Il est fort probable que les prochains pourparlers à Genève, puis au Maroc, entre les deux rivaux du conflit libyen, se déroulent sans la présence de Fayez el-Sarraj, ni du maréchal Haftar. Et ce, suite à la démission hier soir du chef du gouvernement d’Union nationale. Ainsi, les cartes semblent brouillées en Libye, sous la pression internationale. Affaire à suivre.
Coup de tonnerre dans le ciel libyen, où la démission inattendue du Premier ministre Fayez el-Sarraj surprend même son propre entourage.
En effet, le chef du gouvernement d’Al Wifak al Watani, reconnu par la communauté internationale, annonçait la démission à venir de son gouvernement. Au plus tard fin octobre. Et ce, via une intervention télédiffusée dans la nuit du mercredi 16 septembre.
Ainsi, il appelle le comité de dialogue à nommer très rapidement un nouveau gouvernement. Et ce, pour céder la place à un nouvel exécutif issu des pourparlers inter-libyens. Sachant que des réunions de ce comité doivent avoir lieu prochainement à Genève, sous l’égide de l’ONU. Avant de nouvelles discussions au Maroc, à la fin du mois prochain.
Vers une transition « pacifique »
Dans ce contexte, les commissions chargées de former le prochain gouvernement doivent « choisir un nouveau Conseil présidentiel. Et nommer un nouveau chef de gouvernement qui prenne ses fonctions de manière pacifique ». C’est ce que soulignait Fayez al-Sarraj.
Par ailleurs, revenant sur le bilan de son gouvernement d’Union nationale, il a rappelé: « Nous n’avons pas travaillé dans des conditions normales. Nous étions la cible de complots internes et venant de l’étranger. »
Et d’accuser, sans le nommer, Khalifa Haftar de « miser sur la guerre pour arriver illégalement à ses fins ».
Cependant, il est évident que le chef du gouvernement démissionnaire cherche une issue politique à la crise que connaît la Libye. Et ce, depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi, en 2011. « J’annonce à tous mon souhait sincère de céder mes fonctions à un prochain pouvoir exécutif avant fin octobre au plus tard ». C’est ce qu’il déclarait encore lors de sa brève allocution télévisée.
« Difficultés insurmontables »
Car, dans une crise politique extrêmement tendue et polarisée, le chef du gouvernement sortant a manifestement cherché à trouver « le plus de consensus possible » entre les différentes parties. « Mais les difficultés étaient insurmontables », a-t-il reconnu. Puisque « certaines parties s’obstinent à parier sur la solution militaire pour servir leurs objectifs », constate-t-il avec amertume.
Pour rappel, depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011, la Libye est scindée en deux entités. D’un côté, la Tripolitaine du gouvernement de Sarraj. Elle a pour base Tripoli et est reconnue par l’ONU. Et de l’autre, la Cyrénaïque du maréchal Khalifa Haftar, qui règne sur l’Est et une partie du Sud, le Fazzan.
L’issue de la guerre fratricide bascule en avril 2019. Quand le maréchal Haftar lance, avec le soutien de l’Égypte, des Émirats Arabes Unis et de la Russie, une offensive contre la capitale. Mais au bout de 14 mois de combats meurtriers, ses troupes subissent une humiliante défaite face aux forces pro-GNA. Pour rappel, ces forces ont bénéficié de l’aide militaires de la Turquie.
Pas de solution militaire
Ayant pris conscience que la solution militaire est sans issue, les belligérants, contraints de trouver une solution politique à la crise libyenne, ont retrouvé le chemin du dialogue. Ils se sont par la suite rencontrés parallèlement à Montreux en Suisse, du 7 au 9 septembre. Et à Bouznika, au Maroc, du 6 au 10 septembre.
Ce qui semble certain, c’est que les prochains pourparlers prévus à Genève et au Maroc se feront en présence d’Aguila Saleh, chef du parlement installé à l’Est et Khalid al Michri, président du haut Conseil de l’État à Tripoli. Ils signeront probablement un accord politique, mais sans Fayez el-Sarraj et sans Khalifa Haftar non plus.