Cette crise interpelle de nouveau d’une certaine manière les dirigeants maghrébins. Ils sont incapables de s’entendre sur une vision et une destinée communes, seules voies de salut.
Unis, solidaires dans l’effort et les moyens, leur riposte face à la crise du Covid-19 serait plus crédible et plus efficace. Surtout qu’à l’avenir « la voie royale » de la mondialisation, qui les a détournés des chemins de l’intégration régionale, serait de plus en plus obstruée. Le processus de démondialisation est déjà à l’œuvre.
L’Occident, qui a fait de la Chine l’usine du monde mesure, à l’issue de l’arrêt brutal des économies, à quel point sa dépendance à l’égard de l’Empire du Milieu met en danger sa souveraineté technologique, son indépendance économique et ses propres capacités de développement. Les chaînes de production et de valeurs vont progressivement fondre. Le nouveau monde se reconstruira sur de nouvelles bases de relocalisations et de connexions mois lointaines.
Le site Tunisie est bien ancré dans un espace maghrébin unifié, proche de l’UE et des sièges des grandes sociétés. Il pourrait retrouver un attrait supplémentaire et une importance toute particulière. S’il se met aux standards mondiaux d’attractivité : infrastructure, climat des affaires, compétitivité.
Il est de l’intérêt de l’Europe de se redéployer sans aucun risque de ce côté de la Méditerranée, si elle veut exister en tant que grande puissance face aux Etats-Unis, à la Chine d’aujourd’hui et à l’Inde de demain.
Compléter le puzzle des grands espaces régionaux
Dans ce vaste mouvement en gestation, les pays du Maghreb gagneraient à unir leurs efforts. Ils gagneraient à se donner une ambition commune. Ils doivent impérativement reprendre la construction d’un espace économique intégré, libre de toute entrave, articulé sur un marché unifié et une monnaie unique. Une telle perspective peut leur offrir, dans le monde qui s’annonce, un cadre de développement durable.
Qui les protège et les aide à surmonter les crises. Qui leur permet de faire entendre leur voix et de peser sur le cours des choses, ne serait-ce que dans l’espace euro-africain. On imagine, sans peine, ce que gagneront les pays de la région s’ils n’étaient pas orphelins d’une union maghrébine.
Ils complèteront la carte ou le puzzle des grands espaces régionaux qui structurent l’économie-monde. Ils y feront une entrée triomphale et ils bénéficieront au moins d’un surcroît de croissance estimée à 2%. C’est, nous dit-on de partout, le coût du non-Maghreb.
C’est aussi, à très peu de choses près, l’équivalent du plan d’aide financier au profit de la protection sociale et des entreprises pour faire face à la crise. En attendant le second volet financier propre à la relance. Quand on sait tout le mal que s’est donné le gouvernement à libérer de tels montants, on réalise, mieux qu’à aucun autre moment, l’urgence maghrébine. Notre résilience face aux crises, aux intempéries et turbulences mondiales viendra de là.