Le paysage politique actuel de la Tunisie est fragmenté. Cette fragmentation ne fait que s’aggraver d’une élection à une autre. En même temps la situation économique, financière et sociale de notre pays se détériore au point de constituer une sérieuse menace pour l’expérience de la transition démocratique. Et une sérieuse menace pour la souveraineté même de la Tunisie. Les deux ensemble, c’est à dire la fragmentation politique et la crise économique constituent un piège, un véritable cercle vicieux qu’il faut impérativement chercher à briser.
En effet, je ne reviendrai pas sur la situation économique, financière et sociale que j’ai eu l’occasion de décrire à plusieurs reprises. Mais je soulignerais quand même que cette crise grave peut maintenant dégénérer en crise sociale dont la gestion serait bien plus compliquée. Mais il ne faut surtout pas mettre les performances annoncées un certain samedi 15 août 2020 par l’INS sur le compte de la Covid-19. La Covid-19 a certainement contribué à enfoncer davantage le pays dans ses difficultés. Mais c’est surtout notre gestion des affaires publiques qui en est responsable.
Que faire donc face à cette crise économique ?
D’ailleurs, je constate qu’il y a plusieurs propositions faites ici et là. Il faudrait prendre ces propositions au sérieux et voir ce qui peut être mis en oeuvre rapidement.
Pour ma part, je pense qu’il est urgent de commencer par ce que j’ai depuis plusieurs années appelé « arrêter l’hémorragie ». Il faut mettre un terme à cette détérioration continue de nos principaux indicateurs économiques, financiers et sociaux. Ceci peut être fait de manière efficace à travers un plan d’ajustement structurel dont l’exécution ne prendrait pas plus de 18 à 24 mois.
En effet, il faudrait ensuite engager de grandes réformes structurelles visant à transformer l’économie tunisienne et la remettre sur une nouvelle orbite de croissance, de création de richesses et d’emplois réels.
Voici quelques pistes.
1- Mettre en place une stratégie de formalisation du secteur informel. Ce secteur informel constitue aujourd’hui une très forte menace pour la Tunisie tout entière. Et pas seulement son économie et ses finances. Nous pouvons le faire en baissant les barrières à l’entrée, toutes sortes de barrières.
2- Miser sur les TPE et les PME (très petites, petites et moyennes entreprises). Pour cela il faudrait réduire sérieusement la bureaucratie, améliorer l’environnement de l’investissement, faciliter l’accès au financement par des programmes spécifiques. Les banques devraient être forcées à ne plus être des banques rentières qui financent le déficit du budget de l’État. Elles devraient revenir rapidement à leur rôle fondamental. Qui consiste à mobiliser les ressources et à financer l’économie, et donc les entreprises.
3- Développer et mettre en oeuvre un vaste programme de lutte contre la précarité sociale et la pauvreté rampante avec son lot d’analphabétisme croissant. Ce programme doit impérativement s’accompagner d’un programme de réduction des subventions qui profitent aux citoyens aisés.
4- Entreprendre une refonte totale du code du travail. Pour que les entreprises recrutent facilement, il faudrait qu’elles aient la possibilité de licencier facilement en cas de difficultés économiques. Il faudrait aussi réhabiliter l’entreprise et arrêter de la stigmatiser. L’entreprise est le centre de la création d’emplois et de richesses.
5- Entreprendre une refonte totale du code des changes. Il est important de signaler que notre code des changes date de 1976, et qu’en 1976 il avait été copié sur le code des changes français de 1946. Si la Tunisie n’arrive pas à titre d’exemple à intégrer « PayPal », et que toutes les tentatives depuis plus de cinq ans ont échoué, c’est entre autres à cause de notre code des changes.
– Le système d’éducation nationale;
– Le système de santé;
– La justice;
– La sécurité;
– Les finances publiques;
– Les entreprises publiques;
– L’environnement de l’investissement.
7- La Covid-19 a joué en Tunisie le rôle de révélateur. Révélateur de faiblesses, mais aussi d’opportunités. Il existe aujourd’hui des opportunités colossales pour la Tunisie. Ces opportunités ne peuvent être saisies que dans le cadre d’une volonté politique de « transformation digitale de toute la Tunisie ».
De la nécessité de saisir les opportunités
Par ailleurs, des opportunités colossales se trouvent actuellement dans des domaines comme l’agriculture, la santé, l’éducation, la voiture électrique, les équipements industriels orientés vers le secteur de la santé, etc.
Tout ceci nécessite, de toute évidence, des moyens financiers énormes. Si la Tunisie ne peut plus aujourd’hui accéder au marché financier international, elle doit pouvoir trouver / inventer ces ressources à l’intérieur du pays par divers moyens. En effet, des propositions sérieuses existent. Elles peuvent être mises en oeuvre si la Tunisie réussit à pacifier sa scène politique et à en réduire la fragmentation.