Le ministre des Finances, Mohamed Nizar Yaiche, déclarait récemment que « la Tunisie et le Fonds Monétaire International (FMI) ont convenu d’arrêter la sixième revue du programme de prêts de l’Institution de Bretton Woods. Et ce, en adoptant un nouveau programme reflétant les nouvelles orientations économiques et sociales du gouvernement ».
« Le FMI ainsi que le gouvernement sont en train de discuter des grands axes de ce nouveau programme ». C’est ce que précisait encore le ministre.
Pour l’économiste Ezzedine Saïdane, « cette décision sera lourde de conséquences, pour la Tunisie qui affronte cette crise du Corona. Une crise sans précédent, avec une économie exsangue et des finances publiques sévèrement affaiblies ».
En effet, « la Tunisie avait obtenu en 2016, auprès du FMI, un crédit de 2,8 milliards de Dollars (8,2 milliards de Dinars). Et ce, dans le cadre d’un programme de réformes sur lesquelles la Tunisie s’était engagée ».
Mais le pays n’a effectivement reçu sur ce crédit que 1,6 milliard de Dollars. « Le reliquat de 1,2 milliard de Dollars (3,5 milliards de Dinars) a d’abord été suspendu par le FMI en janvier. Il a maintenant été annulé », explique-t-il.
Il s’agit bien, selon lui, « d’une « sanction » essuyée par la Tunisie qui n’a pas tenu ses engagements. Notamment celles de réaliser les réformes en ce qui concerne la réduction de la masse salariale de la fonction publique. Ainsi que le redressement des entreprises publiques, la réforme fiscale, etc. »
Et d’ajouter: « Il faut rappeler, à cet effet, que les crédits du FMI sont de loin les moins chers en termes de taux d’intérêt (2% par rapport à 8% sur le marché financier international). La perte pour la Tunisie est donc énorme. Mais elle ne se chiffre pas seulement en termes de différentiel de taux d’intérêt, elle est de loin, plus importante. »
Sauver la Tunisie est la priorité absolue!
« Il faut rappeler aussi, à ce propos, que le budget de 2020 prévoit la mobilisation de nouveaux crédits pour l’équivalent de 11,3 milliards de Dinars dont 8,8 milliards de Dinars sous forme de crédits extérieurs (en devises). Cette mobilisation va être difficile du fait de la situation actuelle du marché financier international d’une part. D’autre part, du fait que les institutions financières déterminent généralement leur position. Et ce, vis-à-vis d’un pays en fonction de la position du FMI », s’inquiète-t-il.
« Il faudrait donc compter davantage sur nos moyens propres. Et ce, même si cela se traduirait par une détérioration de nos indicateurs économiques et financiers. Celui qui est chargé d’éteindre le feu n’a pas à se soucier de la facture d’eau. Sauver le pays est la priorité absolue. La gestion de la situation économique et financière, se fera plus tard ».
Par ailleurs, s’agissant du deuxième programme que la Tunisie devra négocier avec le FMI. M. Saïdane considère qu’il s’agit d’un long processus dont l’issue n’est pas certaine.
En outre, il s’est exprimé au sujet du programme conjoncturel « Programme Corona » mis en place par le FMI et en vertu duquel la Tunisie bénéficiera d’un montant de 400 millions de dollars (équivalent de 1200 MD). Ce montant servira pour lutter contre les retombées de cette crise sanitaire.
Au final, l’économiste souligne qu’ « au regard du montant global du programme mis en place par le FMI pour lutter contre cette crise et qui s’élève à un trillion de dollars; le montant obtenu par la Tunisie reste très modeste et en deçà des besoins du pays face à cette conjoncture exceptionnelle ».
Avec TAP