La Journée internationale du droit des femmes célébrée aujourd’hui, symbolise, depuis plus d’un siècle, la lutte pour l’égalité avec les hommes. La première « Journée des (droits des) femmes remonte au 19 mars 1911, suite à la décision de la Conférence internationale des femmes socialistes, en août 1910, de célébrer ce mouvement de de lutte. Ce jour-là, des manifestations de masse en faveur du droit (de vote, en particulier) des femmes sont organisées dans des pays européens.
Ce n’est qu’en 1914, que la date du 8 mars sera retenue pour l’organisation de ce type de manifestation réclamant notamment le droit de vote pour les femmes. Cette date constituerait la première véritable manifestation du 8 mars.
Au début des années 1970, les mouvements féministes occidentaux font de cette date un jour de mobilisation en faveur des revendications pour l’égalité des droits politiques et sociaux; mais aussi pour la légalisation du droit à l’avortement. En 1977, l’ONU officialise cette date la « Journée internationale des femmes ». Un événement qui a une résonance particulière dans le monde arabe. Où les revendications des femmes contre les discriminations prennent de l’ampleur. Celles-ci s’inscrivent dans le sens d’une histoire universelle.
La transformation de la condition de la femme dans le monde arabe
Dans le monde arabe, la condition de la femme est en voie de mutation. Ainsi, la transition démographique s’est traduite par une transformation de la condition de la femme. Celle-ci était vouée, au sortir de l’adolescence, au mariage et à la fécondité. Aujourd’hui, l’accès à l’école et à l’enseignement supérieur se conjugue avec un allongement de la période de célibat.
Cette évolution tient à des politiques publiques plus ou moins volontaristes en faveur des droits des femmes dans les domaines de la sphère publique et de la sphère privée. Sur ce plan, le moindre bilan est forcément contrasté. Les améliorations de la condition des femmes demeurent inégales et partielles.
L’accès à l’éducation et aux soins, la participation active aux différents domaines d’activités, la protection contre toutes les formes de violence et la reconnaissance de leurs droits ne leur sont pas garantis au même titre que les hommes. Une inégalité in jure et de facto qui freine le développement des pays concernés.
De plus, les éléments constitutifs de la transition démographique sont susceptibles d’être remis en cause par le retour en force des valeurs traditionnelles et la montée en puissance de l’islamisme politique. C’est la condition et le statut de la femme qui sont en jeu.
Une réalité contrastée
La réalité actuelle est donc contrastée. Ainsi, dans un rapport récent, la Banque mondiale (Opening Doors: Gender Equality and Development in the Middle East and North Africa, 2013) souligne un paradoxe. D’un côté, les femmes ont vu leur condition s’améliorer sensiblement. Car elles sont en meilleure santé, nettement plus instruites; et sont même désormais plus nombreuses que les hommes à faire des études supérieures. De l’autre, un ensemble de facteurs économiques, juridiques et culturels continuent de faire obstacle à l’accès des femmes à certains segments de l’espace public et à nombre de secteurs du marché du travail.
Si la difficulté à conjuguer carrière professionnelle et vie de famille est loin d’être propre aux femmes arabes; seule une sur quatre a un emploi ou est en recherche d’emploi, soit la moitié du taux observé à l’échelle mondiale. Le taux de chômage grimpe à près de 40% pour les femmes.
L’engagement des femmes dans la transformation des sociétés arabes
Les femmes sont en première ligne dans les contestations arabes depuis 2011. Luttant ainsi pour la dignité, la citoyenneté mais aussi pour une égalité des droits.
Les mobilisations qui traversent le monde arabe depuis 2011 mettent en lumière l’engagement des femmes dans leurs propres sociétés; y compris en Arabie saoudite. Certaines d’entre elles sont mêmes devenues des figures emblématiques: Tawakkul Karman, en première ligne dans la contestation contre le Président yéménite Ali Abdallah Saleh, est la première femme arabe à recevoir le Prix Nobel de la Paix. On peut citer plus récemment Hoda Shaarawi, Nazik Al-Mala’ika, May Ziadé, Fadwa Touqan, Djamila Bouhired, Nawal el Saadawi…
Toutefois, la mobilisation n’a pas concerné les seules étudiantes ou femmes socialement émancipées. En Tunisie, la vague qui est montée de Kasserine a été insufflée par nombre de femmes/mères désœuvrées. Par la suite, les crises sociales et autres grèves liées à des réalités locales ont mis en lumière les simples ouvrières, qui revendiquaient leurs droits face à l’exploitation dont elles pouvaient faire l’objet. Aujourd’hui, le fléau du chômage frappe durement une jeunesse féminine diplômée angoissée par le spectre d’une régression de droits difficilement obtenus; mais jamais vraiment acquis…
Quoi qu’il en soit, la condition féminine dans le monde arabe ne saurait se résumer aux clichés de la femme arabe, passive et simple victime de l’autorité patriarcale, écrasée par le poids des traditions et des religions. La citoyenneté dans le monde arabe se conjuguera au féminin ou ne sera pas.