Au cœur d’une enquête: les sages-femmes et les activités de la santé sexuelle et reproductive. Et ce, durant l’épidémie Covid-19 en Tunisie. Avec en ligne de mire les accouchements à domicile et les avortements clandestins.
En effet, une enquête touchait 126 sages-femmes du Groupe Tawhida Ben Cheikh et de l’Association tunisienne des sages-femmes. A cet égard, les organisations collaboratrices notent une détérioration dans la prestation des services de santé sexuelle et reproductive (SSR); et ce, dans les structures de première ligne. De plus, elle s’aggrave par la fermeture de certains centres de l’Office National de la Famille et la Population (ONFP). Ceci présage d’une augmentation des accouchements à domicile et des avortements clandestins.
Ainsi, cette détérioration s’observe au niveau du manque de matériel de protection du personnel dans les structures de prestation de gynécologie et d’obstétrique, dans le secteur public. Mais aussi au niveau de l’absence d’une information adéquate sur le virus et sur les procédures de protection. En outre, on note une absence de diffusion des directives et des conduites à tenir. Elle a entraîné des difficultés d’accès aux services de santé sexuelle et reproductive essentiels.
Le Covid-19 a créé des contraintes supplémentaires
Il est clair qu’avec le couvre-feu et le confinement généralisé, la crainte des contaminations créent des difficultés supplémentaires aux femmes pour accéder aux services. En particulier pour les accouchements et les autres urgences de santé reproductive.
Par ailleurs, selon les résultats d’une enquête auprès de 126 sages-femmes, le risque de voir augmenter les accouchements à domicile et les avortements clandestins avec les complications qui peuvent en résulter, est bien réel.
A cet égard, l’objectif de l’enquête était d’évaluer les perceptions des sages-femmes par rapport au fonctionnement des structures fournissant les services SSR où elles exercent. Mais aussi relever les barrières à leur exercice quotidien, ainsi que leurs besoins de premier plan durant l’épidémie de Covid-19.
Rappelons que les sages-femmes sont au nombre de 2200 en Tunisie (UGTT, 2019).
10% des sages-femmes relèvent des accouchement à domicile
L’enquête a porté sur les risques liés aux grossesses à risque et leurs complications futures. En Tunisie, 99.5% des accouchements sont assistés par un personnel qualifié et 99.7% ont lieu dans un établissement de santé (MICS 6, 2018). Cependant, 10% des sages-femmes ont rapporté qu’un accouchement à domicile a eu lieu depuis la mise en place du confinement.
Alors, de nombreux facteurs interpellent, comme: la baisse des visites prénatales; la tendance à la recrudescence des accouchements à domicile; l’absence de contraception et de services d’avortement. Ils font craindre une recrudescence des grossesses non désirées et des avortements clandestins et à risque. Car leurs conséquences sur la mortalité et la morbidité maternelle et néonatale sont préoccupantes.
D’autre part, la redirection des efforts des structures publiques et des ressources dans la lutte contre l’épidémie de Covid-19 a révélé des problèmes structurels et fonctionnels. Et ce, dans la prestation des services de santé sexuelle et reproductive touchant ses bases les plus essentielles. A savoir: le personnel de santé et surtout les sages-femmes. Des besoins qui existaient à des degrés divers tels que les besoins en information et formation, encadrement, matériel de protection, médicaments et équipement, ainsi que les procédures de parcours des patients n’ont fait que s’exacerber durant la crise.
Pourtant, il faut se rappeler que la Tunisie des années 60 mettait en place le planning familial. Avec pour objectif de préserver la santé sexuelle des femmes en encadrant l’accouchement à domicile et autorisant l’avortement. Ce fut une des marques de l’exception tunisienne. Mais aujourd’hui, elle est bien mise à mal, notamment par la pandémie de Covid-19.