Situation paradoxale, Ennahdha délaissa son propre candidat, pour soutenir Kaïs Saïed. Et ce, dés le premier tour des élections présidentielles. Elle confirma son choix, durant le second, assurant sa victoire. Elle espérait être payée en retour.
Cependant, élu triomphalement, Kaïs Saïed souhaitait d’une part rappeler son statut d’indépendance et rester fidèle à la mouvance de la jeunesse, son soutien principal de départ. D’autre part, fut-il plutôt attaché à l’esprit de la révolution, il ne partage pas les mêmes référence, avec l’Islam politique. Ses déclarations affirment incontestablement son adhésion au nationalisme arabe. La prise de distance était donc à l’ordre du jour. Elle devait s’inscrire dans les faits dés la première semaine.
Ennahdha estimait à juste titre, qu’elle était appelée à désigner le chef du gouvernement, vu sa victoire parlementaire. En effet, elle commença ses tractations, se concertant avec les différents partis, à l’exception de Qalb Tounes et du Parti Destourien Libre (PDL). Entre la quête d’un oiseau rare, l’affirmation de sa décision de choisir le chef du gouvernement, en son sein et la rumeur sur la désignation d’une compétence, hors des partis, Ennahdha poursuivait son jeu de Poker, dans le cadre des mutations idéologiques, qu’elle annonce régulièrement.
Un gouvernement de compétences?
Recevant les différents partis, transgressant l’ostracisme de Ennahdha contre Qalb Tounes et le Parti Destourien Libre, le président consultait ses interlocuteurs sur le programme de redressement économique, qu’exigeait la situation. Il souhaitait, semblait-il un gouvernement de compétences, évitant le partage partisan des charges gouvernementales. Or, Ennahdha estime qu’il lui revient de définir la physionomie du gouvernement et que la présidence n’a pas voix au chapitre.
L’opinion publique rejoint plutôt la vision du président. Elle serait favorable à un gouvernement d’union nationale, formée de compétences. D’ailleurs la plupart des partis partagent cette vision. Echaâb, Tayar et Qalb Tounes affirment d’ailleurs, leur hostilité à un chef de gouvernement, issu d’Ennahdha. Des observateurs rappellent ce dicton politique: « Ce n’est pas avec ceux qui ont créé les problèmes qu’il faut espérer les résoudre » (Albert Einstein, 1963).
Alors, si la crise économique et sociale de la Tunisie a plongé les Tunisiens dans le désespoir et l’amertume. Toutefois, le rêve d’une Tunisie meilleure et démocratique est toujours présent parmi nous. Le président partagerait cet optimisme. Réussirait-il le rééquilibrage politique qu’exige l’unité nationale?