La Tunisie vit les méandres de la politique. Elle subit les interventions contradictoires et difficilement conciliables entre les grands acteurs politiques. Dernier exemple en date: le désistement et l’opposition d’Ennahdha. Celui-ci voulant affirmer son autorité sur le chef du gouvernement désigné.
Ainsi, la cause évoquée est son attachement à un gouvernement d’union nationale, pour élargir sa base parlementaire. Puis, contournant le risque de dissolution du Parlement– décision prévue par la Constitution- Ennahdha souhaitait soumettre le gouvernement de gestion des affaires à un vote d’appréciation. En vue de le démettre et nommer un nouveau chef de gouvernement.
Alors, la réaction du Président de la République fut immédiate. Il rejeta cette manœuvre et annonça sa décision de dissoudre le Parlement en cas de rejet du gouvernement Fakhfakh. La leçon constitutionnelle qu’il présenta aux protagonistes fit valoir la dissolution du Parlement, comme l’épée de Damoclès suspendue au dessus des têtes des différents partis et députés. Ennahdha semblait isolé, dans cette perspective. Ce qui précipita le retour aux négociations.
Ainsi, l’intervention des organisations nationales, l’UGTT et l’UTICA, permit de dessiner un compromis. Si Ennahdha occultait sa défense d’intégration de Qalb Tounes. Le mouvement obtiendrait une augmentation de ses ministres. Deux d’entre eux sont des ministres-conseillers auprès du chef de gouvernement.
Autre acquis, le mouvement exige et obtient l’écartement de la ministre des Télécommunications. Laquelle appartient au parti Ettakatol. En faisant valoir la demande de ses adversaires d’un ministre indépendant, pour éviter les possibilités d’écoute.
Comment éviter une explosion sociale?
En outre, ainsi formé, le nouveau gouvernement établit un régime de partis, proportionnellement à leur représentation au Parlement. Les ministres indépendants renforcent le chef du gouvernement. Qui reste soumis aux aléas politiques et aux exigences des partis. Mais ce qui exclut l’intégration de grandes compétences économiques, susceptibles de traiter les urgences et d’assurer le redressement économique du pays.
Autre fait grave, l’augmentation inconsidérée des ministres et des ministres-conseillers. Ce qui annihile toute politique d’austérité que le gouvernement est censé engager. Transgressant l’esprit de la Constitution, le chef du gouvernement a réduit la participation féminine à sa plus faible expression.
Par ailleurs, les concertations du chef du gouvernement désigné avec les partis occultaient les débats sur les programmes. Et sur les visions d’avenir. Comment traiter la question du pouvoir d’achat? Comment développer les régions défavorisées? Et faire face au chômage et au développement de l’endettement?
De ce fait, la formation du gouvernement et ses amendements successifs traduisent les effets d’un bricolage. Et non d’une feuille de route, définissant le timing de ses différentes actions.
Car, face aux souhaits du Président de la République et aux exigences du Parlement, Elyes Fakhfakh est condamné à jouer le rôle de l’équilibriste. Optant pour le laisser-faire conjoncturel, sans modèle de développement et sans projet de société.
Or, la classe politique du nouveau pouvoir n’a pas pris la mesure des tragédies de non-développement. Lesquelles vont encore creuser le fossé entre eux, les classes défavorisées et la Tunisie périphérique. Comment éviter une explosion sociale?