« Quels sont les enjeux politiques et économiques de la situation en Libye et de son impact sur la Tunisie ? ». Tel est le thème du débat organisé par Alumni IHEC à l’Institut arabe des Chefs d’Entreprise. La rencontre portait essentiellement sur la crise libyenne et ses impacts sur Tunisie.
A cet égard, Marouane El Abassi, gouverneur de la Banque centrale de Tunisie (BCT) revient sur la question libyenne. La situation en Libye est selon lui une question essentielle. Il précise dans ce contexte: « Je suis convaincu que les peuples tunisien et libyen sont un seul peuple. Notamment pour les liens étroits qui les réunissent (histoire, culture…) ».
Puis, revenant sur le nombre de Libyens en Tunisie, il précise: « C’est un chiffre exagéré que de parler de ressortissants libyens dépassants le million d’individus » Ainsi, il rappelle qu’à travers des études de l’INS, le nombre de Libyens recensé en février 2016 s’élevait à seulement 20 000 résidents en Tunisie !
Par ailleurs, le premier volet du débat a porté sur le rapprochement entre la Tunisie et la Libye. Lequel se renforce plus que jamais au fil des ans. Cependant, il faut désormais trouver des solutions pour attirer davantage les investissements tunisiens et libyens dans les deux sens.
Les Tunisiens ne savent pas saisir le moment opportun!
En outre, le gouverneur de la BCT précise dans ce contexte: « Je suis convaincu que les Tunisiens n’ont pas su saisir le moment opportun pour attirer les investisseurs libyens en Tunisie. Et ce n’est pas la faute des Libyens… »
Tout comme il a également rappelé que les relations avec la Libye doivent être renforcées, comme elle l’était bien avant 2010.
Pour le gouverneur de la BCT, il est important de mettre l’accent sur les efforts de reconstruction de la Libye. Et bien évidemment sur le rôle de la Tunisie, tant via les pouvoirs publics que par la présence de son secteur privé pour qu’elle y soit un acteur de premier plan.
Quant à l’impact économique, il est très important notamment en matière d’investissement. De ce fait, Marouane El Abassi insiste sur l’importance de la reconstruction de la Libye. Car, la situation en Libye inquiète les opérateurs économiques tunisiens, notamment du fait qu’ils ne sont pas présents sur place. Un constat partagé par les présents aussi bien analystes que hommes d’affaires : la prise de risque des tunisiens dans le marché libyen reste très minime. Pourtant, des belles opportunités existent !
De son côté, Tayeb Bayahi, président de l’IACE, revient sur les enjeux géopolitiques. Il met l’accent sur la présence des puissances mondiales comme les Etats-Unis, l’Allemagne… « Chacun veut sa part du gâteau », alors que le premier concerné n’est autre que le peuple libyen, déclare-t-il.
« La Libye pourrait être la nouvelle Chine de l’Afrique du Nord »
Pour Ghazi Moalla, expert en affaires libyennes: « La Libye pourrait être la nouvelle Chine de l’Afrique du Nord, s’il y avait un climat favorable où la sécurité règne ». Et d’ajouter: « La Libye représente pour la Tunisie un enjeu très important. »
Rappelons que selon les données, avant 2010, la réduction des envois de fonds des travailleurs tunisiens en Libye s’élève à 1,4%.
Et si on parlait de chiffres
En effet, en termes de chiffres, en 2019, « les échanges commerciaux entre la Tunisie et la Libye s’élèvent à 1.7 milliard de dinars. Il s’agit d’un chiffre en baisse par rapport à 2017 et 2018 », rappelle le gouverneur de la BCT. Car, « en 2010, la Libye était le deuxième partenaire commercial après l’UE ».
Avant 2010: 150 000 Tunisiens travaillaient en Libye
Par ailleurs, il fait également savoir que 150 000 Tunisiens travaillaient en Libye. Il faut voir ce chiffre dans sa globalité, en termes de transferts de revenus du travail et des emplois directs et indirects.
Et de conclure: « Il faut que les entreprises tunisiennes voient la Libye comme opportunité économique. »
Quelle conclusion peut-on tirer? Hamadi Abid, investisseur tunisien en Libye témoigne que « si le niveau sécuritaire d’aujourd’hui opère, on peut certes travailler et investir. Or à Tripoli, il n’est pas difficile de travailler contrairement à la situation à Ben Ghazi ».
Au final, les intervenants se sont mis d’accord sur la nécessité d’un retour d’investissement accompagné d’une situation sécuritaire stable dans ce pays voisin.