui doit être avenant et l’allure volontaire, pour ne pas subir les railleries lors des rencontres internationales. Bourguiba avait de la prestance et de la classe, malgré sa petite taille. Bref, un président qui ne ferait qu’un seul mandat nous sied parfaitement.
Il s’avère finalement que le choix d’un président de la République n’est pas si aisé, mais celui des « représentants du peuple » est encore plus problématique. Avec le réchauffement climatique, nous aurions besoin d’hommes et de femmes qui se montreraient résolument des pompiers et non des pyromanes.
Mais, pour faciliter le choix, inversons la règle pour mentionner ce qu’un député ne doit pas faire et réclamons ce qu’il ne doit pas être. Le postulant ne doit pas avoir un extrait du casier judiciaire vierge, puisque l’immunité parlementaire le couvrira et il ne pourra être poursuivi ou arrêté, en matière criminelle ou correctionnelle pendant la durée de la session parlementaire.
Nul besoin de diplôme pour se lancer, il suffit d’avoir une insolente témérité, de l’arrivisme, pas trop de scrupules, une aptitude à mentir et à dissimuler ! Il n’est pas question qu’il sacrifie ses propres intérêts pour soutenir et défendre ceux de ses électeurs, il ne doit chercher qu’à remplir ses poches. Surtout il ne doit en aucune façon avoir des idées pour améliorer le sort de ses concitoyens, il doit être l’exemple même de la vacuité. Georges Clémenceau ne disait-il pas des députés : « Qu’est-ce qui les sépare ? Leurs idées. Ils en ont si peu ». Il doit aussi s’exercer dès la déposition de sa candidature à plonger dans le tapotement sur son téléphone portable pendant des heures, pour envoyer des textos, ou lire le journal (s’il sait lire), piquer quelques sommes lorsque les séances s’allongent, ou jouer au démineur, sans oublier bien évidemment de discuter le reste du temps avec ses voisins sur tout et rien ! Côté interventions dans l’hémicycle, il n’est pas question d’être aphasique, les harangues qui chutent de la bouche doivent retentir sonores, résonnantes. Les prétendants peuvent être rassurés, l’électeur votera pour les plus rapaces et les plus féroces.
Ne cherchez pas l’idéal, il a un attrait pernicieux. Il a été démontré tant de fois qu’il n’existe pas, on se perd à l’espérer encore. La démocrature de fait dont nous bénéficions n’est pas le gouvernement par la majorité mais bien celui de la plus forte minorité, bien aidée en cela par un système électoral pour éliminer les concurrents, éviter la dilution des votes et canaliser les voix !
En fait, la seule ambition de cette tentative de balisage préélectoral est une récréation à l’angoisse pour essayer de désamorcer nos craintes, dans un climat étouffant et un brouillard de la navigation à vue qui s’éternise. « L’humour est la politesse du désespoir », nous garantissait Oscar Wilde.