Cette fois, c’est la bonne. Le terroriste tunisien Seifallah Ben Hassine, alias Abou Iyadh, est mort près de Tombouctou dans le nord du Mali par l’aviation française. Sa mort a été annoncée à plusieurs reprises. La dernière fois, c’était en février 2019. De fausses informations ont alors été diffusées sur sa mort en Libye.
Abou Iyadh avait fait l’Afghanistan. On dit qu’il a préparé en personne l’assassinat d’Ahmad Chah Masoud, l’un des grands combattants contre l’occupation soviétique, surnommé « le lion du Panchir ». Il a été assassiné à la caméra piégée, manipulée par deux terroristes (un Tunisien et un Marocain) déguisés en journalistes.
A la faveur de ce qui est appelé « révolution », Abou Iyadh est sorti de prison. Il a bénéficié de la tolérance, pour ne pas dire de la complicité, de certains hauts cadres influents dans le gouvernement de la Troïka. « Ansar Charia », dont il était le chef, tenait le haut du pavé dans plusieurs villes. Le prosélytisme agressif de cette organisation terroriste se faisait au vu et au su de tous sans que les ministres de l’Intérieur et de la Justice du temps de la Troïka n’y trouvaient à redire.
Le rôle de Seifallah Ben Hassine dans l’attaque de l’ambassade des Etats-Unis est bien établi. Moins clair est son rôle dans le double assassinat de Chokri Belaid et de Mohammed Brahmi. Mais si le terroriste Abou Iyadh n’a pas tiré personnellement sur Belaid et Brahmi, il a sans doute incité à leur assassinat dans ses prêches takfiristes et ses discours haineux.
Esprit fanatique
Abou Iyadh et son mouvement terroriste d’Ansar Chariaa ont largement contribué à la pagaille qui a marqué les années 2012 et 2013. Avec, pour le moins, la neutralité bienveillante d’Ennahdha. On se rappelle les propos du chef d’Ennahdha qui leur conseillait de s’armer de patience, car « la police et l’armée ne sont pas encore sûres »…
Abou Iyadh est mort. Mais on est en droit de se demander si sa disparition est une victoire de la tolérance sur l’extrémisme ? De la liberté de conscience sur le fanatisme ? De l’harmonie sociale sur le terrorisme et de l’ouverture sur le repli sur soi ? En un mot, de l’intelligence sur la bêtise ?
Au train où vont les choses en ces temps obscurs, la réponse est non. Car, si le chef terroriste d’Ansar Charia a disparu, son esprit violent et intolérant fait des ravages au sein même du parlement tunisien. Les Tunisiens ont cru élire des représentants pour qu’ils leur trouvent des solutions à leurs problèmes économiques et sociaux. Pour qu’ils tirent le pays du marasme dans lequel il patauge depuis près d’une décennie. Ils se sont retrouvés avec un parlement dont les membres passent le plus clair de leur temps à s’insulter et à s’entredéchirer.
D’aucuns disent que c’est un exercice normal dans une démocratie. Que dans d’autres parlements, les députés en viennent aux mains et se lancent des chaises sur la tête. Peut-être. Mais cette semaine, nous venons d’assister dans notre honorable parlement à l’entrée fracassante de l’esprit fanatique, intolérant et violent qui, depuis 2011, ne cesse de semer la mort et la destruction dans le monde arabe.
Le vrai corona politique
Le député Mohammed Affesse n’a rien trouvé de mieux à dire que de faire l’éloge de cette idée infecte qui pousse les hordes d’écervelés à devenir terroristes et coupeurs de têtes : le ‘’takfir’’. Ce député croit qu’il est de son devoir de montrer du doigt « les apostats ». C’est-à-dire ceux qui ne lui ressemblent pas et qui ne portent pas ses idées.
Jamais de tels propos n’ont été proférés dans l’enceinte du parlement. Des propos qui appellent implicitement au meurtre et à la suppression de l’Autre. N’oublions pas que ce sont de tels propos qui ont préparé le terrain aux assassinats de Chokri Belaid et de Mohammed Brahmi. Et le plus extraordinaire est que les honorables représentants du peuple n’ont pas eu l’air choqués de ces propos dignes d’un daéchien. Aucune mesure n’a été prise contre le député takfiriste. Mais nous avons vu en revanche les flots de haine et de rancœur déversés sur Abir Moussi par ses collègues hommes, et surtout par ses collègues femmes…
Les missiles de la haine et de la rancœur tirés sur Abir Moussi ne l’ont pas été seulement de la rampe de lancement du parlement. Ils venaient de l’extérieur aussi. Tel celui lancé par ce « professeur » de droit constitutionnel. Il n’a pas hésité à qualifier la présidente du PLD de « corona politique ».
Si Abir était au pouvoir, ce professeur-caméléon aurait sans doute été l’un de ses flagorneurs attitrés. Il aurait certainement été dans ses pattes pour… l’aider à choisir ses collaborateurs.
Allez leur faire comprendre que le « corona politique » sévit en Tunisie depuis près d’une décennie. Et qu’il faut se fier au diagnostic de Abir Moussi plutôt qu’à celui de ce professeur-caméléon.