Le régime algérien est malade. L’état de santé de ses présidents successifs en est comme un symbole. Après avoir été spectateur de l’incapacité de gouverner de l’ex-président Abdelaziz Bouteflika durant les dernières années de son règne. Le peuple algérien a appris le transfert du chef de l’Etat, Abdelmadjid Tebboune, vers un hôpital allemand. Alors qu’un grand flou entoure encore les raisons de son hospitalisation.
Dans le même temps, en Algérie, les Algériens étaient appelés à se prononcer sur une révision de la Constitution censée clore l’épisode historique du « Hirak ». Un mouvement qui appelle à un changement … qui ne vient pas.
L’appel au changement
Derrière un résultat officiel flatteur (faisant état d’une victoire du oui à 66,8 %), le référendum constitutionnel a bénéficié d’un taux de participation particulièrement faible (près de 24 %). Preuve que la contestation populaire portée par le « Hirak » est encore vivace dans la population. Une colère sourde et souterraine anime encore et toujours la société algérienne. Le pacte social de l’après « décennie noire » s’est progressivement fissuré.
Et pour cause, ses causes sont profondément enracinées dans la réalité politique, démographique, socio-économique et sociétale du pays. Certes, la force et la soudaineté des manifestations ont surpris les observateurs et les acteurs politiques.
Toutefois, derrière l’apparence d’un prétendu phénomène spontané, les récentes manifestations ont des racines profondes. Et l’apparente stabilité et le semblant de paix civile ne sauraient masquer une réalité plus sombre.
Car, en Algérie, la tension sociale est nourrie par une corruption et un chômage structurels; dont la principale victime est une jeunesse désespérée par l’inefficacité d’un « modèle de développement ». Lequel se caractérise par une dépendance continue aux hydrocarbures.
Si la rente pétrolière a permis la construction d’infrastructures et de logements, la crise du logement demeure une réalité sociale algérienne. Que dire des services sociaux-sanitaires…
Un enjeu géopolitique pour le Maghreb
En effet, l’Algérie a une histoire à part, dont la charge symbolique est exceptionnelle. Le prestige lié à la guerre d’indépendance (1954-1962) a permis à ses leaders de s’afficher parmi les forces du tiers-monde et sur les rangs des Non-alignés.
La « République algérienne démocratique et populaire » a rayonné sur la scène internationale en s’imposant comme leader du monde arabe et du tiers monde en général; à travers les figures présidentielles de Ben Bella et de Boumediene… Si cette aura a décliné aujourd’hui, l’Algérie demeure un acteur essentiel de l’équilibre géopolitique maghrébin.
La nouvelle séquence de la politique intérieure algérienne risque d’ouvrir une période d’instabilité nourrie par les éléments constitutifs du paradoxe algérien. A savoir: un pays riche de sa jeunesse et de ses ressources naturelles; mais gangrené par la corruption et les inégalités sociales.
Un paradoxe source d’instabilité interne, mais aussi géopolitique. Ainsi, c’est la stabilité de la région de l’Afrique du Nord et subsaharienne qui se joue en partie. A travers l’avenir d’un pays central, à la fois le plus grand et le plus peuplé du Maghreb, première puissance militaire de la région…
Si les relations avec le Maroc sont toujours aussi compliquées, la relation bilatérale avec la Tunisie relève encore du partenariat stratégique. Les deux pays sont liés par un intérêt commun sur le plan sécuritaire. Celui-ci se traduit par une coopération très étroite dans la lutte contre les groupes terroristes à l’intérieur des frontières. Notamment en matière militaire et sur le plan du renseignement. Et ce, à travers la sécurisation des frontières communes et des frontières extérieures avec la Libye. Du reste, les deux pays tentent de garder une position diplomatique « neutre ». Notamment par rapport à la crise politique interne du voisin libyen…