Dans une longue note, la BCT a donné une image mitigée sur la situation économique du pays. La banque a passé deux messages.
En effet, le premier message de la Banque centrale est qu’en dépit de signes de détente, les risques inflationnistes sont toujours là. Autrement dit, il est encore tôt de penser à une baisse des taux. Le deuxième est que l’appréciation du dinar est la conséquence de sa politique monétaire. Elle n’a rien à voir avec les enjeux politiques actuels.
Nos principaux partenaires ne sont pas en forme
Durant le deuxième trimestre 2019 (T2 19), les pays de la rive nord de la Méditerranée ont réalisé des performances modestes. Si le PIB a progressé de 0,2% en France, la croissance a été nulle en Italie et négative en Allemagne (-0,1% en rythme trimestriel). L’ensemble de la Zone Euro a également affiché un ralentissement de la production industrielle, en partie dû aux perturbations du commerce international. Néanmoins, le taux du chômage a reculé dans un contexte peu inflationniste. L’indice des prix à la consommation continue à évoluer au-dessous de 2%.
Dans ce contexte, les prix des matières premières et agricoles sont restés favorables pour un pays comme la Tunisie. Les produits énergétiques ont affiché une hausse de 3,4% au T2 19. Pour le pétrole, les cours sont sur une tendance baissière depuis le mois de juin.
Impact direct sur nos exportations
La morosité des économies européennes est reflétée dans notre balance commerciale. La BCT a donné des chiffres intéressants. Hors effet change et prix internationaux, les exportations en volume ont reculé de 3,8% contre une hausse de 7,1% l’année dernière. Tous les moteurs de l’exportation sont en manque de carburant : agriculture (-19,4%), mines et phosphates et dérivés (-7,7%), textile, habillement et chaussures (-3,8%) et industrie mécanique et électrique (-1,2%).
De même, hors effet prix, les importations en volume se sont contractées de 6,2% contre une hausse de 2,5% sur la même période en 2018, due en grande partie à la baisse de la demande de nos usines sur les matières premières.
La politique de la BCT commence à donner ses résultats
Le peu de croissance que nous avons réalisé au cours du T2 19 a été tirée par l’agriculture (contribution de 0,2%) et par les activités non marchandes (contribution de 0,1%). Les services d’intermédiation financière et les impôts nets de subventions ont également apporté 0,13%. Les services marchands ont affiché un trimestre blanc alors que l’industrie manufacturière a tiré la croissance vers le bas (contribution négative de -0,1%). Les tensions sociales ont pesé sur les performances des secteurs minier et énergétique.
Mais un point positif est à souligner. L’inflation continue son recul à 6,5% fin juillet 2019. Et ce en dépit de la persistance de la tendance haussière des prix des produits alimentaires (+6,5% par rapport à juin 2019).
En moyenne, l’indice des prix à la consommation s’est établi à 6,9% contre 7,2% au cours de la même période de l’année précédente. La BCT s’est félicitée de cette performance achevée grâce à sa politique monétaire restrictive. Elle est également soutenue par l’évolution des différentes composantes de la chaîne des prix. L’indice des prix de vente industrielle est passé à 5,5% en juin 2019 contre 6,8% au mois de mai. De même, les prix à l’importation ont décéléré à 17,4% en juillet 2019 contre 20,9% au mois de juin.
Toutefois, la BCT a insisté sur le fait que cette inflation n’est pas facile à éliminer. La partie sous-jacente reste encore à des niveaux élevés (7,3% pour l’inflation hors produits alimentaires frais et produits à prix administrés).
La politique monétaire de la Banque centrale a été également ressentie au niveau des activités des banques. Le mois de juin a enregistré une hausse des dépôts à vue et des dépôts à terme des banques de 4,2% et 3,7%. Les crédits à l’économie ont reculé de 5,8% par rapport à juin 2018 grâce à une moindre demande de la part des particuliers (+1,3% en juin 2019 contre +8,2% en juin 2018) et des professionnels (+7,9% en juin 2019 contre +14,1 % en juin 2018). Ainsi, les besoins des banques en liquidité ont baissé de 585 millions de dinars au cours du mois de juillet.
Les réserves en devises à un niveau satisfaisant
Les réserves en devises se sont élevées, au 29 août 2019, à 6,092 milliards de dollars. C’est l’équivalent de 98 jours d’importations. Cela est dû à la bonne tenue des recettes touristiques qui ont atteint, fin juillet, 829 millions d’euros, soit une hausse de 32,6%. De plus, les transferts effectués par la diaspora ont totalisé 754,6 millions d’euros depuis le début de l’année. Ces performances ont limité l’impact de la dégradation de la balance commerciale. Elles ont contribué à l’appréciation du dinar de 8,1% et de 4,5% vis-à-vis de l’euro et du dollar, respectivement.
Une détente progressive
La Banque centrale table sur un taux d’inflation de 6,9% pour 2019, 6,5% pour 2020 et 5,9% en 2021. L’inflation sous-jacente resterait à des niveaux élevés de 7,6% pour 2019 et 7,3% et 6,8% pour les deux années suivantes.
Tous ces éléments font que la Banque centrale ne pense pas à un rétablissement imminent des équilibres macroéconomiques globaux. Autrement dit, elle va de nouveaux utiliser son outil taux en cas de nouvelle dégradation.