La « révolution » mit fin au despotisme et annonça l’institution de la démocratie, c’est-à-dire « le gouvernement du peuple, par le peuple, pour le peuple« , selon la définition d’Abraham Lincoln.
Disons plus exactement, que les rapports de force ont établi un pouvoir oligarchique où l’autorité est détenue par la troïka, qui a mis en œuvre une remise en question de l’Etat moderne national, conforté par les acquis du régime bourguibien.
On évoqua même l’institution éventuelle du sixième califat. Ne revenons pas sur les dérives antirépublicaines, dans ce contexte, engageant une stratégie de condamnation de certaines productions artistiques. La soft révolution de 2011 restaura la démocratie républicaine et établit, suite aux élections de 2014, la présidence du leader Béji Caid Essebsi et le régime de Nidaa Tounes.
De l’eau a coulé depuis lors. Les crises de Nidaa Tounes, l’émergence du parti gouvernemental Tahya Tounes et la promotion de la collaboration du chef du gouvernement avec Ennahdha. Peut-on parler de l’établissement d’une nouvelle oligarchie ?
L’élection présidentielle institue certes le pouvoir des urnes mais le « vendredi noir » met en péril la libre confrontation entre les concurrents. L’arrestation d’un candidat, lors de ce qui constitue de fait une « trêve » préélectorale, a été dénoncée par la presse qui jouait son rôle indispensable de « garde-fou » de la démocratie.
Ne soyons pas pessimiste : la Tunisie vit certes un mauvais quart d’heure. Mais la conscientisation des citoyens et la mise garde des acteurs politiques pourraient permettre d’assainir l’atmosphère et de faire une démarcation entre les enjeux politiques partisans et les valeurs démocratiques, dans leurs aspects fondamentaux politiques, judiciaires et civilisationnels…
On tournera certes rapidement la parenthèse antidémocratique. Mais ne perdons pas de vue que les électeurs en tireront les conséquences, réconciliant vote utile et vote sanction.