La nomination de Mohamed Ghariani, ancien et dernier secrétaire général du RCD en tant que nouveau conseiller de Rached Ghannouchi, a suscité une vive polémique. Et ce, lors de la plénière consacrée hier dimanche aux débats sur le projet de loi de Finances 2021.
La désignation de Mohamed Ghariani, ancien et dernier secrétaire général du RCD en tant que nouveau conseiller de Rached Ghannouchi, chargé de la réconciliation nationale, n’a cessé de susciter des remous. Et ce, aussi bien au sein du parti islamiste d’Ennahdha que dans les rangs de la formation destourienne d’Abir Moussi. Pour des raisons évidentes.
« Réconciliation ou vengeance »
En témoigne l’intervention de Rached Ghannouchi, président de l’ARP et d’Ennahdha. Il s’exprimait en marge de la plénière consacrée hier dimanche 29 novembre aux débats sur le projet de loi de Finances 2021.
En effet, le cheikh a défendu bec et ongles son protégé. Arguant que sa nomination est un signe d’ouverture d’esprit et de respect de la diversité. « Il n’existe que deux façons de traiter avec les symboles de l’ancien régime: la réconciliation ou la vengeance ». Ainsi a-t-il tranché.
« La Révolution ne s’est pas retournée sur ses pas. Elle se concentre plutôt sur le présent. Certains pays du Printemps arabe ont opté pour la vengeance. Ils ont échoué alors que la Tunisie est restée vent debout. Nous devons plutôt nous inspirer de l’expérience de l’Afrique du Sud ».
Et de poursuivre: « Mohamed Ghariani a présenté ses excuses au Peuple tunisien. Il n’a pas fait l’éloge du passé et même pris le train de la Révolution. Par conséquent, il est de notre devoir d’accueillir tous ceux qui veulent rejoindre la Révolution, la Loi et la Constitution », a encore conclu le Cheikh.
Mais à qui s’adresse le vieux briscard de la politique? De toute évidence à Abir Moussi en premier lieu. Mais aussi aux frondeurs d’Ennahdha qui ont crié au pacte avec le « diable », en second lieu.
De même, il est clair que Ghannouchi cherchait à narguer sa bête noire patentée en débauchant son ex-patron au RCD. Ultime pied de nez à celle qui travaillait sous ses ordres avant 2011.
« Pas de réconciliation avec les Frères »
Et la réponse de la députée Abir Moussi ne s’est pas faite attendre: « En tant que président de l’ARP, vous n’avez pas les prérogatives pour vous ingérer dans le dossier de la réconciliation. Nous ne nous réconcilierons pas avec les extrémistes. Pour les révolutionnaires qui parlent du RCD à tout va, voilà que le secrétaire général du RCD est là en chair en os pour répondre à vos questions. S’il met les pieds au Parlement, nous, les députés du PDL, nous crierons dégage et pas de réconciliation avec les Frères », a menacé la présidente du parti destourien en réponse au cheikh de Montpalsir.
« Gaspillage de l’argent public »
Passant à l’attaque, elle accuse le président du Parlement de « corruption et de gaspillage de l’argent public; en accordant des voitures de luxe à ses collaborateurs ». « Le président de l’Assemblée recrute pour son cabinet les têtes de liste de son organisation et leur donne des avantages dignes de ministres. Il ramène les dirigeants de son Conseil de la Choura et les place à la tête de ses cabinets. Il vient d’acheter une Audi A4 à son chef de cabinet qui vaut 165.000 dinars. Et il parle de réduction du budget. Tout cela n’est que populisme pour duper le peuple », assure encore la présidente du PDL.
Pour rappel, d’autres députés, Mongi Rahoui et Hichem Ajbouni notamment, ont aussi critiqué cette nomination. Ils ont menacé d’empêcher Ghariani d’accomplir sa nouvelle mission.
Pour de nombreux observateurs, cette dernière passe d’armes entre ces deux bêtes politiques, lesquelles de surcroît se vouent une haine farouche, s’inscrit dans la course aux horizons électoraux, avec la volonté d’en découdre. Question de vie ou de mort!