Une partie de la classe politique a fait, de nouveau, preuve qu’elle est en train de conduire le pays vers la faillite. La loi sur le recrutement exceptionnel des personnes au chômage depuis plus de 10 ans est totalement déconnectée de la réalité d’une économie qui agonise. Cette législation, inapplicable, va encore discréditer toute la classe politique, ceux qui l’ont voté en premier.
Le problème dépasse les aspects formels sur lesquels le chef du gouvernement sortant a mis l’accent dans sa lettre à l’ARP. Dans un pays où la masse salariale de la fonction publique frôle les deux tiers des ressources propres du budget de l’Etat, nous devons y penser à deux fois avant de songer à une telle initiative.
D’ailleurs, cette loi va à l’encontre d’autres textes votés il y a deux semaines. Les mécanismes du crowdfunding et de l’Economie Sociale et Solidaire visent essentiellement à élargir le spectre de l’initiative privée et à améliorer le taux de réalisation des idées de projets. Avec la digitalisation de l’administration et de l’économie, il y a de vraies opportunités à exploiter capables d’absorber une partie des personnes au chômage. Malheureusement, l’entrepreneuriat n’a aucune importance pour la majorité de nos jeunes, y compris les docteurs en dépit de leur niveau intellectuel théoriquement élevé.
Cela ne veut pas dire que nous ne comprenons pas la colère de ces chômeurs et leur situation sociale compliquée. Plusieurs d’entre eux sont des chefs de familles ou ont des personnes à charge, ce qui réduit leur appétit au risque. Ils ont besoin de ressources stables mais le problème est que cette loi ne va pas leur apporter la solution. Il faut d’autres pistes qu’il faut explorer au lieu de saisir les solutions les plus simples.
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Nous sommes donc entre le marteau et l’enclume. Le risque est de créer cette culture de la non-initiative récompensée. Pourquoi demander aux jeunes de prendre des risques, de se lancer dans leurs projets alors qu’on pourra compter sur les ressources de ses parents ou travailler hors la loi jusqu’à cumuler 10 ans d’ancienneté et accéder directement à un poste de la fonction publique ? Au bout de quelques années, nous risquons de doubler le nombre des fonctionnaires à l’ère de la digitalisation.
Plus grave encore. Cette loi est votée alors que le pays dépend plus que jamais des ressources extérieures. Comment négocier avec le FMI à qui, trois ans auparavant, nous avons promis une masse salariale à 12% du PIB ? Il y a eu la Covid-19 entre-temps, mais ce n’est plus opposable comme argument. Maintenant, résoudre cette question sera la clé de tout nouvel accord. Parce qu’aucune institution financière n’acceptera de nous prêter de l’argent pour payer des fonctionnaires. Cela met même en danger tous ceux qui occupent aujourd’hui des postes. Car, tôt ou tard, l’Etat sera incapable de payer les salaires.
Il ne faut plus demander aux autorités de baisser la pression fiscale. Car il est impossible de maîtriser les dépenses de gestion. L’Etat continuera à étouffer le marché financier en accaparant la plus grande partie de la liquidité. Nous n’allons jamais pouvoir briser ce cercle vicieux si cet amateurisme ne s’arrête pas.