Pour le malheur des Tunisiens, et au vu de ce que les urnes ont donné, entre le président de la République et le président du Parlement, c’est vraiment l’amour vache.
En effet, on est loin des effusions de sentiments. Et tout le monde voit bien que les deux centres du pouvoir se détestent cordialement. D’ailleurs, lorsqu’on fait mine de s’embrasser, c’est bien pour sauver les apparences. Et à ce jeu, c’est le favori des Tunisiens (dans les sondages) qui est en passe de l’emporter sur l’homme le plus détesté du pays. Finalement, un gouvernement du président? On y est presque… Est-ce la chute annoncée du faucon nahdhaoui? Cela dit, on dit toujours qu’il vaut mieux un semblant de crédibilité que pas de crédibilité du tout. Pas très moral, je sais…
Par ailleurs, il y a de ces réputations qui, aussitôt installées, finissent très vite par disparaître. Quitte à réapparaître quand les circonstances l’imposent. Après Karoui, le défenseur des pauvres gens. Voici Nabil le tombeur de ces sectaires sans foi ni loi et sauveur de la République. L’ami de Silvio Berlusconi et de Tarek Ben Ammar mérite-t-il tous ces éloges; même si chacun sait qu’ils peuvent être fugaces?
Qu’il soit touché par la grâce ou frappé du sceau de l’infamie, le co-patron de Nessma n’en finit pas de surprendre tout son monde. Vilains petits calculs ou réelle volonté de réconciliation avec ceux qui lui ont fait confiance?
En tout cas, ses adversaires, comme hypnotisés, n’arrêtent pas de louer sa contribution décisive au revers de l’allié d’hier, devenu soudain l’homme à abattre. Curieux retournement, même s’il n’est pas le premier. Après le séisme de l’ARP, le temps des vraies ruptures et des vrais choix?
La citadelle islamiste finira-t-elle par tomber?
Le cynisme est le propre des fanatiques dit-on. Et cyniques depuis le début, les Nahdhaouis n’ont pas cessé de l’être. Normal qu’ils n’aient jamais rien avoué, rien reconnu, tout en restant obstinément dans le déni total et absolu.
Normal que les Tunisiens soient au bord de la crise de nerfs et prêts à exploser à tout moment.
Tout aussi prévisible que dans le camp des « justes », on cafouille et on tremble à l’idée d’être rattrapés par un mauvais temps qu’on a soi-même provoqué. Assiégée, la citadelle islamiste finira-t-elle par tomber?
En s’y attelant, ceux qui, durant toutes ces années, sont allés à Montplaisir comme on va au pèlerinage pour recevoir l’absolution du Grand Manitou, se sont-ils découverts eux aussi des vertus messianiques, comme par enchantement? Veulent-ils nous dire, sans vraiment nous convaincre, que c’est maintenant ou jamais? Et le président de la République dans tout cela? La crise aiguë qui traverse la Libye voisine, n’est-elle pas une occasion pour se remettre en selle? Alors que sa crédibilité n’a jamais été autant mise en doute?
La diplomatie, quand on en fait bon usage, n’a-t-elle pas toujours été pour un chef d’Etat en difficulté sur le plan interne, une opportunité pour remonter dans l’estime des gens; en chatouillant leur fierté nationale? Même si les grands desseins et les grandes manœuvres sont toujours en attente?
Alors, dissoudre l’Assemblée pour résoudre. Et convoquer de nouveau les Tunisiens pour qu’ils disent leur mot, ne serait-il pas mieux indiqué que toutes ces gesticulations pour trouver une personnalité qui arrangerait tout le monde?
Cela étant, quel serait le mieux pour Ennahdha? Se résoudre à manger du Turc, ou continuer à manger un pain de plus en plus noir? Il y a de ces trahisons salvatrices…