Dans l’une de mes précédentes publications, j’ai eu l’opportunité d’aborder l’idée de, l’accompagnement du changement et de la pertinence de l’activation de nos appétences à un changement avant même d’envisager de l’initier.
Il serait temps d’identifier une stratégie pour accompagner les nouveaux apprentissages intrinsèques, qui seraient propices à la pérennisation et à l’installation définitive et irréversible de changement.
Nous y voilà avec la pandémie de Covid-19
Il semblerait que nous soyons en guerre, sous une nouvelle forme. Les mots ont un sens, dit-on. Justement, le mot guerre est défini comme une « lutte armée entre États », une « lutte entre des groupes, entre des pays qui ne va pas jusqu’au conflit sanglant » ou encore une « lutte entre des personnes ». Notre guerre à tous est donc déclarée, mais cette fois-ci contre un ennemi invisible à l’oeil nu, sous la forme d’une lutte sanitaire pandémique. Cet ennemi est identifié, mais il reste insaisissable, un sprinteur hors normes, il progresse très vite et partout. Il pourrait même vous rendre visite en ce moment, le temps de cette lecture. Alors, prenez soin de vous.
Notre ennemi public est du genre apatride et atemporel. Il traverse le temps et l’espace sans être inquiété, puisque furtif. La stratégie, majoritairement choisie, pour lui faire la peau est de nous planquer et d’expérimenter le concept de la distanciation sociale. Voilà qui est fait avec le confinement de 6 à 8 semaines. La moitié de l’humanité est déjà confinée, rien que ça.
Le contexte étant posé, qu’en est-il maintenant des conséquences de cette ambiance guerrière ? Comment allons-nous envisager le jour d’après ? Il est extraordinaire d’observer, aussi bien le nombre que la nature systémique des questions que nous nous posons actuellement. Ces questions concerneraient le paradigme, ou niveau d’existence, dans lequel nous sommes installés.
Tout y passe, l’appartenance collective à une nation, les valeurs qui nous unissent, le mode de vie, les pratiques cultuelles et les méthodes de l’enseignement et de l’instruction. Mais également, le mode et les circuits de consommation, les modes de transport, la relation à nos aînés, les relations interpersonnelles, aussi bien au sein des familles qu’au niveau professionnel, les pratiques professionnelles et les méthodes du travail, les comportements humains en général. Au niveau macroéconomique, nos questions s’attaqueraient aux modes de production, à l’économie de marché et à la financiarisation de l’économie.
En évoquant l’enseignement, Il y a une phrase de Claude Allègre (Ministre de l’Éducation nationale, de la Recherche et de la Technologie en France, entre 1997 et 2000) qui me vient à l’esprit ; « Il faut dégraisser le mammouth ». Cette phrase était l’emblème du conflit qui a eu lieu entre le pouvoir exécutif et les enseignants en France en 1997. Pour faire court, cette phrase avait, presque à elle seule, scellé la fin de la politique de réforme de l’éducation nationale, initiée à l’époque, et elle a eu pour conséquences la démission du Ministre en 2000.
Vingt ans après, les enseignants se sont mobilisés à nouveau, dans la continuité du mouvement des Gilets jaunes en France, pour contester avec force la réforme de la retraite proposée en 2019. Dans la conscience collective française, l’éducation nationale pourrait sembler être l’une des administrations qui résiste le mieux aux changements.
En ce moment, nous observons une incroyable adaptation et une dynamique dont les enseignants et les professeurs français font preuve, pour assurer les cours et maintenir des interactions positives avec leurs élèves. Les visio-conférences, les appels téléphoniques individuels et les cours à distance sont favorisés avec une souplesse résiliente. Ces nouveaux outils et méthodes sont peut-être mêmes plébiscités.
Cela se déroule globalement sans problèmes majeurs, ni du côté des enseignants ni du côté des parents. Il pourrait néanmoins y avoir quelques effets négatifs pour une part d’élèves et de familles. Des ajustements seraient certainement à trouver à court terme pour contourner ces effets et les difficultés rencontrées.
Mais que s’est-il passé exactement au sein de cette administration ?
Un virus, invisible à l’oeil nu, aurait-il plus de leadership, plus de pédagogie et de capacité à convaincre qu’un Président, qu’un chef de gouvernement ou qu’un ministre, pour provoquer cette initiative de changement aussi structurant ?
Sommes-nous, les humains, plus à l’écoute ou plus influençables par l’invisible que par le visible, pour accepter et pour être moteurs dans les situations de changement et nous adapter en conséquence ?
Faisons-nous plus confiance à un virus qu’à nos dirigeants pour accepter d’évoluer dans nos savoir-faire et nos savoir-être ? Y a-t-il quelque chose qui a changé en nous, en situation de pandémie, nous rendant attentifs et acteurs dans l’initiation d’un changement ? Les réponses à ces questions pourraient sembler être affirmatives.
Pour ma part, je me laisserais tenter de dire qu’effectivement la lutte contre le Covid-19 a activé en nous un mécanisme cérébral et cognitif, propice au changement. L’aspect pandémique de ce virus a également rendu ce mécanisme plus globalisant, dépassant ainsi les frontières géographiques et nos périmètres d’action et de réflexion. Il continue également à nous pousser collectivement à accepter, sans de fortes résistances, de remettre en question nos modes de vie, nos routines et réflexes et nos comportements bien installés.
Notre appétence à nous questionner sur nos visions du monde et sur les évolutions futures s’est ainsi activée
Ce Covid-19, est-il un malheureux accident, hors de notre volonté, ou bien quelque chose de prémédité ? Peu importe finalement, tant que notre appétence s’est activée.
Nos réponses à ce questionnement structurant pourraient faire émerger un nouveau niveau d’existence, plus harmonieux et inclusif de toute la communauté humaine, avec des nouveaux apprentissages et des interactions plus consensuelles entre agents économiques et entre humains.
Une communauté plus subjective, ayant pour objectif la poursuite d’un intérêt collectif écologique, égalitaire et solidaire (cf. v Mèmes Vert de la Spirale Dynamique de Clare Graves et Don Beck).
Selon les sciences cognitives, le cerveau humain est capable d’exécutions fulgurantes. Il souffre néanmoins de deux handicaps très forts, installés par la nature : la lenteur de l’intégration à terme d’informations ou de savoir-faire nouveaux, et la résistance à modifier des réflexes ou modes de pensée.
Ce temps d’acquisition est estimé entre 4 et 5 semaines. Miraculeux, ce temps nous a été accordé avec le confinement. Ce qui serait certainement important, pour envisager le jour d’après, est que nous ouvrions collectivement afin que le niveau d’existence qui pourrait émerger soit plus bénéfique que celui qui l’a précédé. C’est-à-dire une part de gagnants plus élevée et un nombre de perdants beaucoup moins important, voire réduit à néant.
Par humanisme, je pencherais vers une évolution positive de nos modes de vie et de ce que nous devrions être. C’est-à-dire tous responsables de la protection de notre environnement, de notre planète, de tout être vivant et du droit inaliénable de chaque humain, de toutes origines. Et où qu’il soit, à mener une vie subjectivement positive pour lui et pour ses semblables.