La Confédération des Entreprises Citoyennes de Tunisie (CONECT) a organisé, le 18 décembre 2020, un webinaire sous le thème : « Quels financements à moindre coût pour la PME en cette période de pandémie ? »
Le choix de la thématique par la Conect résulte de la nature du tissu entrepreneurial tunisien. Pour rappel, ce tissu économique tunisien est constitué de plus de 90% de PME. « Les PME souffrent ! Elles ne jouissent pas d’un financement adéquat », a déclaré Tarak Cherif, Président de la CONECT. Il a expliqué que les banques tunisiennes sont principalement des banques universelles.
Le Président de la CONECT ajoute que les difficultés rencontrées par les PME sont le résultat de l’absence de banques de développement. Il a considéré que la BFPME est une petite structure qui est, dans la plupart du temps, en attente de nomination d’un DG. Il a aussi critiqué la complexité des procédures et moyens de financement des PME. En plus, le président de la CONECT a souligné la différence entre le coût de crédit entre la Tunisie et celui pratiqué dans plusieurs autres pays.
En effet, le coût du crédit en Europe est entre 0% et 1% alors qu’en Tunisie, il est entre 10% et 12%. D’autre part, il a rappelé que les banques préfèrent octroyer des crédits à l’Etat puisqu’il n’y a pas de risques.
Enfin, le Président de la CONECT a insisté sur la nécessité de créer des banques et des fonds d’investissement dédiés au financements des PME. Il a affirmé que les alternatives possibles sont les lignes de crédit étrangères.
Afin de partager l’expérience d’autres pays en matière de facilitation d’accès à un financement adéquat pour la croissance des PME, la CONECT a donné la parole aux représentants de 3 lignes de crédit de la France, l’Italie et de l’Allemagne pour partager les expériences de leurs pays en matière de modalités, critères d’éligibilité, avantages et taux d’intérêts.
La ligne de crédit française
Florentin Hyvert, adjoint de la chef du service économique régional de l’Ambassade de France en Tunisie, a précisé que l’ambassade a lancé en janvier 2020 une ligne de financement d’une valeur totale de 30 millions d’euros au profit des PME tunisiennes avec un montant d’investissement ne dépassant pas les 15 millions de dinars. Elle est octroyée pour l’acquisition de biens ou services fabriqués en France. Un bien ou un service doit avoir, au moins, un contenu de 70%. Notons que la ligne de crédit a été créée pour renforcer les liens avec des entreprises françaises et faciliter l’investissement productif des PME et PMI tunisiennes.
La ligne de crédit se compose de deux parties. Une première partie d’un montant de 24 millions d’euros. Elle est destinée à l’achat de biens et de services d’origine française. Une deuxième partie d’un montant de 6 millions d’euros destinée à l’accompagnement (Assistance et formation) des PME. Un don est accordé si la PME ou PMI ont accès à un prêt. Le prêt est compris entre 100 mille et 2 millions d’euros. Le don ne doit pas dépasser 25% du montant total du prêt.
Florentin Hyvert a précisé que le taux d’intérêt pour les prêts est de 2,5% par an avec une durée de remboursement de 15 ans dont 10 ans de grâce maximum.
Le programme italien de financement au profit des PME
Alessia Tribuiani, responsable du secteur économique et création d’emploi de l’Agence Italienne pour la Coopération au développement de Tunis, a présenté deux instruments d’appui au secteur privé tunisien.
D’une part, l’agence a mis au point une ligne de crédit en faveur des PME d’une valeur de 73 millions d’euros. Alessia Tribuiani a expliqué qu’il s’agissait de la 8ème ligne mise en place depuis 1988. En totalité, le soutien de l’agence en Tunisie a permis la réalisation de 600 opérations de financement et la création de 10 mille emplois. L’agence a lancé la 8ème ligne en 2013. Elle octroie des prêts d’investissement pour l’achat de biens et d’équipements d’origine italienne.
Une large panoplie de secteurs a la possibilité de profiter de cette ligne. Par contre, elle ne finance pas les fonds de roulement des nouvelles PME, les taxes sur les revenus et les droits de douane, les travaux de génie civil, les biens d’ameublement et de luxe et les équipements d’occasion. Elle accorde un prêt entre 55 mille euros et 2,4 millions d’euros. Le taux d’intérêt pour les prêts est de 4,5% par an avec une durée de remboursement de 10 ans dont 3 ans de grâce maximum.
