Pourquoi avoir décidé de communiquer par deux voix, celle de Carthage et de la Kasbah? Pour pratiquer un certain « gouttes à gouttes » dans l’annonce des mesures de confinement? Pourquoi avoir communiqué à 22 heures? Autant de questions qui méritent d’être posées au sujet de la communication gouvernementale concernant les mesures de confinement.
Car, la communication au sujet des mesures de confinement, décidées le 20 mars 2020, et consécutives au virus Corona, n’a pas manqué d’être largement commentée.
Il suffit du reste de suivre de près ce qui s’écrit encore sur les réseaux sociaux pour remarquer les critiques, notamment quant à l’approche utilisée.
Que peut-on reprocher, à ce niveau, à cette communication ô combien nécessaire?
Nombre de spécialistes rompus aux techniques de communication, qu’ils soient universitaires ou praticiens, font remarquer deux grands biais.
D’abord, que cette communication s’est faite par étapes. Les intéressés ne se sont sans doute pas assez rendu compte. Notre confrère Slaheddine Dridi a mené nombre de communication dans le monde de la santé. Il parle, à ce propos, dans un post sur Facebook, d’une communication de « gouttes à gouttes ».
Une communication en trois temps !
Grosso modo, et sans rentrer dans des détails, la communication au sujet du confinement s’est déroulée, sous nos yeux, en trois temps.
Première étape, l’intervention du chef de l’Etat, le 20 mars 2020.
Deuxième étape, la publication dans la soirée d’un texte qui apporte des premiers détails sur un premier train de mesures et des précisions quant à l’intervention du chef de l’Etat.
Troisième étape, l’intervention du chef du gouvernement le lendemain, le 21 mars 2020.
Et à se demander, déjà à ce stade, pourquoi avoir conçu et mis en place une communication par étapes?
D’autant plus que les Tunisiens, et le chef du gouvernement en a parlé, sont habités par une curiosité qui exprime nombre de craintes pour leur vie et leur quotidien.
Ensuite, fallait-il que les deux chefs de l’exécutif parlent? La question peut fâcher. N’était-il pas plus efficace qu’une seule voix s’exprime concernant les mesures de confinement? Il en aurait été autrement de toute façon.
Une intervention programmée à une heure tardive
Il ne faut certes pas comparer avec la France, pays avec lequel nous avons du reste une certaine proximité. Ce pays constitue de ce fait une certaine référence: deux vécus politiques et constitutions différents. Il serait bon toutefois de se demander pourquoi nos politiques ne regardent pas assez nos voisins. Et ce, pour s’inspirer de leur vécu communicationnel en cette période de crise.
Ainsi, et au-delà du fond, il faut peut-être s’interroger si les interventions du président Emmanuel Macron ne méritent pas tout notre intérêt. La France a parlé d’une seule voix et non pas de deux voix parallèles.
On pourra dire que notre exécutif est à deux têtes. Mais comment expliquer, par ailleurs, que l’intervention de notre chef du gouvernement soit faite à une heure tardive (22 heures).
Les règles d’efficacité requises
N’a-ton pas compris qu’il a un « temps journalistique » (une gestion du temps par les professionnels des médias)? Cette règle impose, comme dans tout métier, le respect de certaines règles. L’objectif ne consiste-t-il pas à assurer l’impact d’une déclaration politique et faciliter le travail des médias? (cf. « Les temporalités du journalisme », Temporalités, Revue des sciences sociales et humaines.)
N’est-il pas convenu, par exemple, que les communicateurs cherchent toujours à articuler leurs actions. Et ce, en fonction du principal journal télévisé qui est dans quasiment tous les pays à 20 heures?
Comme dans tout métier, il y a ce que les anglo-saxons appellent « the best practices » (les meilleurs pratiques).
Inutile sans doute d’aller encore plus loin. Disons qu’il est à se demander ce que font les services de communication au niveau de l’appareil exécutif pour respecter les règles d’efficacité requises? Nous dira-t-on à ce stade que nous sommes nous autres journalistes en train de chercher la faute par tous les moyens.
Nous y reviendrons.