Avec ces quatre jours de reconfinement, la pression économique sur les ménages n’a jamais été aussi forte. Alors, qu’en est-il de l’inflation? Si les Tunisiens ont pu s’en sortir durant le premier confinement de 2020 et, surtout, assez convaincus, ce n’est plus le cas aujourd’hui.
En effet, la reprise n’a jamais été au rendez-vous et les séquelles économiques se sont aggravées au fil du temps. Le résultat a été observé au niveau de l’inflation qui s’est établie à 5,6% en 2020; contre 6,7% l’année précédente. En rythme mensuel, après le pic du mois d’avril (6,3%), l’inflation en décembre était de 4,9%.
Equilibre fragile
En outre, la crise sanitaire a poussé certains prix à la hausse, pas suite à une demande soutenue, mais à l’initiative des professionnels qui tentent de réaliser un rattrapage en termes de chiffre d’affaires. Durant le mois de décembre, certains groupes de produits ont affiché une appréciation des prix, comme les articles d’habillement et chaussures (+1,5%), la santé (+1,2%) et les restaurants et hôtels (+0,4%).
Risque inflationniste limité
Alors, est-ce que cette tendance haussière va continuer durant le premier trimestre 2021? Nous pensons que cela serait le cas, mais au même rythme. Par rapport au premier confinement, le pouvoir d’achat a dégringolé. Nous ne parlons pas ici des salariés qui jouissent d’une rémunération garantie et d’un accès relativement facile aux crédits bancaires. Mais plutôt des indépendants et employés du secteur informel. Bien qu’elle ne contribue pas aux recettes de l’Etat, l’économie souterraine reste une pièce maîtresse dans l’équation de l’équilibre social. Tous les importateurs des gadgets et des articles de textile sont à l’arrêt depuis des mois. Et les frontières algériennes sont fermées à cause de la pandémie, privant toute une chaîne de revenus.
Par conséquent, la consommation globale va donc rester focaliser sur les produits de première nécessité. Et l’inflation, en rythme mensuel, ne dépasserait pas le seuil des 0,2% selon nos estimations.
La déflation n’aura pas lieu
Cette hypothèse exclut, de facto, le risque d’une déflation (baisse durable et générale des prix) qui commence à se dessiner en Europe.
Cependant, il y a quelques arguments qui rendent le risque d’une telle tendance envisageable. A commencer par un recul de la consommation des ménages et des investissements des entreprises.
De même, instaurer un mini-confinement n’inspire pas confiance aux agents économiques dont plusieurs pensent sérieusement qu’un long confinement finira par venir. Les décisions prises par la France hier et le prolongement de l’état d’urgence en Italie montrent que même la vaccination ne peut pas changer la donne du jour au lendemain. De plus, ce sont nos deux principaux partenaires commerciaux et les entreprises peuvent freiner leurs plans de développement. D’ailleurs, les banques pourraient limiter la distribution de crédit. Moins de dépenses feront moins d’activité économique, moins d’emplois et moins de consommation.
Mais ce qui limitera l’impact d’un tel mécanisme serait le volume de la monnaie en circulation qui continue à être élevé. Il suffit de penser à la manière dont le déficit budgétaire de la fin d’année dernière a été financé pour le comprendre.
La main invisible de la solidarité
Autre élément important à prendre en compte est le rôle pivot des relations privées. Les membres de chaque famille s’aident mutuellement durant les moments difficiles. Ce qui offre une bouffée d’oxygène et compense la baisse du pouvoir d’achat. Nous l’avons déjà observé auparavant et il devrait s’intensifier durant les mois à venir.
La solidarité, notion usée par le régime de Ben Ali, reste un mécanisme clé dans l’équilibre social et économique en Tunisie.