Aussi, un fonds supplémentaire de 4 millions d’euros pour le soutien aux mesures conjoncturelles accompagne la ligne. Ce fonds vise à subvenir aux besoins des entreprises en difficulté financière. Il permet de financer le fonds de roulement de l’entreprise. De plus, il peut servir au rééchelonnement des tranches de crédits non remboursées depuis 12 mois. Il accorde un prêt qui ne dépasse pas les 100 mille euros. Le taux d’intérêt est de 4,5% par an. La période de remboursement est de 12 mois pour les fonds de roulement et de 5 ans pour le rééchelonnement.
PRASOC
D’autre part, Alessia Tribuiani a présenté le programme PRASOC. Elle a précisé qu’il comporte deux lignes de crédits. La première est une ligne de 35 millions d’euros dédiée à l’agriculture et à la pêche. La deuxième est une ligne de crédit de 15 millions d’euros dédiée à l’économie sociale et solidaire(ESS). Les banques, les sociétés de leasing et les IMF auront pour rôle de véhiculer les crédits. Un fonds de don d’une valeur de 7 millions d’euros accompagne cette ligne de crédit. Le taux d’intérêt est de 8% pour les deux lignes de crédit et le don est plafonné à 14% de la totalité du prêt.
La représentante de l’agence italienne a ensuite présenté le programme ADAPT. Il s’agit d’un programme complémentaire au PRASOC. Elle a indiqué que le programme sera opérationnel début 2021. Le programme est doté d’un fonds de 44,4 millions d’euros. Ces fonds ont pour objectif de financer le secteur de l’agriculture et de la pêche artisanale en faveur de systèmes de production écologiques et durables.
Le programme de la Banque allemande de développement (KFW)
Alessandro Doehnert, chargé de portefeuille KFW à la banque allemande de développement, a précisé que son institution a mis en œuvre un projet de financement des TPE et PME. Ce projet comporte une ligne de crédit de 140 millions d’euros. Les crédits sont accordés aux entreprises dont le chiffre d’affaires est inférieur à 10 mille dinars et moins de 200 employés. Cette ligne de crédit est rétrocédée à sept institutions financières. Il s’agit de quatre banques et trois sociétés de leasing à savoir l’Amen Bank, l’ATB, la BNA et la STB, l’ATL, la Compagnie Internationale de Leasing (CIL) et Hannibal Leasing.
Notons que les entreprises existantes et les nouvelles créations ont accès à cette ligne. Elle ne se limite pas à l’acquisition de biens et services allemands.
La KFW a pour objectif spécifique d’appuyer les régions défavorisées notamment les 16 gouvernorats avec un indice de développement régional le plus faible. Elles bénéficieront de 30% de la ligne.
La mesure d’accompagnement de la KFW
Hervé Proust, Responsable du programme TPME II de la KFW, a exposé les mesures d’accompagnement fournies par la KFW pour l’appui des TPE.
En effet, ces mesures s’organisent autour de 3 thèmes. Le premier porte sur l’assistance technique des institutions financières privées (banques et leasing). Le deuxième se concentre sur la gestion de la ligne de crédit. La BCT est partenaire dans le processus. Cette mesure inclut une plateforme digitale. Le troisième thème s’oriente vers l’accompagnement des TPE et PME. Ce dernier est en cours de mise en place.
L’initiative TAMWEELI
Jihene ben Abda du Program Manager Tamweeli a présenté l’initiative. Elle a expliqué que la plateforme est un projet de l’organisation MEII. TAMWEELI offre un accompagnement technique. En effet, elle permet à des entrepreneurs d’accéder à des formations. Elle met aussi à leur disponibilité un stagiaire en comptabilité sur 6 à 12 mois. TAMWEELI prend en charge ce stagiaire.
Cette plateforme permet de mettre en réseau les demandeurs de financements aux institutions de financement. Elle s’adresse à toutes les TPME tunisiennes. TAMWEELI assiste aussi les entrepreneurs dans le choix de financement et la préparation du dossier requis.