Deux faits d’actualité viennent de nouveau pour enraciner chez le Tunisien moyen une image de l’Italie un tant soit peu ternie par sa rudesse constatée au cours de l’été dernier. Lorsqu’elle a évoqué avec fougue l’expulsion de Tunisiens.
L’image a ceci de commun avec la terre. Elles sont toutes deux constituées de strates. Elles se construisent ainsi couche après couche pour prendre au fil du temps un aspect bien particulier. Autant dire que l’image que nous offre depuis quelque temps notre voisin italien dans ses relations avec notre pays obéit à cette logique.
Une image que le Tunisien moyen se fait à travers une actualité en fonction de son vécu du moment et de certaines valeurs. En fait d’un « code » bien spécifique qui enracine chez lui une certaine vision qui ne s’efface pas facilement.
Commençons par deux faits d’actualité qui –il faut le reconnaître- donnent une image peu reluisante de l’Italie. Un voisin avec lequel nous partageons, depuis la conquête romaine, une histoire et un patrimoine culturel communs.
« N’y a-t-il pas assez de saleté dans notre pays ? »
Le premier est l’importation des déchets italiens en Tunisie. Un fait d’actualité qui continuera sans doute à occuper les esprits. La question de l’importation des déchets fait l’objet d’une enquête –en Tunisie, mais aussi en Italie- et ses tenants et aboutissants devraient donc être révélées au grand jour dans un moment ou un autre.
L’événement a réussi, pour l’heure, à acquérir une certaine dimension. Il y a lieu de penser qu’il y a là corruption : faire passer des déchets municipaux pour des déchets plastiques est d’abord un non-respect de l’environnement. « N’y-a-t-il pas assez de saleté dans notre pays ? », se sont exclamés certains internautes sur les réseaux sociaux.
D’évidence, rien ne prouve que la corruption soit le fait aussi de la partie italienne. Cependant, cela soulève des doutes chez le Tunisien. Il s’interroge sur les réelles intentions des uns et des autres. N’a-t-il pas été plus d’une fois roulé dans la farine ?
Le second événement est intervenu à quelques jours d’intervalle. Il concerne cette déclaration de la ministre italienne de l’Intérieur, Luciana Lamorgese sur un ton dominateur, à un quotidien italien conservateur (Il Giornale), selon laquelle, l’Italie va déployer, en accord avec les autorités tunisiennes, des navires et des avions en dehors des eaux italiennes pour mettre un terme à la migration.
Une information réfutée par le département tunisien des Affaires étrangères et sans que les autorités italiennes pipent mot sur ce démenti. Une déclaration qui en dit long sur cette attitude un tant soit peu rugueuse des autorités italiennes sur un contrôle de la migration allant jusqu’à toucher à la souveraineté de notre pays. Que peut signifier le souci d’aller à la recherche du migrant en dehors des eaux italiennes ?
89 216 Italiens vivaient en 1926 en Tunisie
Cette rudesse beaucoup en ont parlé déjà en août dernier lorsque le gouvernement italien a évoqué l’expulsion de migrants clandestins tunisiens dont les barques échouent sur les côtes italiennes. En usant jusqu’à des « pressions ».
Nous avons parlé, ici, d’un précédent de la part d’un gouvernement qui ne cesse de privilégier la voie sécuritaire oubliant que dans un passé pas si lointain les Italiens migraient en Tunisie fuyant la pauvreté et étaient bien accueillis.
Selon un recensement effectué par les autorités françaises en 1926, 89 216 Italiens vivaient en Tunisie « fuyant la misère qui sévissait dans les campagnes de la péninsule travaillant comme ouvriers, artisans ou encore pêcheurs » (Voir notre photo). Un moment de l’histoire au cours duquel la population tunisienne n’excédait pas 2,2 millions d’âmes.
Réaction d’un citoyen lambda au sujet de cette rudesse italienne : « C’était peut-être pour remercier les Tunisiens de l’envoi en avril dernier d’une équipe de médecins et d’infirmiers tunisiens venus soutenir les Italiens dans leur lutte contre le coronavirus » !