La Conférence de Berlin sur la paix en Libye s’est tenue, dimanche 19 janvier, sous l’égide de l’ONU.
Ainsi, la Conférence de Berlin a réuni les grands acteurs internationaux, plus ou moins impliqués dans la crise. A savoir, les USA, la Russie, la France, l’Italie, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Turquie, l’Arabie Saoudite, les Emirats et l’Egypte.
L’Algérie et le Congo, représentant le voisinage, jouaient, dans cette instance, le rôle de comparses. Le Maroc a été oublié, alors que la Tunisie a été l’invitée de dernière minute, après sa protestation. Ce qui explique son refus d’accepter de faire de la figuration. Et ce pour l’achèvement des préparatifs et la rédaction de la motion finale.
Pour Ghassan Salamé, ce sont les pays qui interviennent en Libye- soit militairement soit en usant de leur influence auprès des parties libyennes- qui doivent revenir à davantage de neutralité. Ce qui permettrait d’aider les Libyens à sortir de l’impasse.
Les protagonistes libyens Fayez el-Sarraj et Khalifa Haftar ont été invités à la conférence. Mais les deux dirigeants n’ont pas siégé avec les autres délégations dans la même salle. Mais sans doute dans des pièces séparées dans la chancellerie. D’ailleurs, ils n’ont pas assisté à la séance d’ouverture et à la conférence de presse de clôture.
Unifier la position internationale
Et dans le discours des organisateurs, l’objectif principal de la Conférence de Berlin, selon Ghassen Salamé, est d’unifier la position internationale. Notamment celle des membres permanents du Conseil de sécurité sur la Libye.
Salamé a précisé que depuis le début de la « guerre de Tripoli », en avril dernier, le Conseil de sécurité s’est réuni 14 fois sur la question libyenne. Et ce, sans prendre la moindre décision, même pas un appel de la présidence du Conseil pour un cessez-le-feu« .
Il s’agit, donc, de réunir ces parties sous un autre toit et d’essayer d’unir leurs positions pour espérer trouver une solution. Il a rappelé également que la conférence est l’unique chance sérieuse pour rétablir la paix en Libye. Alors que la guerre se poursuit depuis avril dernier avec des dizaines de milliers de victimes civiles, entre morts, blessés et déplacés.
Le choix de l’Allemagne n’est certes pas fortuit, dans la mesure où elle agit au nom de l’Union européenne. Laquelle souhaite s’impliquer davantage dans la crise libyenne, vu ses riches gisements de pétrole. Et les intérêts que représente sa future reconstruction.
L’Union européenne n’admet plus d’être éclipsée de la scène libyenne: « Tu ne dois pas être végétarien dans un monde carnivore. » Ainsi explique le journal français Le Monde cette affirmation des intérêts européens. Fait évident, le rôle de la Libye pour les flux migratoires explique aussi l’intérêt de Berlin ces dernières années pour ce pays.
Les décisions finales
Au terme de la réunion, Angela Merkel a voulu saluer « une nouvelle impulsion ». Les participants, a-t-elle indiqué, sont tombés d’accord pour réclamer « un cessez-le-feu permanent » et renforcer l’embargo sur les armes.
Selon le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, ils ont promis de renoncer à toute « interférence » étrangère dans le conflit. « Tous les participants souhaitent une solution politique au conflit », a conclu la chancelière. Il s’agit évidemment de vœux pieux.
Ghassen Salamé a affirmé que la conférence « sera une partie de tout un processus et qu’il y aura un comité de suivi de ses recommandations sur le terrain ». Mais comment surveiller les ravitaillements en armes des alliés des protagonistes?
C’est l’annonce du soutien militaire turc au gouvernement de Tripoli qui a provoqué l’escalade. Selon l’Observatoire syrien des droits de l’Homme, 3 660 Syriens sont déjà dans le pays pour soutenir Fayez el-Sarraj, le chef du gouvernement de Tripoli. Des munitions et des véhicules blindés turcs ont également été livrés.
Une batterie très développée de défense antiaérienne aurait été installée par les Turcs à l’aéroport de Metiga à Tripoli. D’ailleurs, la demande du président français Macron à la Turquie, lors de la séance d’ouverture, d’arrêter l’envoi de mercenaires syriens a suscité le mécontentement du président Erdogan, bien décidé à s’investir en Libye. Il aurait quitté la conférence.
Intérêts respectifs
Fait significatif, il n’y a toujours pas de dialogue sérieux entre les belligérants. D’ailleurs, ils ont été invités comme simples exécutants de la volonté des acteurs internationaux. La Conférence de Berlin rappellerait-elle le congrès de Berlin de 1878, où Bismark avait offert la Tunisie à la France? Cette opinion d’un observateur est certes excessive. Mais elle traduit bel et bien la prise en compte des acteurs internationaux de leurs intérêts respectifs.
La conférence de Berlin est appelée à présenter ses décisions au Conseil de sécurité, en vue de sa ratification. Pouvait-elle annihiler les rapports de force sur le terrain?
Le maréchal Haftar domine 87 % du terrain. D’autre part, ayant décidé d’occuper des terminaux pétroliers dans l’est du pays, il dispose d’un important moyen de pression.
La production pétrolière est maintenant à l’arrêt, les exportations sont bloquées. Signe de la faiblesse du gouvernement de Tripoli, il a demandé, en marge de la conférence, une protection militaire internationale de la région qu’il domine.
Le pouvoir de Tripoli pourrait-il d’ailleurs survivre au déclin de l’islam politique dans la région?