Sur les marchés internationaux, aucune matière première n’a perdu autant de valeur que le pétrole. Le baril de Brent, la principale référence sur les marchés, est même passé sous la barre des 20 dollars.
La faiblesse de la demande mondiale et la manœuvre technique menée par les Saoudiens a fait chuter les cours du pétrole. Depuis le début de l’année, le recul dépasse les 60%. Et ce, malgré un bon début de séance ce vendredi (prix supérieur à 31 dollars).
A la recherche d’un juste prix
Hier, et à la surprise générale, le Brent s’est offert sa meilleure hausse quotidienne de tous les temps: +47%. Et pour raison, une sortie médiatique du Président américain Trump. Il a annoncé, à la chaîne américaine CNBC, qu’il œuvre pour un accord entre les Saoudiens et les Russes pour une baisse quotidienne de la production à hauteur de 10, voire 15 millions de barils/jour ! Il a également signalé que, pour le moment, les Etats-Unis ne sont pas concernés par cet accord.
Mais rapidement, les investisseurs ont révisé leur optimisme à la baisse. Les prix des Futures (les contrats à terme) ont perdu hier soir 3%. Il est vrai que le niveau actuel des prix ne fait pas l’affaire des principaux producteurs. Mais une telle coupe à l’offre ne serait pas également bonne pour ces derniers. Ils doivent faire face à une récession économique.
Pour les Américains, les prix actuels sont inquiétants. Ses producteurs de pétrole de schiste ne pourront pas résister encore longtemps. Selon une étude menée par Restart Energy, seules 16 compagnies de pétrole de schiste pourraient survivre à un prix inférieur à 35 dollars.
Indépendamment de cela, ce qui peut prolonger la baisse des prix est l’épuisement des capacités de stockage. Aux USA, les réserves frôlent les 500 millions de barils. Bloomberg a rapporté que les Chinois se sont lancés dans des acquisitions massives de pétrole brut. Ils veulent profiter des niveaux actuels des prix. Ils compteraient passer d’une réserve stratégique de 90 jours à une autre de 180 jours, grâce à la mobilisation de toutes les capacités de stockage nationales. A cela, s’ajouteraient une stratégie complète sur les marchés des contrats à terme.
La faible marge de manœuvre de la Tunisie
La baisse des prix est une vraie aubaine pour la Tunisie en 2020. Le pays a mobilisé une grande partie de ses ressources pour faire face aux effets économiques du COVID-19. Il pourrait limiter la casse grâce aux gains par rapport à ce qui a été budgétisé (65 dollars/baril).
Non seulement cela permettrait moins de dépenses d’achats, mais également la réduction des subventions énergétiques qui sont de l’ordre de 1,880 milliard de dinars. D’ailleurs, le recul de la consommation nationale signifie moins d’importations.
En 2020, la Tunisie comptait importer 2,925 millions de tonnes de pétrole raffiné et produire 2,402 millions de tonnes de pétrole brut. Nous pensons que nous n’importerons pas autant de quantités. Nous produirons beaucoup moins. A court terme, nous avons donc besoin de prix bas pour soutenir le budget, surtout que notre capacité nationale de stockage est limitée.
En même temps, nous ne pensons pas que le Gouvernement réduise les prix à la pompe. Cela conduirait à la réduction des droits de consommation, estimés à 852 millions de dinars dans la loi de Finances 2020, soit près de 27% de la totalité des droits de consommation budgétisés.
Non seulement cela tiendrait compte de révision des prix à la hausse, mais des recettes provenant d’autres produits et qui ne seront pas atteint à cause de la situation actuelle. Cette situation ne fait qu’augmenter les pressions sur les comptes de l’Etat qui s’est retrouvé obligé de doper ses transferts sociaux durant cette période. L’exercice budgétaire de 2020 est vraiment périlleux.