« Nour ala nour » par la grâce des urnes ! Cela peut paraître paradoxal, mais c’est comme si les hommes politiques de ce pays n’avaient pas autre chose à faire que de se chercher noise et de s’invectiver quitte à aller jusqu’au-dessous de la ceinture.
Parler dans ces conditions de morale, de probité et de respect des engagements, je ne vous dis pas. Alors, quand le Président de la République décide de s’en mêler, cela vous donne graduellement, un peu, beaucoup, passionnément et de Kébili à Fondouk Jedid, on est passé par toutes les étapes.
Normal qu’au vu de l’état de pourrissement du débat politique et partant de la situation générale dans le pays, tout le monde s’en donne à cœur joie, et en avant la musique. Plus intelligent et plus perspicace que moi, tu dois mourir. C’est ce que d’ailleurs ont vite compris les esprits malintentionnés qui se sont dit que si le facteur de la mort a déjà sonné plus d’une fois, pourquoi devrait-il s’arrêter en si bon chemin ?
De Kébili à Fondouk Jedid ou quand la Grande muette s’invite malgré elle dans la fournaise politique. Dépositaire de la légalité, l’armée ; et la légitimité, comment l’interpréter ? Tout le monde en parle et s’en réclame, mais à l’arrivée, c’est l’essentiel qui est perdu de vue. D’arroseur, le Président de la Républiques est devenu l’arrosé. Et ce n’est pas près de prendre fin, même s’il est normal qu’il se défende et se montre plus explicite en prenant à témoin les militaires, chose insolite pour un iftar en groupe. En tout cas, drôle d’endroit pour mettre le feu aux poudres. Que la classe politique se régale en se confondant en réactions toutes aussi passionnées que musclées, cela participe de la règle du jeu. Il n’aurait pas dû le président pourfendeur, chez les leveurs de boucliers, on n’a pas fait dans la dentelle pour brocarder celui qui voulait être Merlin l’enchanteur, mais qui n’oublie pas de régler ses comptes… Paroles, paroles, paroles, et je te tiens, tu me tiens par la barbichette qui n’en finit pas. Après tout, le pays a eu les suffrages qu’il mérite !
Rafaa Tabib, monsieur courage…
Alors, quand surgit tel un monsieur courage, un Rafaa Tabib, expert en géopolitique et professeur universitaire de son état, pour joindre, sur un plateau télé, le geste à la parole pour éconduire l’insignifiance et dire trop c’est trop, on reste admiratifs. Combien sont-ils ou elles parmi tous ces hommes politiques à en faire de même ? La faute aux médias ? Oui sans aucun doute, même si on ne va pas me sortir le sacro-saint principe du devoir d’informer !
Dérobade
La dérobade est cet autre sport préféré des Tunisiens. D’ailleurs, c’est pour cela qu’ils sont là où ils sont. La dérobade, c’est beaucoup mieux, plus sécurisant, et surtout plus facile. Une pirouette, puis l’on s’en va le cœur léger et la conscience tranquille en se disant qu’il y a bien quelque part un cheikh pour vous soulager et vous dire qu’il pense à vous la nuit avant de s’endormir… Liberté, que de crimes commis en ton nom.
La loi, tout le monde s’en fout. Et l’important ce n’est plus la rose, mais l’épine. On ne compte plus les messieurs ceci et les messieurs cela, et du propre au figuré, on est vite passé. C’est sûr, les hommes valeureux existent, mais ils ne le disent pas. Les hommes courageux eux aussi existent, sauf qu’on ne les voit pas. Alors quand un Monsieur Tabib vient interpeller nos consciences, on lui dit chapeau bas. Le Président de la République est-il de cette trempe-là ? Si le courage se mesure aux envolées lyriques et aux logorrhées qui ne mènent nulle part, c’est à coup sûr notre homme.
Rafaa Tabib, enfin un homme dans la salle. Un vrai cette fois-ci. Et c’est Abir Moussi qui devrait être rassurée : elle n’est plus désormais le seul homme dans la salle à donner de la voix. Finalement, qu’est-ce qui est le plus important pour ce pays ? Roger Martin du Gard nous donne la réponse : ce qui importe réellement est de choisir ce qu’on doit oublier…Sommes-nous prêts à le faire, quand tout autour ce n’est que rancœur, haine et crimes sans châtiment ? Choisir, mais comment ?