Durant les deux dernières semaines, les indicateurs de l’économie tunisienne se sont multipliés.
La BCT publiait sa note de conjoncture. Le FMI diffusait un communiqué de presse. Le Ministère des Finances présentait l’état d’avancement de l’exécution du budget 2019. Cela sans oublier les chiffres périodiques de l’INS. Nous disposons donc d’un tableau complet qui permet de former un avis objectif sur la situation actuelle de l’économie tunisienne.
Croissance en demi-teinte de l’économie tunisienne
Et le point qui dérange le plus reste la croissance. Celle-ci reste faible avec une progression de 1,1% en rythme annuel et 0,1% en rythme séquentiel.
En réalité, nous nous attendions à cette baisse de régime. Il faut tenir compte de la récolte exceptionnelle d’huile d’olive en 2018, et dont le retour à des niveaux normaux a coûté 9,6% à la valeur ajoutée de l’industrie agroalimentaire. Il y a également une moindre demande de la part de notre premier partenaire économique, l’Union Européenne. Elle est à l’origine du recul de la valeur ajoutée des secteurs des textiles, habillement & cuirs et des industries mécaniques & électriques, en baisse respective de 0,5% et 0,9%. De plus, les problèmes liés à l’industrie pétrolière, qui coûtent très cher au pays, ont persisté. Le faible rythme d’extraction de pétrole (38 100 barils par jours seulement) et du gaz naturel a causé une baisse de la valeur ajoutée de 10,8% sur le premier trimestre.
Est-ce que les choses vont changer d’ici la fin de l’année ?
Cependant, quelques signes d’amélioration de l’économie tunisienne sont déjà présents. D’abord, la croissance dans la zone euro s’accélère (0,4%) au premier trimestre 2019. Et ce, bien que le contexte soit déprimant avec le ralentissement des échanges mondiaux.
Ensuite, et à la veille de la saison touristique, les services d’hôtellerie et de restauration affichent une croissance de 7,2% durant le premier quart de l’année. La saison s’annonce donc bonne, ce qui promet une belle envolée des services marchands. Cela sans oublier que les services non marchands devraient afficher une bonne prestation grâce aux augmentations salariales encaissées au cours du second trimestre 2019.
Ceteris paribus, il y aura une meilleure croissance durant les prochains trimestres. Toutefois, atteindre l’objectif de 2,8% serait une mission ardue. Même pour le second quart, réitérer la performance de 2018 qui à titre de rappel était le meilleur trimestre durant les deux dernières années (2,9% de croissance en rythme annuel) serait quasiment impossible.
Ainsi, ce rythme de croissance de l’économie tunisienne est incapable de générer suffisamment d’emplois. C’est ce qui ressort des statistiques officielles. Le nombre de chômeurs pour le premier trimestre 2019 s’établit à 637 700. Soit un taux de chômage de 15.3% et une amélioration de 0,2% en rythme séquentiel. Le nombre des diplômés chômeurs de l’enseignement supérieur est estimé à 255 400. Soit un taux de chômage pour cette catégorie de 28,2% (28,8% en 2018).
Une spirale inflationniste quasi-incontrôlable
La morosité économique a eu pour résultante une légère décélération de l’inflation au mois d’avril, avant de repartir à la hausse le mois suivant. En mai 2019, les prix à la consommation progressaient de 0,5% sur un mois et 7% sur une année. C’était également attendu dans la mesure où l’accélération provenait essentiellement des prix de l’alimentation (+7,3% en rythme annuel) durant Ramadan : +26,6% pour les œufs, +15,8% pour les légumes frais, +10,4% pour les produits laitiers et 7,4% pour les viandes. De même, de hausse des carburants résulte une appréciation des prix du transport (+9,8%). Hors produits alimentaires et énergie, l’inflation recule à 6,7%.
Selon la BCT, « l’inflation devrait s’atténuer graduellement, tout en demeurant à des niveaux élevés ». Les récentes prévisions tablent sur un taux d’inflation moyen de 7% en 2019 et 6,7% en 2020. C’est très logique du moment que nous nous dirigeons vraisemblablement vers de nouvelles hausses des prix des carburants.
Dans son communiqué publié la semaine dernière, le FMI insistait sur ce point et sur la stratégie de communication à une population qui refuse une telle mesure. La hausse du taux directeur commence à donner son effet avec moins de ressources accordées par les banques (-150 millions de dinars dans l’encours de crédits des banques cotées). C’est la partie relativement contrôlable de l’inflation, mais la guerre contre celle importée bat encore son plein.