Lotfi Zitoun, qui s’exprimait hier mardi dans les colonnes de notre confrère d’Acharaa Al Magharibi, a confirmé que sa décision de quitter le parti islamiste Ennahdha est « définitive et irrévocable ». Par ailleurs, il a conseillé à son ancien mentor, Rached Ghannouchi, de « prendre toutes les mesures nécessaires pour ne pas se retrouver dans la même situation que l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali ».
L’on se demande pour qui roule l’enfant terrible d’Ennahdha? Pourquoi persiste-t-il à tirer à boulets rouges sur son ancien mentor Rached Ghannouchi? Lotfi Zitoun a-t-il l’intention de créer un parti plus soft, plus présentable en parallèle d’Ennahdha? Alors qu’il en était un influent dirigeant, avant de basculer dans la fronde frontale et la contestation systématique.
A toutes ces questions, l’ancien ministre a répondu hier mardi dans les colonnes de notre confrère d’Acharaa Al Magharibi. Des réponses assumées, avec sa franchise habituelle teintée d’un brin de provocation.
Une décision « irrévocable » de Lotfi Zitoun
Tout d’abord, il est revenu sur sa démission fracassante de toutes les institutions du parti islamiste. Ainsi, Lotfi Zitoun affirme qu’après avoir claqué définitivement la porte, son retour est impossible et sa décision « irrévocable ».
D’ailleurs, l’ex-conseiller du chef historique d’Ennahdha, dont il était un fidèle parmi les fidèles, ne cache pas le peu de cas qu’il fait de la classe politique tunisienne. « Mon départ d’Ennahdha est définitif », dit-il. Tout en révélant à l’occasion avoir pris sa décision « avec 10 ans de retard».
L’idéologie caduque?
Et d’ajouter: « Le système des partis politiques est au bout du rouleau, car le système partisan traditionnel et idéologique a montré ses limites. Par ailleurs, je ne pense pas que l’idéologie puisse changer la situation actuelle du pays; y compris l’idéologie à laquelle j’appartenais », a-t-il le courage d’avouer.
En outre, souligne Lotfi Zitoun: « Les indépendants constituent aujourd’hui la principale force proche des vraies préoccupations des Tunisiens; ainsi que de l’intérêt du pays. La preuve? Leur montée spectaculaire durant les élections municipales de 2018 ». Faisant savoir, à l’occasion, à ceux qui veulent bien l’entendre qu’il n’a « nullement l’intention de fonder son propre parti politique ».
Le spectre de Ben Ali
Puis, il lance une flèche empoisonnée en direction du président d’Ennahdha. « J’ai un grand passé avec Rached Ghannouchi que je respecte beaucoup et qui restera mon ami… Je pardonne à tous mes camarades qui m’ont fait du tort et qui m’ont accusé de divers maux », déclare-t-il.
Mais, estime-t-il, « Ghannouchi fait partie du problème et non de la solution ». Alors Lotfi Zitoun dit craindre un sort « à la Ben Ali » pour son ancien mentor. Lequel est censé être « une force de rassemblement et de consensus, non une partie prenante du conflit ».
Par conséquent, « je lui conseille de prendre toutes les mesures nécessaires pour ne pas se trouver dans la même situation que l’ancien président Zine El Abidine Ben Ali et d’éviter ainsi la colère du peuple », ajoute-t-il. Un avertissement lourd de sens, alors que nous sommes à la veille de la date du 14 janvier, jour de la chute de l’homme du 7 novembre 1987.
Enfin, dans un commentaire sur le départ de celui qui « avait l’oreille de Rached Ghannouchi », Abdellatif Mekki, l’un des chefs du groupe frondeur des 100, promu dernièrement à la dignité de vice-président du Mouvement d’Ennahdha, a indiqué qu’il n’avait pas été surpris par la décision de Zitoun. « Lorsqu’un conseiller n’est plus sur la même longueur d’onde que celui qu’il conseille, la séparation entre les deux hommes devient inéluctable ». Elémentaire, mon cher Watson.