La pandémie de la Covid-19 a touché quasiment tous les pays du monde. Mais la différence entre un pays et un autre réside dans la manière avec laquelle la crise générée par la Covid-19 a été gérée sur les plans économique, financier et social.
Avec la crise de la Covid, plusieurs pays ont bien compris que la priorité absolue est à la préservation des emplois, des entreprises et donc de l’économie. Ils ont compris que c’est une erreur grave de placer le virus au centre des préoccupations des autorités. Le centre des préoccupations doit être l’homme, le citoyen avec sa santé qui doit être placée au-dessus de tout. Mais sans oublier les autres aspects essentiels de la vie du citoyen: son travail, son revenu, l’approvisionnement du marché, l’éducation de ses enfants, ses économies, sa retraite, etc.
Ils ont donc bien compris qu’il fallait baisser sensiblement les taux d’intérêt et qu’il fallait surtout injecter les liquidités nécessaires dans l’économie afin d’éviter que la consommation ne baisse et que les entreprises et les emplois ne soient menacés, même si cela pourrait se traduire par un regain d’inflation. Mais l’expérience sur le terrain montre clairement qu‘il n’y a pas eu de regain d’inflation.
En Tunisie nous avons clairement mal géré la crise des points de vue économique, financier et social. Nous avons donné la priorité à la maîtrise de l’inflation. La conséquence est que nous avons perdu des milliers d’entreprises étouffées par l’absence de liquidités. Nous avons perdu des centaines de milliers d’emplois. Et nous avons étouffé notre économie. Tout cela pour maintenir ou faire baisser légèrement le taux d’inflation.
Depuis le mois d’avril nous avions proposé de gérer la crise autrement. Nous avions appelé à baisser sensiblement le taux directeur de la BCT et à injecter entre 15 et 20 milliards de liquidités supplémentaires dans l’économie en rassurant les autorités monétaires que cette injection ne se traduirait pas par une hausse du taux d’inflation. Les analyses le montrent bien.
A situation exceptionnelle il faut des solutions exceptionnelles.
Une telle injection aurait permis de mettre à la disposition du système bancaire et financier des liquidités nouvelles de l’ordre de 7 à 8 milliards de Dinars qui seraient utilisées pour financer les entreprises, au lieu de financer le déficit du budget de l’État.
En effet, une telle injection aurait mis à la disposition du budget de l’État des liquidités supplémentaires de l’ordre de 7 à 8 milliards de Dinars qui auraient servi à sortir l’État de la situation embarrassante dans laquelle il se trouve actuellement en payant ses fournisseurs privés (800 millions de Dinars) et en payant les sommes dues par l’État envers ses entreprises publiques (6,2 milliards de Dinars).
Cette injection de liquidités proviendrait du rachat par la BCT de l’ensembles des bons du Trésor détenus par les banques (entre 15 et 20 milliards de Dinars). Cette dette de l’État serait transformée en dette à très long terme (30 à 40 ans) avec un délai de grâce de 10 ans par exemple.
Une telle injection serait accompagnée de deux mesures essentielles: la rationalisation des dépenses de l’État et des importations. Un tel programme serait de nature à relancer la machine de l’économie tunisienne totalement étouffée et grippée aujourd’hui.
Une telle idée dérange, je le sais. J’invite la Banque Centrale de Tunisie à se débarrasser de ce dérangement et à considérer sérieusement la manière avec laquelle les banques centrales et les gouvernements autour du monde ont géré la crise de la Covid-19.
J’invite notre Banque Centrale à rattraper le coup et à sauver ce qui reste de nos entreprises, de nos emplois et de notre économie. La Covid-19 va probablement rester avec nous pour quelque temps encore. Ayons le courage de penser qu’à situation exceptionnelle il faut des solutions exceptionnelles.