Collectivement, nous avons tendance à croire que le football est un sport « avec ballon ». Mais bien sûr que c’est un sport avec ballon, me dit-on!
Pour affirmer cette croyance, nous pouvons dire, avec provocation, que dans le football il est question de personnes qui courent derrière un ballon, le manipulent et le poussent ensuite, par terre ou dans les airs, vers des destinations diverses, délimitées par un rectangle.
De même, une majorité parmi nous pourraient penser que les personnes, pratiquant ce sport, sont majoritairement dénuées d’intelligence.
Je vous propose quelques éléments de réflexion qui pourraient installer un doute dans ces croyances. Cela pourrait aussi vous donner l’envie d’appeler quelques amis pour vous initier au football, sport collectif le plus populaire au monde (source internet).
Aujourd’hui, avec les outils statistiques et technologiques disponibles, nous pouvons tout savoir, a posteriori, sur ce que les joueurs pourraient avoir comme activité sur un terrain de football. La diversité des métriques et statistiques, sur les sites spécialisés, le prouve. Un exemple de données disponibles pour chaque joueur de football, lors d’un match:
- Balles jouées, interceptées ou récupérées;
- Passes réussies et décisives;
- Le nombre de tentatives;
- Kilomètres parcourus;
- Dégagements, tacles et arrêts.
Arrêtons-nous un moment sur la variable statistique qu’est « le nombre de balles jouées »
Les joueurs identifiés comme ayant un très gros volume de jeu, ou bien une participation importante dans l’animation du jeu de leurs équipes, ont globalement un comptage de balles touchées, lors d’un match de 90 minutes, qui pourrait varier entre 110 et 160 fois (c’est une fourchette large). Ce sont souvent des joueurs de milieu de terrain, aussi bien en phase de récupération défensive qu’en phase de relance vers l’attaque.
Voici quelques données affirmant notre démarche (source internet):
Quant au temps pendant lequel un joueur garderait effectivement le ballon, à chaque séquence, il pourrait varier entre 2 et 5 secondes.
Par un calcul mathématique, et en utilisant les valeurs maximales des deux précédentes mesures (nombre de balles touchées et nombre de secondes en possession du ballon), il serait simple d’identifier le temps effectif qu’un joueur de football pourrait passer sur le terrain en possession du ballon, lors d’un match de 90 minutes. C’est globalement 800 secondes (160 x 5), pour les joueurs ayant le plus gros volume de jeu.
Un maximum de 13 minutes de jeu avec ballon pour le joueur le plus impliqué dans le jeu. Soit uniquement 15% du temps d’un match de football. Inversement, pendant 85% du temps de jeu le joueur dépenserait son énergie. Il consacrerait son activité au jeu sans ballon.
Ces calculs sont largement surestimés. Car, on associe aux joueurs de milieu de terrain les rapports obtenus, 15% et 85%. Pour le reste de l’équipe, ce calcul serait beaucoup plus défavorable pour le jeu avec ballon.
Par conséquent, le football est un sport, dont au maximum 15% du temps est avec ballon. Il est au minimum 85% du temps sans ballon.
Cela apporterait certainement un doute important à nos croyances. Il nous pousserait à nous questionner sur le fonctionnement actuel dans la formation et la transmission des apprentissages aux futurs jeunes footballeurs.
Qu’en est-il de l’intelligence dans le football?
Nous pouvons aborder le sujet à travers l’expérimentation suivante.
Imaginez qu’il vous est demandé de consacrer 85% de 90 minutes de votre temps à courir et à répéter des efforts à une haute intensité, à traiter beaucoup d’informations, à observer les déplacements de 21 autres joueurs, à vous activer et à anticiper, à vous concentrer et à vous relâcher, à préparer votre prise de décision avant d’exécuter un geste technique ou de faire un choix de jeu.
Il vous est également demandé de ne pas vous résigner pendant cette période, à accepter de faire des erreurs et d’apporter les corrections dans les séquences d’après, à rester motivé et lucide, à être créatif et à tenter l’improbable, à être à l’écoute de votre corps et à féliciter vos collègues en réussite, à vous approprier même leur bonheur et le partager naturellement. Tout cela avec le plaisir d’être engagé individuellement et collectivement dans ce projet sportif.
Rares seraient les personnes qui pourraient faire cela pendant des années et avec un aboutissement positif. Ce qui vous est demandé fait appel à des formes d’intelligence diverses, méconnues par certains.
L’intelligence d’une personne jugée à travers les prismes de la logique mathématique
En effet, nous avons tendance à juger l’intelligence d’une personne à travers les prismes de la logique mathématique (le raisonnement logique et l’esprit ordonné; intelligence logique/mathématique) et de celui de l’expression, de la lecture et de l’écriture (sensibilité aux structures linguistiques sous toutes ses formes; intelligence verbale/linguistique).
La théorie des intelligences multiples de Howard Gardner a démontré que nos formes d’intelligence sont multiformes. Elles sont au nombre de huit. Nous en développons plusieurs, en lien avec notre cadre de vie, notre éducation, nos parcours, nos expériences personnelles et nos apprentissages. Ainsi, pour chacun, des formes d’intelligence s’affirmeraient et d’autres s’affaibliraient, quand moins sollicitées.
Dans nos habitudes de jugement primaire, nous en évaluons globalement deux (à travers les tests de QI et autres). Par conséquent, nous en ignorons les six autres formes, par omission ou méconnaissance.
Afin de pouvoir réaliser ce que nous venons d’évoquer, dans l’expérimentation proposée initialement, un sportif de haut niveau doit être doté d’un alignement de plusieurs formes d’intelligence. Et qu’il est censé développer tout au long de son parcours de formation footballistique: l’intelligence kinesthésique, l’intelligence émotionnelle, l’intelligence interpersonnelle, l’intelligence intrapersonnelle, l’intelligence visuelle/spatiale et l’intelligence musicale/rythmique.
Intelligence cognitive
Pour ma part, j’ajouterais une 9e forme d’intelligence issue des dernières recherches en neurosciences. Il s’agirait de l’intelligence cognitive: la capacité du cerveau à se réorganiser pour capter et traiter un volume important d’informations. La capacité à exploiter la vision périphérique. Les capacités d’attention et de concentration et enfin la souplesse mentale.
Développer ces formes d’intelligence ne devrait pas empêcher de porter une attention particulière à l’évolution de l’intelligence logique et de l’intelligence linguistique.
En effet, le centre de formation de football n’est autre qu’une « école de vie ». C’est une expression que j’apprécie de mon professeur d’éducation physique et sportive M. Jamel Eddine Idriss.
Il y a une vie pendant le parcours sportif. Il y a aussi une continuité de vie à la suite du parcours sportif. Cette vie se construit avec un objectif d’auto-réalisation du footballeur et du sportif en général.
La préparation mentale est aujourd’hui l’un des piliers de la formation des sportifs. Elle permet également d’activer et de développer les formes d’intelligence citées. Son objectif est de favoriser aussi bien l’auto-appropriation du projet sportif que l’autodétermination de nos jeunes.
Au plaisir d’échanger avec vous au sujet de la mise en pratique opérationnelle de la préparation mentale dans vos structures sportives. Ainsi que de son articulation avec les autres formes de préparation (physique, technique, tactique, etc.)