Le dossier des entreprises publiques est l’un des rares sujets économiques qui font l’unanimité en Tunisie.
En effet, tout le monde est convaincu qu’il s’agit d’un vrai fardeau qui empêche le pays d’avancer. Aucune société, parmi les entreprises de transport, n’est en situation d’équilibre. Elles sont toutes sous perfusion, survivant grâce au soutien de l’Etat.
Un puits sans fond
Les comptes de la compagnie aérienne porte-drapeau pour 2017 et 2018 ne sont pas encore connus. Ceci traduit les grandes difficultés que traverse cette entreprise cotée à la Bourse de Tunis. Jusqu’à fin 2016, les pertes cumulées s’élèvent à 671,530 millions de dinars.
Dans le cas de Tunisair, la société a besoin d’une augmentation de capital essentiellement en cash, plutôt qu’autres mécanismes qui ne sont que des écritures comptables. La liquidité lui permettra d’améliorer significativement sa compétitivité et d’exploiter les compétences techniques et humaines qu’elle détient.
Plusieurs compagnies étrangères ont profité de l’incapacité de la compagnie à satisfaire la demande par manque d’appareils notamment durant l’été. Et ce pour exploiter certaines destinations rentables.
La situation n’est pas meilleure pour Compagnie Tunisienne de Navigation, bien que n’ayons pas d’idées précises sur l’ordre de grandeur de son déficit.
Pour le transport terrestre, les pertes de la TRANSTU ont dépassé les 914 milliards de dinars en 2016! Cela sans oublier les déboires des sociétés régionales. La STS a cumulé, jusqu’à 2017, 18,565 millions de dinars de pertes.
La Société Régionale du Transport de Sfax a encore des pertes plus importantes. Quant à la Société Nationale de Transport Interurbain (SNTRI), elle a laissé des plumes avec des résultats négatifs de 45 millions de dinars.
Pour la SNCFT, le dernier chiffre connu remonte à 2017 : 220 millions de dinars de pertes depuis la révolution.
Toutes ces entreprises bénéficieront également de l’appui de l’Etat qui a programmé des subventions de 500 millions de dinars dans le budget de 2020.
Reste enfin à préciser que les impayés de l’OACA, de la CTN et l’OMMP dépassent le un milliard de dinars selon le Président du Haut Comité du Contrôle Administratif et Financier en février dernier, Kamel Ayadi.
Une approche pratique
Inutile aujourd’hui de rediscuter des solutions genre réduction de l’effectif ou privatisation. Bien qu’elles soient économiquement les plus rationnelles, ces deux propositions n’ont aucune chance d’être mises en œuvre en Tunisie. Les syndicats ne permettront pas le départ d’un seul agent. Aucun investisseur privé ne mettra un sou dans des machines à perte. Le meilleur exemple est Tunisair qui n’a pas pu se séparer d’une partie de son sureffectif, même avec la collaboration des syndicats, en raison du coût financier d’une telle procédure.
Le début du sauvetage se fera par une refonte totale des méthodes de fonctionnement et des investissements en systèmes d’information, de sorte à obtenir des administrations modernes.
Une nouvelle répartition des rôles permettrait d’optimiser l’utilisation du personnel. Ce personnel doit bénéficier de formations spécifiques et de nouvelles techniques de motivation et de rémunération, afin de le motiver et d’améliorer sa productivité. L’achèvement d’un tel plan permettrait d’ouvrir le tour de table à des investisseurs étrangers ou la cession de certaines activités.
Du point de vue pratique, c’est plus facile d’appliquer de telles recettes à Tunisair ou la CTN. Il suffit d’avoir plus d’avions ou de navires pour doper les chiffres. Leurs activités internationales est un facteur de croissance.
Pour la TRANSTU, elle peut avoir plus de moyens. Mais la qualité des infrastructures routières empêchent d’optimiser leur utilisation. Même le comportement des voyageurs, qui ne paient pas leurs tickets, limite le potentiel d’amélioration des comptes des entreprises de transport terrestre.
Ce qui est sûr, c’est que quels que soient les plans de redressement des entreprises de transport, le point de départ est toujours le même: injecter du capital. D’où proviendra-t-il? C’est à la nouvelle équipe gouvernementale de trouver des sources (PPP par exemple) bien qu’il s’agisse de milliards de dinars.