Ayant acquis la certitude qu’il n’intégrera pas de sitôt l’équipe gouvernementale; Qalb Tounes, le parti de Nabil Karoui, assure, qu’il « n’est pas concerné par la participation à un prétendu gouvernement d’union nationale. Et refuse par conséquent de reproduire l’expérience d’un échec ». C’est ce qu’affirme un communiqué rendu public mercredi 13 mai.
Pourtant, la réaction est étrange. Surtout quand on sait qu’il y a à peine deux jours, le président du bloc de Qalb Tounes, Oussama Khelifi, soutenu manifestement par Ennahdha, lançait un discret appel à Elyes Fakhfakh. Et ce, pour l’inciter à élargir la coalition gouvernementale. Sous prétexte que l’intégration de son parti au sein de l’actuelle équipe gouvernementale peut apaiser les tensions entre les partis de la coalition gouvernementale. « Ce gouvernement est politiquement orphelin. Sa ceinture politique, ce sont les chamailles et les conflits. Le gouvernement arrive au parlement pour quémander notre vote en faveur de ses projets de loi. Alors que nous sommes dans l’opposition ». Tels sont ses propos, tenus le mardi 12 mai sur les ondes de Mosaïque FM.
Le niet de Fakhfakh
Or, Elyes Fakhfakh a écarté le parti de Nabil Karoui de la composition gouvernementale depuis le début des concertations autour de la formation du gouvernement. Et il n’est pas prêt pour le moment à changer d’avis. Notamment à cause des casseroles judiciaires traînées par l’homme d’affaires et propriétaire de la chaîne privée Nessma. Ainsi que de l’opposition catégorique du président de la République Kaïs Saïed, chantre de la moralisation de la vie politique. Et ce, à l’entrée au gouvernement de son ancien adversaire à l’élection présidentielle.
La politique de la porte entrouverte
Ajoutons à ces arguments que M. Fakhfakh estime en son for intérieur que la coalition actuelle est fragile. Etant secouée par des tiraillements entre les courants politiques. Pour ces raisons, lors de sa récente intervention sur France 24, le chef du gouvernement a rappelé que la priorité du moment est « la gestion de la crise sanitaire. Et son impact sur l’économie nationale et non la politique politicienne ». Une manière habile d’opposer un refus d’intégration de Qalb Tounes au sein de son gouvernement. Tout en laissant la porte entrouverte.
Hausse de ton
De ce fait, la réponse du parti de Nabil Karoui ne s’est pas faite attendre. Le bureau politique de Qalb Tounes a publié mercredi 13 mai 2020, un communiqué de presse. Il y met en garde « contre les tiraillements et conflits idéologiques entre les membres l’équipe gouvernementale. Et qui s’opposent au principe d’un gouvernement d’union nationale. »
Puis, haussant davantage le ton, le communiqué du parti apporte d’autres précisions. Il ajoute: « Face à ce comportement irresponsable, Qalb Tounes appelle le chef du gouvernement à créer un environnement plus harmonieux au sein de son équipe. Et mettre en place des conditions de travail correspondant aux besoins du pays. Pour affronter les défis sanitaires, économiques et sociaux et préparer l’étape de l’après coronavirus ».
Allégeance feutrée à Kaïs Saïed?
Par ailleurs, Qalb Tounes rappelle qu’il n’est pas concerné par la participation à un « prétendu gouvernement d’union nationale ». En outre, le bureau politique lance un appel au président de la République, en sa qualité de plus haute autorité dans le pays. Et ce, « à assumer son rôle de rassembleur entre les différents intervenants et garant du respect de la Constitution; face au climat de tensions régnant sur la scène politique, notamment des menaces de mort ».
Une manœuvre visant à brouiller la scène politique en jouant la carte du président de la République contre l’hôte du palais de la Kasbah?