Lors de son passage hier soir sur la Wataniya 1, Rached Ghannouchi éclaircissait un point sensible. Puisqu’il déclarait, entre autres, n’avoir l’intention ni de briguer un nouveau mandat à la tête d’Ennahdha; ni de présenter sa candidature à la présidentielle de 2024. Une promesse qui n’engage que ceux qui veulent bien le croire sur parole.
Ainsi, que faut-il retenir de l’intervention de Rached Ghannouchi, chef historique d’Ennahdha et à la tête de la présidence du Parlement. En effet, il s’exprimait sur la chaîne nationale Wataniya 1, hier soir après le bulletin télévisé de 20h. Un jeu de questions/réponses animé par notre confrère Chaker Ben Cheikh. Lequel était, à notre avis, trop complaisant. Donnant à tout va du « Monsieur le président » à son hôte qui soupirait d’aise à cette appellation qui chatouillait d’évidence son égo surdimensionné.
Il est clair que, excepté l’annonce très prometteuse de l’initiative du Parlement relative à la distribution des terres non exploitées aux jeunes sans emploi, Ghannouchi s’adressait hier notamment aux sympathisants nahdaouis à propos du débat houleux au sujet de sa présidence, contestée par des membres du parti islamiste et non des moindres.
A savoir que l’animateur avait rappelé que cette interview était planifiée de longue date, mais qu’elle avait dû être reportée à maintes reprises. Et ce, à cause des engagements du président du Parlement. « Toutes les rumeurs qui circulent au sujet du timing de cette interview n’ont aucun fondement », précisait-il à ce propos.
La Tunisie, un géant enchaîné
Ainsi, le président de l’Assemblée des représentants du peuple (ARP), a annoncé une nouvelle initiative du Parlement pour distribuer des terres inexploitées aux jeunes sans emploi. « L’Etat possède beaucoup de terres domaniales. Les jeunes chômeurs auront l’opportunité d’obtenir des prêts bancaires pour travailler la terre et investir dans leur propre pays. Au lieu de recourir à l’immigration clandestine et de finir par mourir en pleine mer… La Tunisie est un géant bridé par des lois rétrogrades qui enfreignent la libre initiative et l’esprit créatif. Il est temps d’affranchir ce géant de ses chaînes », s’est-il écrié.
« Ouvrir les vannes des mentalités »
Abordant la situation économique, Rached Ghannouchi a qualifié celle relative aux finances publiques de « lamentable ». « On augmente les salaires sans qu’il n’y ait de productivité en contrepartie. Ce qui explique le déséquilibre des finances publiques. Je suis heureux d’apprendre l’ouverture de la vanne d’Al Kamour car la région de Tataouine doit profiter de ses richesses. Mais il faut ouvrir également les vannes des mentalités et de la créativité ». Assurant à l’occasion qu’il est du devoir de la banque centrale « d’aider l’Etat dans cette situation critique que traverse notre pays ».
Abordant les tiraillements au sein même de son parti, le leader du parti islamiste a assuré qu’il n’a pas l’intention « pour le moment », de se porter candidat ni à la Présidence d’Ennahdha, ni à la Présidence de la République; « dont la date est encore très lointaine ».
Une promesse… « les promesses des hommes politiques n’engagent que ceux qui les reçoivent », selon le bon mot de Charles Pasqua.
Chambres noires : « J’ai l’électricité chez moi »
Par ailleurs, face au journaliste Chaker Ben Cheikh, Rached Ghannouchi est aussi revenu sur la nature de ses relations avec le chef du gouvernement et le président de la République.
« Avec le chef du gouvernement Hichem Mechichi « nous avons des relations cordiales basées sur la concertation et la compréhension mutuelle. Idem avec le président de la République que je rencontre en moyenne une fois par mois. »
Interpelé sur les allusions de Kaïs Saïed concernant les complots perpétrés dans « les chambres noires », le chef d’Ennahdha a assuré ne pas être concerné par ces propos. « Je n’ai rien à cacher, je n’ai rien à me reprocher. J’ai de l’électricité chez moi. Je n’ai pas de chambres noires ». Ainsi a-t-il ironisé.