Le Forum tunisien des droites économiques et sociaux (FTDES) vient de rendre public aujourd’hui un rapport. Il s’intitule: « Deux mois de lutte contre la Covid-19 en Tunisie: Analyse en matière d’État de droit ».
En effet, à l’instar d’un grand nombre de pays, l’Etat tunisien adoptait de nombreuses mesures exceptionnelles. Et ce, dans le cadre de la lutte contre la pandémie du Covid-19. Elles eurent un impact direct ou indirect sur les principes de l’Etat de droit et sur les droits humains. La récente démocratie tunisienne se trouva confrontée à un double défi: lutter contre l’épidémie de Covid-19; tout en préservant sa transition démocratique.
Dans ce contexte, des associations de la société civile assurèrent la documentation des incidences des mesures d’urgence prises par le gouvernement sur les droits humains. Et elles recensèrent les dépassements liés à leur mise en œuvre. Elles publient ce jour le rapport intitulé « Deux mois de lutte contre la COVID-19 en Tunisie: Analyse en matière d’État de droit ».
Ainsi, selon le FTDES, le rapport porte sur la légalité des principales mesures restrictives de liberté prises par les autorités. De même que sur leur conformité à la Constitution ainsi qu’aux lois en vigueur.
Car, ces mesures découlent de certaines dispositions constitutionnelles, utilisées pour la première fois dans l’histoire post-révolutionnaire de la Tunisie. Avec notamment l’activation de l’article 80 de la Constitution. Lequel instaure l’état d’exception malgré l’absence de Cour Constitutionnelle. Ainsi que l’article 70 permettant à l’ARP d’habiliter le Chef du Gouvernement à adopter des décrets-lois. Et ce, pour une période ne dépassant pas les deux mois.
Par ailleurs, les associations membres de l’Alliance pour la Sécurité et les Libertés (ASL), proposent plusieurs autres recommandations. Puisqu’elles sont soucieuses d’assumer leur rôle de suivi et de protection du processus de transition démocratique. Tout en étant convaincues que la crise pandémique pose un sérieux défi à la construction de l’Etat de droit en Tunisie. Notamment à cause du retard dans la mise en place des instances constitutionnelles et dans l’adoption des réformes du secteur de la justice et de la sécurité. Et ce, afin que l’Etat tunisien puisse se doter d’’un cadre de réponse à de telles crises; en préservant les droits et les libertés des citoyens.
Recommandations pour préserver la liberté des citoyens
Ces recommandations sont donc:
- Adopter un nouveau cadre législatif organisant l’état d’urgence en tant que priorité. Pour protéger les droits et libertés des citoyens en conformité avec les dispositions constitutionnelles;
- Adopter une approche participative davantage structurée Laquelle implique à la fois les acteurs de la santé et des droits humains. Permettant ainsi à la société civile d’apporter une contribution plus informée, et donc plus pertinente, dans le cadre des mesures prises par les autorités;
- Assurer le respect des principes de bonne gouvernance et de transparence lors de la gestion des crises;
- Mettre en place la Cour constitutionnelle et les autres instances prévues par la Constitution. Pour que l’architecture institutionnelle vienne réduire les menaces à la transition démocratique;
- Consolider l’indépendance du Conseil Supérieur de la Magistrature. Et accélérer les réformes de la justice pénale destinées à la protection des droits et libertés des citoyens;
- Maintenir un taux de population carcérale bas en conformant les lois pénales à la Constitution. Et en mettant un terme définitif à l’utilisation quasi-systématique de la détention préventive.
En outre, les associations signataires rappellent que l’Assemblée des Représentants du Peuple examinera les décrets-lois adoptés au cours de la période de délégation de pouvoir. Ces décrets-lois sont au nombre de 34. Et ce, après l’expiration de la période d’habilitation accordée par le Parlement au Chef du Gouvernement.
Au final, les organisations soulignent qu’elles se tiennent à la disposition des députés. Et ce, afin de partager de manière plus approfondie leurs analyses des décrets-lois. En vue de leur mise en conformité avec la Constitution et les obligations internationales de la Tunisie.