Les magistrats Béchir Akremi, ancien procureur de la République et Taïeb Rached, président de la Cour de cassation, se livrent à une bataille féroce. Sur fond de présumées accusations mutuelles de corruption et d’obstruction à la justice. Et ce, dans les affaires d’assassinat politique de 2013.
Ainsi, c’est une affaire inédite dans les annales de la justice tunisienne à laquelle nous assistons. En effet, deux juges au sommet de l’institution judiciaire déballent leur linge sale en public et sur les réseaux sociaux. Il s’agit donc d’un conflit, ou plutôt d’un bras de fer, entre deux magistrats.
Accusation de corruption
Mais qu’en est-il exactement? Selon Taieb Rached, Béchir Akremi aurait procédé à une enquête personnelle sur des biens en sa possession. L’accusant de ne pas avoir déclaré son patrimoine à sa juste valeur. Ainsi que d’avoir triché sur la valeur de plusieurs propriétés et terrains achetés.
Toujours selon la même source, « Akremi publiait un dossier dont la conclusion s’oriente vers des faits de corruption. Laissant entendre que cela ne concerne que ses biens propres et non ceux de sa famille ». Par conséquent, il réclame au Conseil supérieur de la magistrature (CSM) la levée de l’immunité de son confrère de la Cour de cassation.
« Brouillage des cartes »
Pour sa part, Taïeb Rached a transmis un rapport à l’inspection générale du ministère de la Justice. Il y accuse son confrère Béchir Akremi de « dépassements et d’abus ».
En effet, il reproche à l’ancien procureur de la République, souvent accusé par le Comité de défense de Chokri Belaïd de faire obstruction à la justice et d’être au service d’Ennahdha, d’avoir cherché à brouiller les cartes. Et ce, dans les affaires sensibles d’assassinats politiques. De même que de morceler les dossiers dans différentes affaires. Et enfin de paralyser les procédures en laissant en suspens le classement ou non des affaires.
Selon le rapport publié sur la toile par Taïeb, « son confrère aurait même abusé de son pouvoir. Et ce, quand il était procureur de la République. Pour frapper ses ennemis à travers la police judiciaire, le pôle judiciaire antiterroriste, ainsi que le pôle judiciaire économique ».
Pour rappel, Akremi était muté en août sur décision du Conseil national de la Magistrature. Alors, aurait-il bénéficié de protections à haut niveau, en particulier auprès d’Ennahdha dont il est réputé proche, comme le soupçonnent ses détracteurs?
I Watch « Soupçons de corruption »
Par ailleurs, « I Watch » s’est dite préoccupée par les soupçons de corruption. Ceux-ci pèsent sur les deux magistrats en question. D’ailleurs, l’organisation rappelle que ce sont des postes sensibles qu’occupent ces deux hauts responsables dans le système judiciaire tunisien.
D’autre part, et en réaction, à l’affaire de demande de levée de l’immunité du premier président de la Cour de cassation dans laquelle la justice tunisienne n’a pas encore tranché, l’Association des magistrats tunisiens (AMT) a réagi. Et ce, pour déplorer l’entrave aux travaux du Conseil supérieur de la magistrature (CSM) sur ce dossier. L’AMT a dénoncé la publication des rapports du CSM sur les réseaux sociaux et les répercussions désastreuses d’un tel acte sur la justice tunisienne.
Une affaire explosive à suivre…