Une station de dessalement de l’eau par voie thermique, énergétiquement autonome, a été inventée par des compétences 100% tunisiennes. Toutefois, elle attend toujours la subvention de l’Etat, pour pouvoir passer au stade de la fabrication à l’échelle industrielle, déplore Samir Hamza, professeur en génie mécanique et directeur de l’INSAT.
L’ancien directeur de l’Ecole nationale des ingénieurs de Tunis (Enit) et ex-ministre, Ahmed Friaa a initié et piloté le projet. Samir Hamza, de son côté, s’est chargé de sa mise au point. La société ICE a conçu le prototype pilote de la station.
Brevetée par l’INNORPI en 2017, la station de dessalement de l’eau par voie thermique (par l’énergie solaire) est subventionnée par la Société Solartech S.A. (promotrice du projet de technopôle Djerba-Zarzis).
Samir Hamza a indiqué que cette invention porte sur un procédé original de dessalement de l’eau par voie thermique et fait appel à un certain nombre de techniques originales.
Le processus de dessalement
Et de poursuivre, « Il existe en gros deux principaux procédés pour le dessalement de l’eau à usage domestique ou agricole à une échelle industrielle, l’osmose inverse la plus utilisée actuellement, et la voie thermique ».
L’osmose inverse consiste à appliquer à une quantité d’eau retenue par une membrane, une pression suffisamment grande, dépendante du degré de salinité de l’eau considérée, pour obtenir, à l’aval de la membrane, une eau dessalée. Ce procédé présente en particulier, deux inconvénients: d’abord, il nécessite de changer périodiquement les membranes, souvent coûteuses et ensuite, il est énergivore ».
« Quant au procédé thermique, il consiste en une opération du type évaporation-condensation. La température d’évaporation étant réduite, lorsque l’opération se réalise à une faible pression. Ce procédé présente de multiples avantages, étant moins coûteux, facile à déployer, et nécessitant moins d’entretien. Il est, aussi, respectueux de l’environnement d’abord parce qu’il dépend totalement de l’énergie solaire et ensuite, parce qu’il est modulable selon la quantité d’eau à épurer. Contrairement aux stations classiques qui rejettent les quantités d’eau non utilisées dans la mer, provoquant une plus grande salinité des eaux de mer dans certains sites et menaçant la richesse halieutique, notre station ne rejettera rien en mer», a-t-il aussi, précisé.
Le directeur de l’INSAT a souligné que « les eaux dessalées peuvent servir à l’irrigation comme aux besoins domestiques».
Fabrication à l’échelle industrielle
Et d’enchaîner, « nous avons breveté cette invention à l’INNORPI, mais pas encore breveté à l’échelle internationale, car c’est un processus coûteux. Nous avons mis au point un prototype pilote dont la capacité est de l’ordre de 10 m3. Nous travaillons, actuellement, à l’amélioration des performances techniques de cette station pour pouvoir augmenter son rendement ».
Samir Hamza déplore un certain désintérêt de la part de l’Etat quant à l’innovation et aux inventions, relevant qu’«une fois les performances de cette station améliorée, l’étape suivante consiste à passer à sa fabrication par le secteur industriel, mais pour pouvoir franchir cette étape, il faut qu’il y ait une subvention de l’Etat pour pouvoir lever les fonds nécessaires, sauf que nous n’avons reçu jusque-là que des promesses, rien de concret, malgré l’importance que revêt cette invention, vu la rareté de la ressource eau dans notre pays et le potentiel solaire dont il dispose».
Et de rappeler « Le lancement de ce projet a eu lieu en 2010. Nous avons commencé par une station de valorisation thermique des margines, puis l’idée a évolué vers une station thermique de dessalement ».
Samir Hamza, qui n’est pas à sa première invention, a aussi regretté une certaine déconnexion entre le monde de la recherche et développement et le monde industriel en Tunisie, estimant que cette connexion est indispensable pour faire avancer le pays dans tous les domaines.
Avec TAP