La saison hivernale qui s’achève est marquée en Tunisie par un déficit remarquable de pluie. Une tendance qui vient illustrer un fait déjà avéré: le pays est le plus affecté par le changement climatique en Méditerranée.
En conséquence, la Tunisie est confrontée aux défis du stress hydrique; soit une disponibilité annuelle de moins de 500 m³ d’eau par habitant. Mais également: à l’érosion des côtes; à l’insécurité des productions agricoles (sécheresses récurrentes); et au fléau des pollutions d’industries (du textile, du tourisme, etc.). Celles-ci sont très consommatrices en eau. Bref, les indicateurs environnementaux sont au rouge. Et le changement climatique à l’oeuvre.
Alors, est-ce que pour autant les autorités et la population tunisiennes prennent la mesure de l’ampleur du changement climatique et du défi environnemental? Ici comme ailleurs, on constate une tension et des contradictions entre les paroles et les actes.
Les actes font encore défaut
Certes, une série d’initiatives (publiques et privées) méritent d’abord d’être saluées. Comme le projet « Reverdir la Tunisie », lancé en 2013. Ce projet vise à promouvoir un modèle d’agriculture. Et ce, à travers l’application et la diffusion de techniques traditionnelles d’irrigation. « Reverdir la Tunisie » a permis la naissance et le développement d’oasis-forêts dans le sud tunisien.
La transition écologique se joue à un niveau supérieur, celui de l’action publique. Sur ce plan, l’Etat n’hésite plus à prôner, notamment, la décroissance et la sobriété en matière de consommation d’eau et d’énergie dans les foyers.
Le mode d’action gouvernementale prônant la « responsabilisation » de l’individu s’est généralisé au domaine du « développement durable ». L’Etat lui-même a aussi affiché une grande ambition lors de l’accord climatique de Paris. Il s’est engagé à réduire de 43% de la production de CO2 et un objectif de 30% d’énergie renouvelable d’ici 2030.
Or, non seulement de tels objectifs semblent difficiles à atteindre, mais les actes font encore défaut. Concrètement, les investissements lourds nécessaires manquent à l’appel. Par exemple, une meilleure gestion de l’eau commande un investissement prioritaire dans la réhabilitation des canalisations d’eau potable des grandes villes. Notons que l’état déplorable est à l’origine du gaspillage irresponsable en cette période de pénurie.
A l’échelle de la population, malgré l’action d’association d’utilité publique mises en avant pour leur exemplarité, la prise de conscience écologique des Tunisiens reste limitée. La conscience environnementale des Tunisiens cesse de croître dans les contrecoups de la crise économique et sociale. Parallèlement, le mode de consommation des ménages et la masse des déchets afférente ne sont pas remis en cause.
Transformer l’environnement du pays
L’écologie est une préoccupation lointaine ou un franc « charlatanisme » pour trop de concitoyens. Le lien entre des considérations économiques et sociales et les enjeux environnementaux est loin d’être établi. La priorité est donnée aux premières. Elles neutralisent, en effet, tout volontarisme politique et changement comportemental significatifs. Or, l’ensemble est lié. L’amélioration de l’environnement est constitutif des conditions de vie, de la santé, du développement…
Au-delà des campagnes de communication à grand renfort de publicités qui permet une présence médiatique accrue de l’écologie, l’information diffusée semble assez inefficace. La baisse du pouvoir d’achat d’un côté et le manque d’action des pouvoirs publics sont les causes majeures de la diminution des « bonnes pratiques » écologiques.
Dès lors, au-delà de la stratégie publique de « responsabilisation de l’usager », c’est d’abord à l’Etat de se responsabiliser. Et ce, en impulsant des grands chantiers permettant de transformer l’environnement du pays et à l’adapter au mieux à cette donne du changement climatique dans lequel il vivra tout au long du XXIe siècle.