Alors que la session du contrôle de l’examen du Baccalauréat a pris fin et les travaux de correction ont repris aujourd’hui après une courte pause, les résultats de la première session doivent être interprétés plus profondément. Les disparités régionales historiques se sont aggravées et les autorités continuent à montrer leur incapacité à les réduire. Ce n’est qu’une autre face des écarts du développement régional.
Pour cette année, nous retrouvons Sfax, Monastir, Ariana et Sousse aux commandes du Baccalauréat. Alors que les cinq dernières places ont été réservées à Kairouan, Gafsa, Kébili, Tozeur et Tataouine. Trois principaux facteurs expliquent cette situation et il faut en parler en toute franchise.
Il y a d’abord la question du niveau de vie moyen par région. Réussir son Baccalauréat passe, malheureusement, par des investissements massifs en cours particuliers. Dans les grandes villes, on fait travailler les élèves et on les encadre au maximum. Afin d’améliorer leurs notes, s’inspirant du principe qu’à force de forger, on devient forgeron.
Cependant, dans les zones moins favorisées, on se contente généralement, et au mieux, du soutien scolaire dans les établissements publics. Ici, nous ne mettons pas en doute la qualité intrinsèque des enseignants. Mais il faut reconnaître que les programmes sont tellement chargés que les terminer dans les délais est en lui-même un succès.
Les professeurs ne parviennent pas à trouver suffisamment de temps pour multiplier les exercices. Car les conditions sociales et financières de la majorité des élèves ne leur permettent pas de suivre un tel rythme.
Conditions de travail
Le second élément est les conditions dans lesquelles le cadre enseignant travaille. Généralement, ceux qui occupent des postes dans les gouvernorats intérieurs, et les moins performants, y sont rarement installés.
Ils sont souvent en phase transitoire (appelé période de roulement). Leur premier souci est d’effectuer un rapprochement familial le plus tôt possible. Un enseignant est, en fin de compte, un être humain et il a sa propre vie. Comment lui demander de faire un effort supplémentaire alors qu’il est instable ? C’est une grande problématique à laquelle il faut sérieusement penser.
Enfin, il y a l’absence de motivation chez les élèves. Dans ces régions, le chômage est élevé et on manque de success stories qui servent de bons exemples. A quoi sert d’obtenir un diplôme universitaire ? Bien que la réalité puisse être totalement différente et qu’un parcours réussi soit possible. Il faut aller les convaincre de cela. L’absence de cet engouement pour aller plus loin dans sa vie est un handicap majeur pour la réussite des élèves et leur capacité s’assimilation.
2021 ne serait pas différent
Ces problèmes sont tellement structurels qu’il ne faut pas espérer un changement rapide. Maintenant, on va se diriger vers tout ce qui est digital. Ce qui va encore sanctionner les élèves des gouvernorats qui manquent d’infrastructures. Avant de penser à ce genre d’évolution, il faut s’assurer de l’égalité des chances. Parce que plus on modernise les processus, plus les divergences s’accentuent.
Par ailleurs, et avec ce qui se passe actuellement, l’année prochaine sera marquée par davantage de disparités. Dans les différentes régions aisées, les lycéens sont en train de suivre des cours particuliers intensifs. Et ce, pour achever les programmes de l’année dernière écourtée par la Covid-19. Dès la rentrée, les enseignants vont découvrir des élèves qui assimilent à deux vitesses et on se donne rendez-vous pour les résultats du Baccalauréat 2021 pour confirmer ces estimations.
La solution commence par un allègement des programmes. De sorte à se focaliser sur l’essentiel et sur les aspects pédagogiques. Il faut passer à un nouveau modèle dans lequel la charge de travail de l’élève et des enseignants soit réduite de sorte à éviter, au maximum, le décrochage scolaire. Cela n’est pas difficile à mettre en place, mais c’est encore une fois le courage qui manque.