La PDG de la Gazelle est démise de ses fonctions, un mois et demi à peine après avoir été nommée à ce poste. Et si, tout simplement, elle n’avait pas les reins assez solides pour diriger un mastodonte de la taille de notre transporteur national?
Avec ses 8000 salariés pour une trentaine d’avions, dont plus de la moitié de la flotte est clouée au sol pour des raisons techniques, et ses dettes astronomiques qui s’accumulent de jour en jour, pandémie oblige, notre Gazelle nationale, l’un des plus anciens transporteurs aériens d’Afrique, est devenue l’emblème de la situation catastrophiques des grandes entreprises publiques. Considéré jadis comme l’un des plus beaux fleurons de nos entreprises étatiques, Tunisair respire aujourd’hui sous perfusions de l’Etat. A qui la faute?
Aux gouvernements successifs depuis la révolution qui se refilaient la patate chaude et aux 11 PDG appelés à la rescousse pour sauver une entreprise gangrenée par l’instabilité managériale et un sureffectif qui confine à la déraison au-delà de tout ce qui est imaginable.
Manque de flair politique
La dernière PDG en date, Olfa Hamdi, a été limogée hier lundi, un mois et demi à peine après avoir été nommée à ce poste. Une mise à l’écart qui est restée en travers de la gorge de cette jeune femme à l’avenir plein de promesses. Mais, on ne s’improvise pas patron d’une grande entreprise publique de la taille de Tunisair quand on ne comprend pas l’évidence de ne pas se mettre à dos la puissante centrale syndicale. Gratuitement, dès le premier jour, avec des discours démagogiques à l’emporte-pièce, par exemple debout sur une table à haranguer l’assistance.
« Noureddine Tabboubi prétend qu’il vise à sauver la Gazelle mais il demande de l’argent d’une entreprise malade ». Ainsi s’adressait-elle au patron de la centrale syndicale. Et de lui lancer à la figure: « Ceci prouve que vous n’êtes pas l’homme adéquat pour le poste de secrétaire général de l’UGTT. »
Une bourde monumentale digne d’une novice en politique. Puisqu’elle annonçait que l’UGTT avait demandé une avance estimée à des « millions de dinars » au titre des redevances des adhésions des agents de la Tunisair. Alors qu’en vérité, il s’agit des frais de l’adhésion des agents affiliés à l’UGTT et qui s’élèvent à 280 mille dinars. On est loin de chiffre erronés de « millions de dinars ».
Accumulation d’erreurs
Pour sa part, Moez Chakchouk, ministre du Transport et de la Logistique, a totalement démenti les rumeurs selon lesquelles Olfa Hamdi était démise de ses fonctions suite à des pressions exercées par la centrale syndicale. Arguant que le limogeage de cette dernière est motivé par une accumulation d’erreurs. La dernière en date étant le non-respect du devoir de réserve, en faisant fuiter des documents internes.
« Olfa Hamdi refusait d’assister à des réunions au sein du ministère. Le dernier exemple en date a été rapporté ce matin. Elle avait été convoquée ce matin au ministère, mais elle a préféré organiser une conférence de presse ». C’est ce que révélait le ministre, hier lundi, sur les ondes de Shems FM. Ajoutant « qu’il n’était pas sous pression et que le ministère prenait ses décisions en toute impartialité ».
Par ailleurs, il a martelé: « Il existe des dossiers brûlants à Tunisair qui nécessitent du travail et de l’humilité, et non pas des conférences de presse ».
Commentant les visites effectuées par Olfa Hamdi chez certains ambassadeurs, M. Chakchouk a souligné qu’elle avait reçu des mises en garde et des rappels à l’ordre pour lui faire respecter les us et coutumes de l’Etat. « Toutefois, elle ne s’y est pas conformée ».
Réaction étrange de l’intéressée. Selon sa version des faits, elle allait présenter, lors d’une conférence de presse qui était prévue hier lundi à 8h00, un programme de sauvetage de la Gazelle. Lequel programme a été refusé par l’actuel gouvernement, via la voix du ministre des Finances. Sous prétexte que l’Etat est partenaire de la compagnie Nouvelair. D’où la décision de son limogeage.
Embuscade?
Cette version tient la route, sauf que le reste nous laisse pantois: « J’étais en route vers le siège de Tunisair, lundi à sept heures du matin, quand j’ai appelé le ministre du Transport afin de savoir si j’avais vraiment été limogée. Ce dernier a démenti l’information en m’invitant à aller faire mon travail ». Ainsi affirmait l’ex-PDG de Tunisair, dans un post sur sa page FB.
Et d’ajouter: « Entretemps, le gouvernement a tenté de m’arrêter, n’eussent été des responsables « honorables » au sein de Tunisair et des sécuritaires qui m’ont prévenue par téléphone, afin que je ne tombe dans une embuscade ». Et de conclure, surjouant son rôle de victime, « le régime actuel est comme un cimetière pour les jeunes et les femmes ».
De quoi parle-t-on? D’embuscade, d’un gouvernement qui avait tenté de l’arrêter si ce n’était l’intervention de responsables « honnêtes ». On se croirait dans un film de série B. Nous sommes en plein délire.
Disons-le en toute franchise. Olfa Hamdi n’a ni la stature, ni l’expérience pour diriger un mastodonte de la taille de Tunisair. Une
erreur de casting aux origines bien plus lointaines pour ne pas tenir
pour responsable le nouveau ministre du Transport et de la
Logistique.