En Algérie, les signes du destin ne trompent pas. L’homme fort du régime, le chef d’état-major de l’armée, le Général Ahmed Gaïd-Salah, est décédé. Et ce, peu après l’entrée en fonction du nouveau président « élu », qu’il a lui-même choisi. La vitrine est nue : derrière la façade présidentielle incarnée par Abdelmadjid Tebboune, le régime vacille sous la force du mouvement populaire porté par le « Hirak ».
Un contexte chaotique qui questionne l’Algérie post Gaïd-Salah et l’avenir du Hirak. La force et la soudaineté de ce mouvement populaire ont surpris les observateurs et les hommes forts du régime. Pourtant les signaux attestant d’une colère sourde ne manquaient pas.
Dès la fin 2010, dans la foulée du peuple tunisien, la jeunesse algérienne s’était révoltée. Et ce, à travers des émeutes urbaines ponctuées par une série d’immolations qui avaient alors saisi le pays.
Aujourd’hui, les manifestations se succèdent chaque vendredi. Elles réunissent plusieurs dizaines de milliers d’Algériens. Elles expriment un rejet du fatalisme et l’espoir d’une Algérie nouvelle du désarroi à travers des manifestations pacifiques.
Une mobilisation populaire et pacifique qui continue d’animer les grandes villes du pays. Elle est nourrie par des racines profondes de nature politique, démographique, socio-économique et sociétale.
En effet, la corruption et le chômage structurels ont pour principale victime: une jeunesse algérienne désespérée par un système incapable de fructifier les richesses tirées de la rente pétrolière.
Une élection-fiction du président Tebboune
C’est ce système opaque responsable de la défaillance économique et sociale du pays, confronté au fléau de la corruption. Celle-ci mine l’administration comme l’ensemble du tissu économique et social, qui a choisi le nom du nouveau président.
Porté par un scrutin démocratique discutable précédé d’une pseudo campagne électorale, Abdelmadjid Tebboune (l’ancien premier ministre d’Abdelaziz Bouteflika), a été « élu » dès le premier tour avec 58% des voix grâce à un taux de participation officielle de 39,9%, lui-même largement sujet à caution.
Succédant à une série de procès condamnant pour corruption d’anciens hiérarques du régime, cette élection-fiction ne saurait faire illusion. Derrière la capacité du régime à imposer son candidat, le contre-pouvoir populaire n’a jamais été dans une telle position de force en Algérie.
D’un côté, le Hirak ne baisse pas en intensité: la démobilisation populaire n’est toujours pas à l’ordre du jour, au contraire. De l’autre, après une longue période de déni(grement), le système semble envisager une sorte de compromis avec le Hirak.
La voie d’une transition politique se dessine. Mais rien n’est moins sûr le régime peut très bien, dans une forme d’instinct de survie, choisir la pire des options, celle de la confrontation et de la répression radicale… Les Algériens méritent mieux que sombre scénario.
Si la situation politique est bloquée, la « question algérienne » ne concerne pas que les Algériens. Car, c’est la stabilité de la région de l’Afrique du Nord et subsaharienne qui se joue en partie. Et ce, à travers l’avenir d’un pays central, y compris pour le présent et l’avenir de la Tunisie…