Ma première rencontre avec une toile de Makhach Magomedov, je m’en souviens encore!
Ce n’était pas dans une galerie d’art ou lors d’une exposition. C’était à la maison, lorsque ma mère émerveillée par le peinture russe lui avait acheté certaines de ses toiles.Depuis, chaque matin j’auscultais attentivement ses tableaux en essayant de percer leurs secrets et la formule magique de sa palette de couleurs.
Makhach Magomedov est un orientaliste aux touches impressionnistes. Il sublime la Tunisie et la rend éternelle avec ses couleurs vivaces et son jeu savant de clair obscur;
Il saisit la lumière pour nous la rendre par ses mélanges captivants et avisés. Depuis la rencontre de ses tableaux est née l’envie d’interviewer Makhach Magomedov, le magicien des couleurs .
Makhach Magomedov, pouvez vous nous dire quand est ce que vous êtes venu en Tunisie et dans quelles circonstances ?
En Russie, j’ai fait des études de peinture à la Faculté des Beaux-arts auprès de l’Université Pédagogique de Makhatchkala. Parallèlement, je jouais au volley-ball et dans les années 90, j’ai été sélectionné dans l’équipe nationale du Daguestan .
Je suis arrivé en Tunisie, la première fois en 1992 ; j’ai obtenu un contrat avec l’équipe de volleyball de la Saadiya. Entre 1992 et 1994, j’ai effectué des séjours fréquents en Tunisie pour y réaliser des études.
En effet, a ce moment là je faisais surtout des aquarelles de Sidi Bou Said car elles nécessitent moins de matériel.
En 1997, j’ai arrêté de faire des aquarelles et me suis tourné à la peinture à l’huile à cause des reproductions.
Un an plus tard, j’ai fondé au centre culturel russe une école de peinture qui a duré 10ans. Pendant cette période j’ai organisé deux expositions personnelles à Sidi Bou Said.
Aujourd’hui,quels sont les sujets que vous peignez?
En allant au festival de Douz, j’ai été sublimé par le contraste qui existe dans le sud entre les couleurs du ciel et du sable et celles des costumes des cavaliers et des chevaux.Depuis , j’ai rajouté ce thème à celui de Sidi Bou Said.
Aujourd’hui, je peins aussi les paysages de Tabarka, Hammamet et la marina de Bizerte . C’est Des sujets intéressants qui nécessitent de grandes toiles et une plus grande maîtrise.
Pourquoi, avez-vous choisi de rester en Tunisie ?
La luminosité en Tunisie est différente. Au Caucase la région dont je suis originaire, il ya moins de contraste entre la couleur du ciel et le gris des montagnes.
Moi, je préfère peindre des sujets avec un grand contraste comme à Douz où le Jaune du sable ressort avec les habits rouges de cavaliers. D’ailleurs, le festival de Douz est un événement extraordinaire pour le peintre que je suis ;
Comment a évolué votre peinture depuis vos débuts ?
Au début de ma carrière , je prenais un seul sujet comme les portes de Sidi Bou said avec les bougainvilliers. Au fur et à mesure j’ai agrandi mes toiles et aujourd’hui dans une même toile je traite 2 ou 3 sujets. Une grande toile nécessite plus de technique et de détail et la moindre faute est plus difficile à rectifier. Elles demandent plus de travail aussi,
Vous êtes professeur de peinture, qu’est ce qu’il faudrait rectifier d’après vous dans l’enseignement de la peinture actuellement en Tunisie?
En Russie, nous étudions pendant plusieurs années les bases du dessin avant de commencer à toucher un pinceau. En Tunisie, ce n’est pas le cas.
Tous mes élèves veulent apprendre à peindre dès les premières séances.
Mais savez-vous ? Tous les peintres connus, comme Picasso ou même les impressionnistes. Ils sont passés par un enseignement académique du dessin et de la peinture avant de développer leur propre style. Car sans maîtrise du dessin, le peintre en herbe se limitera à faire des copies.
Et vous, comment avez-vous développé votre propre style?
A l’université j’ai reçu les bases et la méthode pendant 3 ans. Ensuite, les professeurs nous ont poussé à trouver notre palette de couleurs. Mais la palette change avec le pays où on est. Par exemple, l’orientaliste Etienne Dinet a complètement changé de couleurs en Algérie. Moi aussi j’ai changé ma palette de couleurs en Tunisie car la luminosité y est différente.
Quels sont les peintres qui vous ont le plus inspiré?
J’ai plus étudié la technique de Roubtzoff et des classiques en Russie.Mais, Roubtzoff n’a jamais peint le sud ou les marinas en Tunisie. De plus, ses couleurs sont moins chaudes. L’autre orientaliste qui m’a inspiré, c’est Nasreddine Dinet qui a vécu en Algérie.
Où peut-on voir vos peintures?
Aujourd’hui, j’expose dans deux endroits différents: dans mon atelier au centre ville (148,avenue de la liberté) et à l’entrée de la Marsa à côté du Dokken( en face du stade Abdelaziz Chtioui) .
Au centre ville, je suis en train de créer une mini galerie permanente où l’entrée est libre pour tous.Fin septembre, je compte aussi organiser une exposition au café journal de la Marsa.
Enfin, j’ai aussi le projet d’organiser une exposition itinérante entre la Tunisie, la Russie, l’Algérie et la France et faire connaître la beauté de la Tunisie à l’étranger.