Voici pourquoi Mohamed Abbou a commis une maladresse. Car, il pouvait faire réellement l’économie de pareille déclaration relative aux tickets-restaurants.
« Gouverner, c’est faire croire ». Nombre de nos dirigeants politiques mettent encore beaucoup de temps à faire sienne cette célèbre devise de Nicolas Machiavel, aussi vieille que la politique. Elle est défendue par « un homme d’Etat, un philosophe et théoricien de la politique, de l’histoire et de la guerre ». Sans doute l’un des plus illustres. Il n’aurait pas manqué d’appeler certains dirigeants à revoir leur copie, la gestion des tickets-restaurants en témoigne.
En effet, cette devise, tout le monde le sait, met le doigt sur une nécessité pour tout homme politique: savoir communiquer. Une communication qui est devenue aujourd’hui un art, voire une idéologie. A l’heure notamment des réseaux sociaux et du tout-communication.
Ainsi, l’actualité nous offre l’occasion d’en parler ces jours-ci. Avec ce qui semble bien être une véritable maladresse du ministre d’Etat, chargé de la Fonction publique, de la gouvernance et de la lutte contre la corruption, Mohamed Abbou.
Réaction de l’UGTT
Sa déclaration au sujet de la suspension des tickets-restaurants pour les fonctionnaires a fait, le 13 avril 2020, le tour des réseaux sociaux provoquant de nombreuses critiques. Comme elle a fait réagir– et c’est sans doute le plus important en cette période délicate- l’Union Générale Tunisienne du Travail (UGTT). Puisqu’elle lui a fait savoir par la voix de son secrétaire général adjoint, Sami Taheri, que le ministre n’avait pas le droit de décider seul sur ce dossier.
Un épisode de plus qui montre les défaillances de nombre de nos dirigeants au niveau de la communication. Trois choses peuvent être dites à ce stade. Elles montrent que Mohamed Abbou pouvait faire réellement l’économie de cette déclaration.
Tout d’abord, la première découle de la réaction du secrétaire général adjoint de l’UGTT. C’est que le moment est très mal choisi pour faire pareille déclaration. D’autant plus que le sujet a trait au portefeuille du citoyen.
D’ailleurs, Elyès Gharbi, le producteur de l’émission Midi show, au cours de laquelle s’exprimait, le 13 avril 2020, le ministre Mohamed Abbou, n’a pas manqué de le lui faire remarquer. Les tickets-restaurants sont en quelque sorte un « complément de salaire ». Puisqu’ils servent d’adjuvant à des fonctionnaires dont le pouvoir d’achat n’a cessé d’être mis à mal. Il suffit de constater la valse des étiquettes dans les magasins pour s’en rendre compte.
« Pas de sens »
Chose que le ministre n’a pas voulu semble-t-il prendre en ligne de compte. Sa réponse était qu’il n’y avait « pas de sens » à octroyer, par ces temps difficiles, les tickets-restaurants. Et ce, « d’autant plus que les restaurants étaient fermés ».
Ensuite, la seconde, c’est qu’on peut se demander pourquoi Mohamed Abbou doit s’exprimer sur un fait inscrit dans les mesures gouvernementales concernant la lutte contre le coronavirus. Même si les questions posées au cours de l’émission, sont pour ainsi dire, de son rayon.
Car, la ministre de la Femme, Asma Shiri, n’est-elle pas la porte-parole du gouvernement ? Et n’est-elle pas intervenue le même jour, et à l’issue d’un Conseil des ministres, pour présenter les mesures prises dans ce sens ?
Enfin, la troisième et la dernière réflexion que peut susciter la sortie de Mohamed Abbou consiste à dire que l’intéressé ne devrait-il pas par ces temps difficiles où la fonction publique, la gouvernance et la lutte contre la corruption constituent et vont constituer encore pour un temps des chantiers bien épineux, plutôt consacrer son temps à piocher dans ces dossiers et ne sortir que pour évoquer des décisions qui apportent un mieux à un quotidien confiné ?