L’OCDE lancera, le 09 octobre, sa proposition de réforme de la fiscalité des multinationales d’ici 2020. Et ce, dans son nouveau rapport intitulé « ICRICT ».
Ainsi, ce rapport évalue les pistes de l’OCDE. Notamment en matière d’imposition des multinationales. Il appelle à une réforme optant pour l’imposition unitaire. Et ce, avec une répartition qui se base sur des facteurs objectifs et un taux effectif minimum d’imposition de 25%.
Régime de fiscalité internationale défaillant
Car, le système de fiscalité internationale se fonde sur une fiction. Il considère les filiales des multinationales comme des entités indépendantes les unes des autres. Cela encourage les multinationales à créer des structures complexes d’évasion fiscale. Tout en créant des centaines de filiales dans des pays fiscalement accommodants.
Ainsi, ces montages sont simples d’un point de vue conceptuel. De ce fait, les multinationales déclarent de faibles bénéfices dans les juridictions à fiscalité élevée. Soit des pays développés ou en développement. Grâce par exemple à l’utilisation de structures à risques limités, endettement excessif et déductions liées à l’usage d’actifs intangibles…
Ce système permet aux multinationales de transférer légalement leurs bénéfices dans des juridictions ou des paradis fiscaux à faible taux d’imposition. Et, par conséquent, de ne payer presque aucun impôt.
Impact sur les perspectives de développement durable
En effet, lorsque les entreprises mondiales et les super-riches se dérobent à leurs responsabilités fiscales; ce sont les pays et les populations les plus pauvres qui y perdent le plus. Il reste aux gouvernements la possibilité de réduire les dépenses essentielles nécessaires. Et ce, pour lutter contre les inégalités, la pauvreté et les changements climatiques. Ou pour combler le déficit en augmentant les taxes telles que la TVA. Cette dernière frappe plus durement les citoyens ordinaires.
En outre, l’impact de l’évitement de l’impôt sur les sociétés est encore plus fort pour les pays en développement. Puisqu’ils sont plus dépendants de l’impôt sur les sociétés que les pays développés. Cet impôt représente 15% des recettes fiscales totales en Afrique et en Amérique latine. Et ce, contre 9% dans les pays de l’OCDE.
Il ne faut pas séparer les bénéfices « de routine » des « résiduels »
L’OCDE propose donc une nouvelle approche pour la répartition des revenus des multinationales. Cette approche maintiendrait le système fiscal international en place pour la plupart des bénéfices, dits « de routine ». Et ce, en n’allouant qu’une fraction des bénéfices globaux restants des multinationales dits « résiduels » au moyen d’une formule.
Ainsi, les entreprises pourraient continuer à déclarer leurs bénéfices. Ou bien, pour la plupart de leurs activités, la redistribution d’une partie de l’impôt, soit au maximum 20%. A cet effet, le rapport rejette l’approche consistant à séparer les bénéfices « résiduels » des bénéfices « courants » d’une multinationale. Car, en pratique, il n’est pas possible de les distinguer.
Mettre en place une répartition équitable des droits d’imposition
Choisir d’attribuer les droits d’imposition en fonction des seules ventes, comme l’OCDE l’envisage, désavantagerait les pays dont les marchés intérieurs sont relativement petits. Ou ceux dont les exportations sont importantes. En particulier les ressources naturelles et le tourisme.
Comme les pays riches consomment davantage, la répartition des bénéfices en fonction des ventes est susceptible d’entraîner une répartition inéquitable entre les pays. Comme le montre une étude récente sur la redistribution des droits fiscaux.
Si les propositions de l’OCDE concernant la séparation entre bénéfices « résiduels » des bénéfices « courants » étaient acceptées, les multinationales pourraient continuer à déclarer leurs bénéfices où elles le souhaitent, ne permettant qu’une faible part de l’impôt à redistribuer. Les pays riches se verraient attribuer plus de bénéfices. Et donc plus d’impôts.
OCDE : avoir un impôt minimum mondial effectif élevé
A cet égard, l’OCDE soutient la proposition d’une taxe mondiale contre l’érosion de l’assiette fiscale. Elle est préoccupée par la probabilité qu’un faible taux d’impôt minimum devienne la référence internationale. Une référence qui incite effectivement à une course au moins-disant.
Certains pays en développement craignent qu’en abandonnant l’arme des incitations fiscales, ils ne puissent plus attirer les entreprises. Pourtant, si la communauté internationale se mettait d’accord sur un taux suffisamment élevé, cela mettrait fin à la course. Dont les seuls gagnants sont les multinationales. Cette mesure supprimerait la raison d’être des paradis fiscaux. Tout en garantissant à tous les États l’accès à ces ressources essentielles au développement.
Cet impôt minimum global effectif devrait, selon l’Organisation, être fixé à un taux minimum convenu de 25%. Ce taux est déterminé par le taux moyen d’imposition des sociétés en vigueur dans les pays du G7.
Dans ce sens, José Antonio Ocampo, président de l’ICRICT, a déclaré: « Le processus de réforme actuel est un premier pas dans la bonne direction. Mais il reste encore beaucoup à faire. Et il devrait être jugé en fonction de sa capacité à aboutir à un système plus simple, plus facile à administrer, plus efficace et plus équitable. »
Notons que la Commission indépendante pour la réforme de l’impôt international sur les sociétés (ICRICT) vise à promouvoir une discussion plus large et plus inclusive dans le domaine des règles fiscales internationales. De même, elle vise à considérer les réformes fiscales selon une perspective servant l’intérêt public plutôt que les avantages nationaux. Ainsi qu’à œuvrer en faveur de solutions fiscales justes, efficaces, durables et favorables au développement.