Il est incontestable que le chef historique d’Ennahdha, Rached Ghannouchi est sorti affaibli du bras de fer qui l’oppose à ses détracteurs au sein même du parti. Non seulement il perd une partie de sa garde rapprochée à l’issue de l’élection des membres du nouveau bureau exécutif. Mais il se voit contraint d’accorder le poste de vice-président à Abdellatif Mekki, un contestataire notoire.
Qui aurait cru un instant qu’Abdellatif Mekki, le dirigeant frondeur à la tête du Groupe des 100, soit nommé vice-président chargé des relations avec les organismes nationaux? Et ce, à l’issue de l’élection des membres du nouveau bureau exécutif d’Ennahdha. Tandis que l’apparatchik Rafik Abdessalam, fidèle parmi les fidèles et de surcroît gendre du cheikh Rached Ghannouchi, est honteusement éliminé.
Pourtant, c’est ce qui s’est passé la nuit du réveillon de la Saint-Sylvestre. Quand les membres du conseil de la Choura d’Ennahdha ont fini par élire, à l’aube, les 38 membres du nouveau Bureau exécutif. Lequel avait été dissout par Rached Ghannouchi lui-même, en mai 2020.
A noter que le nouveau bureau exécutif enregistre l’abandon du poste de secrétaire général du parti. Tandis que les postes exécutifs ont été renforcés avec de nouvelles nominations à la vice-présidence.
Abdellatif Mekki à l’avant-poste
En outre, Ennahdha publiait samedi 2 janvier 2021, la liste des cinq membres désignés en tant que Vice-présidents du parti:
- Ali Laârayedh: Vice-président chargé de la politique interne;
- Noureddine Bhiri: Vice-président chargé de la politique extérieure;
- Abdellatif Mekki: Vice-président chargé des relations avec les organismes nationaux;
- Ajmi Lourimi: Vice-président chargé de la stratégie;
- Wassila Zoghlami : Vice-présidente chargée de la Femme et de la Famille.
Ghannouchi descend de son piédestal
Alors quels enseignements tirer de la composition du nouveau Bureau exécutif? A priori, que le chef historique du parti islamiste, de plus en plus contesté dans son propre camp, perd la main sur ses troupes.
Ainsi, il le Groupe des 100 gagne d’évidence du terrain. Des détracteurs aux dents longues qui contestent désormais publiquement ses choix et décisions. La preuve? Il fut contraint, la mort dans l’âme, d’offrir à Abdellatif Mekki, le fils rebelle, le poste tant convoité de Vice-président chargé des relations avec les organismes nationaux.
Par ailleurs, et en dépit des concessions faites à l’adversité, Rached Ghannouchi constate avec effroi la perte de ses lieutenant les plus proches. Dont son gendre éclaboussé par l’affaire du Sheraton Gate. Mais aussi: Anouar Maârouf, empêtré dans l’affaire de la voiture administrative endommagée par sa propre fille; et Fathi Ayadi très proche du cheikh.
Sans oublier la garde rapprochée formée par les fidèles parmi les fidèles. A l’instar de: Abderraouf Bedoui, Sayida Lounissi, Ridha Saïdi, Mohsen Nouichi, Ridha Driss. Et encore: Mohamed Goumani, Mohamed Mahjoub, Hédi Ben Khelifa et Mohamed Mohsen Soudani. Lesquels n’ont pas pu atteindre ou dépasser cette fameuse barre de 50 voix.
De plus, il convient de rappeler à cet égard que cette élection revêt une importance capitale. Et ce, en raison de la guerre ouverte qui oppose désormais le clan pro-Ghannouchi au Groupe des 100. Ce dernier, à l’approche du 11ème congrès, avait accompli la prouesse de contraindre le cheikh de Montplaisir à s’engager à respecter le règlement intérieur du parti. Et par conséquent, à ne pas présenter sa candidature à la tête du parti.
« Conflits internes »
Ainsi, dans un commentaire acerbe livré dimanche 3 janvier 2021 au quotidien arabophone Al Chourouk, Lotfi Zitoun, le dirigeant démissionnaire d’Ennahdha, considère que les dernières élections des membres du bureau exécutif du mouvement sont « la preuve que le parti est en train de sombrer, au fil des jours, dans les conflits internes ». C’est ce que constate froidement l’homme qui avait osé braver ouvertement l’autorité de son ancien mentor politique.