Le projet de loi relatif à la répression des atteintes contre les forces de sécurité sera soumis demain à l’examen à la plénière de l’ARP. Il soulève déjà une vive polémique. Ses détracteurs craignent que cette loi controversée renforce la culture de l’impunité. Et ne donne le feu vert aux forces de sécurité pour recourir à une force disproportionnée.
C’est un vieux et éternel débat. Comment trouver la formule magique? Celle qui permet de concilier, d’une part la défense de ces hommes et femmes qui sont en première ligne pour nous protéger contre les criminels et les terroristes; et la défense légitime de nos libertés fondamentales, d’autre part? C’est dans ce contexte qu’il faut placer la polémique sur le projet de loi relatif à la répression des atteintes contre les forces de sécurité. Il est actuellement en phase d’examen en plénière à l’Assemblée des représentants du Peuple.
Un projet de loi réactivé
Déjà, ce fameux projet de loi avait été soumis au vote à l’ARP en avril 2015. Puis, il fut délaissé pendant cinq ans. Avant d’être approuvé en juillet 2020 par la Commission de la législation générale au Parlement.
Ainsi, cette semaine, les députés examineront ce projet de loi, dans sa version amendée, durant la plénière du 8 octobre.
Bataille devant l’hémicycle
Mais avant même son examen à l’hémicycle, la bataille a commencé dans la rue. En effet, en signe de protestation, des activistes de la société civile se rassemblaient, hier mardi, devant le palais du Bardo. Les forces de l’ordre ont violemment chargé les manifestants. de même qu’elles ont arrêté ceux qui refusaient de quitter leur rassemblement, somme toute pacifique.
Sachant que, dans ce contexte de veille d’examen en plénière, Amnesty International appelle l’ARP à rejeter le projet de loi sur la répression des atteintes contre les forces armées.
La société civile monte au créneau
En effet, l’ONG estime que le projet de loi est de nature « à renforcer l’impunité des forces de sécurité. Et la protège de toute responsabilité pénale en cas d’usage disproportionné de la force pour protéger les établissements sécuritaires ». C’est ce qui ressort d’une déclaration rendue publique lundi 5 octobre.
Car, « s’il est adopté, ce projet de loi ne ferait que renforcer la culture de l’impunité. Il donnerait le feu vert aux forces de sécurité pour utiliser la force comme elles l’entendent; sans craindre d’être tenues pour responsables ». Ainsi alerte Amna Guellali, directrice régionale adjointe de l’ONG pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord.
D’autre part, lors d’une conférence de presse en ligne, de nombreuses associations de la société civile revenaient sur plusieurs sujets, dont ce projet de loi « dangereux ». Ce sont: l’Association tunisienne des femmes démocrates (ATFD); le Syndicat national des journalistes tunisiens (SNJT); Al-Bawsala; et l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT).
Puisque « ce texte veut assurer une protection spéciale à ces agents. Alors qu’ils sont déjà protégés conformément aux dispositions du Code pénal, en tant que fonctionnaires du public. Pour protéger ces agents, il faut plutôt préserver leurs droits sociaux et économiques. Les protéger, eux et leurs familles, contre les dommages qu’ils peuvent subir en cas d’attentat terroriste. Mais, en vérité, ce texte confère une immunité totale contre toute responsabilité pénale pour les bénéficiaires. Et viole, par son contenu, l’article 21 de la Constitution », indique la présidente des Femmes démocrates, Yosra Frawes.
Pour ce qui est des partis politiques, le Courant Démocratique estime que ce projet de loi rouvrira la porte à la répression des citoyens. Affirmant donc qu’il ne votera pas en sa faveur.
Et la liberté de la presse?
En revanche, le PDL se montre favorable à un projet de loi protégeant les sécuritaires. En proposant un article qui « punit pour une période de trois mois à trois ans de prison toute personne qui touche à l’honneur et à la réputation des forces de sécurité intérieure et de la douane; salit leur honneur ou leur intégrité morale. Dans l’objectif de toucher à leur moral par la parole, le geste, la photo ou l’écriture. Et répand cela par quelque moyen de diffusion que ce soit; à travers un organe de diffusion ou de distribution quelque soit le support. »
Bigre! Et la liberté de la presse dans tout cela? Car, si cet article était pris en compte, cela voudrait dire qu’un simple post FB signalant un abus policier, équivaudrait pour son auteur à une peine de prison.
Cela fait froid dans le dos rien que d’y penser…